Chapitre 40

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Je n'avais rien oublié de son visage. Il est resté le même que dans mes souvenirs. Yeux petits, légèrement enfoncés. Nez long et rond sur lequel sont posées ses éternelles lunettes en demi-lunes. Peau mate, comme brûlée.

Il n'y a rien de beau en lui. Tout n'est que laideur et avilissement. Noirceur et cruauté.

-Tu reviens me voir après tout ce temps ? C'est gentil de ta part...

Son sourire me fait serrer les dents.

-D'où tiens-tu l'idée de ton stupide jeu ?je lui demande sèchement. Je ne suis venu que pour cette réponse. Ensuite, crois-moi, je te laisserai croupir dans ta cellule.

-Je suis surpris que tu ne m'aies pas posé cette question avant. Mais ne t'inquiète pas, je vais y répondre...

Il se passe la langue sur les lèvres, visiblement satisfait. Ne pas le frapper. Je dois rester calme.

Ce n'est plus de la peur que je ressens : c'est de la haine. Une véritable haine qui coule en moi et qui ne demande qu'à se déverser sur lui comme une pluie torrentielle.

-Tu sais que j'ai été battu par mon beau-père, reprend-il.

Je hoche la tête, le visage fermé.

-J'avais une rage folle contre lui, contre ce qu'il me faisait subir. Il fallait que je m'en débarrasse. Mais je ne voulais pas être aussi cruel que lui. Quand je t'ai recueilli, j'ai décidé de te laisser le choix : si tu réussissais à les quitter, je ne te battais pas.

-Quel choix !j'ironise aussitôt. Quitter ceux que j'aime par peur d'être battu, merci pour la liberté !

-Tu ne les aimais pas.

-J'ai aimé Antoine, au cas où tu l'aurais oublié, et je suis toujours amoureux d'Erwan.

-Je suis désolé.

-Non, tu ne l'es pas !je crache alors. Tu n'es pas désolé, tu ne le seras jamais, arrête de mentir !

-J'étais jaloux, si tu veux tout savoir.

Sa réponse m'arrête net. Lui, jaloux ? Impossible.

-De quoi ? De qui ?

-De toi.

Pardon ? Je le vois se redresser, le regard soudain brillant de rage.

-Oui, j'étais jaloux de toi et je le suis encore aujourd'hui !s'écrie-t-il. Jaloux de ta beauté, jaloux de ta douceur ! Jaloux de ton aspect séducteur ! Jaloux du charme que tu dégageais et qui marchait si bien ! La preuve, c'est que tu as réussi à séduire pendant toutes ces années ! Je voulais que tu les détruises, je voulais qu'ils souffrent et que tu souffres avec eux ! Voilà pourquoi je t'ai fait jouer !

Sa main s'élève dans les airs, je l'intercepte au vol en le regardant droit dans les yeux et je le force à la baisser. Il n'a plus le droit de me toucher. Je ne le laisserai plus me détruire. Plus jamais.

-Parfait. Tu as réussi et regarde où ça t'a mené. Tu es en asile et je suis libre.

-Peut-être, mais tu as perdu Erwan, j'ai donc eu ce que je désirais.

Je lui souris.

-Dans ce cas, je te remercie de m'avoir fait jouer. Parce que grâce à toi, je vais pouvoir le séduire à nouveau. Alors, merci de m'avoir appris la séduction.

Sur ces mots, je quitte la cellule. En passant devant celle d'Emery, je le regarde et m'excuse de l'avoir fait souffrir. Il lève vers moi des yeux vides et ne me répond pas. J'espère cependant qu'il m'a entendu...


Séduction Tome 2Où les histoires vivent. Découvrez maintenant