Chapitre XXI

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Je ne reculai devant rien. Mon esprit était parti à la découverte de contrée lointaine. Je galopais à vive allure ne craignant ni l'eau, qui s'imbibait et fusionnait avec mes poils, ni le regard des gens. À cette heure tardive, la plage était quasiment déserte, seul quelques voyageurs ici et là se promenaient ou encore admiraient les étoiles. La lune diffusait ses rayons et parsemait mon pelage de reflets plus clairs. Le sel commençait à peser et me gêner légèrement dans mes mouvements, ainsi je ralentis l'allure. Je visionnais bien plus alors le paysage qui m'entourait. La plage s'étendait à perte de vue. Je profitais de ce moment de calme et de plénitude pour m'allonger dans le sable. Je prêtais une attention toute particulière à un petit groupe d'amis. Ils devaient être une bonne quinzaine assis tous en cercle dans le sable. Une avait une guitare et d'autres l'accompagnaient en chantant. Ils avaient tous l'air heureux ensemble. Des souvenirs enfouis depuis bien longtemps refirent surface. Ils s'engouffrèrent dans mon esprit. Je me revoyais en cours, je devais avoir treize, quatorze ans à tout casser. J'étais heureuse à cette époque là. J'avais quelques amis. Je souriais sincèrement, riais au blagues plus au moins marrantes. Je pouvais dire que j'avais goûté au bonheur. Et puis j'avais mon petit frère, la joie de vivre incarné. Cet enfant était une source de joie. Toujours à faire le pitre et des bêtises plus rocambolesques les unes que les autres. Pour la première fois depuis une éternité une larme coula de mes yeux doré. D'un coup de patte, j'essuyais cette traîtresse et chassais en même temps le reste de mes souvenirs.
Les chansons s'enchaînent et je ne vois pas le temps passer bercer par ces douces mélodies.
J'ai du m'assoupir un petit moment puisque je fus réveiller en sursaut par un corps se vautrant sur le mien. Je veux bien qu'il fasse nuit et que mon pelage ne soit pas réellement reconnaissable, mais quand même ! Je me levais d'un bon et le corps se retrouva au sol. Je tournais le regard vers l'amas embrassant le sable. Une brunette. Elle ne semblait pas tout à fait elle-même puisqu'elle restait là allongé. Son regard se leva dans ma direction. Je pus admirer deux yeux émeraudes s'écarquillaient de surprise et une bouche s'ouvrir en grand. Ses amis arrivèrent et semblèrent tout aussi surpris de me voir. Je veux bien les comprendre un loup aussi gros qu'un poney se trouvait juste sous leur yeux. L'alcool aidant, ou pas, la jeune femme sur le sol se releva avec difficulté. Je reculais discrètement. Ça s'est ce que je croyais tout les regards se braquèrent sur moi. Je n'aimais absolument pas être le centre de l'attention et encore moins sous ma forme lupine. Personne ne devait la voir aussi près. Je plaquais les oreilles sur mon crâne. La bombe fit un pas dans ma direction. Je ne bougeais pas d'un poil. Je suis un alpha. Sûrement le plus puissant des alphas. Jamais je ne reculerais devant une humaine totalement torchée. J'avais regardé la mort dans les yeux tout comme j'avais regarder la vie quitter les yeux de personnes. Elle s'avança encore. Sombre folle veux-tu goûter mes cros ? Je retroussais les babines. Les oreilles dressées. Recule petite humaine où tu auras à faire au grand méchant loup. J'avançais vers elle. J'avançais droit sur le groupe en lâchant un grondement sourd, venu du fond de la gorge. Ils reculèrent. Bien un minimum d'instinct de survie. Regardant toujours droit devant, je traversais le groupe la tête haute. Je repris mon chemin en trottinant. Je passais par diverses rue. On est jamais trop prudent. J'accélère le rythme de façon à ce que personne ne puisse me suivre. Slalomant pendant encore une bonne demi heure, je regagnais finalement ma nouvelle demeure. J'aimais par dessus tout l'air nocturne. J'enjambais la fenêtre d'un petit saut élégant et gracieux. Le processus inverse fut un peu plus douloureux. Finalement je gagnais la salle de douche au alentour de trois heures du matin. Le premier jour dans ma nouvelle fac allait être magnifique. Une fois propre comme un sous neuf, je me glissais sous la couette pour une courte nuit de sommeil.
À six heures tapantes le réveil sonna. Outch ça pique, ironisai-je intérieurement. Je viens de découvrir une nouvelle chose. La condition de surnaturel ne vous dispense pas de quelque courbature, même si elles sont légère et disparaissent aussi vite qu'elles sont apparues.
Je me préparais rapidement. Je sortis en prenant soin de fermer la porte à clef. Je me rendis à la fac à pied. Vous avez déjà essayé de circuler dans une grande ville ? C'est impossible. Je préférais largement me déplacer sur mes deux jambes. La musique dans les oreilles je traçais ma route. La musique c'est la vie. Elle nous permet de nous évader. Elle nous transporte dans un autre monde, nous fait ressentir une multitude d'émotions. Elle peut nous faire passer de la joie à la tristesse en une fraction de seconde. J'aime ressentir les émotions qu'elle me transmet. Ce sont les seuls que j'arrive à ressentir. Mon cœur est mort et froid. Plus rien ne parvient à franchir les barrières autour de lui sauf la musique. J'écoutais Sorry de Beyoncé. J'aime cette chanson pour ses paroles on ne peut plus vrai.
J'arrivais bien trop rapidement à mon goût à la fac. J'appréhende cette journée. Je suis une solitaire. Je n'aime pas me mélanger au autre. De plus une forme de peur avait élue domicile dans mon estomac. Personne ne te connais ici. Tout va bien se passer. Tu ne crains rien. Prenez moi pour une folle bonne à enfermer mais je vous assure ça marche réellement.
Je passais les portes et pénétrais dans l'enceinte de mon nouvel établissement.

Instincts bestiauxOù les histoires vivent. Découvrez maintenant