Putain de bordel de merde. A-t-il vraiment dit ce que je crois l'avoir entendu dire ? M'a-t-il vraiment demandé de le séduire ?
-Séduis-moi, T.
La réponse est oui. Deux mots. Deux minuscules mots qui viennent de faire basculer ma vie. Ma bouche s'assèche et j'ai soudain l'impression de ne plus savoir manier la séduction.
-Pour...Pourquoi me demandes-tu cela ?
Erwan ne me quitte pas des yeux.
-Parce que j'ai envie d'être avec toi. Je veux que tu me réhabitues au contact. Et il n'y a qu'avec la séduction que tu pourras le faire.
Le cœur battant à tout rompre, je me remets à manger. Pendant que je mange, sans le regarder, mon pied vient frôler le sien. Il le retire brutalement. Lorsque je lui lance un regard brûlant, je le vois écarquiller les yeux : il a compris que la séduction venait de commencer...
Je continue de manger et baisse à nouveau les yeux. Mon pied frôle une nouvelle fois le sien, tout doucement. Il le retire aussitôt et se met à trembler, tandis que mon cœur continue de battre à grands coups dans ma poitrine. Il veut de la séduction, il va être servi. Je suis dans mon élément dès qu'il s'agit de séduire.
Je ne le séduis pas pour qu'il m'aime à nouveau : le seul fait qu'il me l'ait demandé prouve qu'il n'a jamais cessé de m'aimer, contrairement à ce que je croyais. Je le séduis parce qu'il me l'a demandé et pour qu'on puisse être ensemble.
Tant qu'il ne fait que s'écarter, tout va bien. S'il se lève, tout est perdu. Parce qu'il sera à ce moment-là hors de portée et je ne pourrai plus rien faire.
Ne te lève pas, Erwan, je t'en supplie, ne te lève pas.
Je ne suis pas stupide : je sais que la séduction prendra encore plus de temps qu'avant. Que je dois y aller doucement. Erwan est véritablement traumatisé depuis que Thibault s'en est pris à lui, je ne dois pas le brusquer.
Je frôle à nouveau sa jambe et je le vois se tendre. Une fois de plus, il la retire.
-Erwan ?
Nos regards se croisent.
-Oui ?
Il tremble et je m'en veux de lui infliger ça, mais il me l'a demandé et je suis tout simplement incapable de lui refuser quoi que ce soit.
-C'est moi. C'est T. Ce n'est pas Thibault, d'accord ? Je ne te ferai aucun mal, détends-toi.
Je sais qu'à présent, tout contact est dans son esprit associé à la violence de Thibault. Il va lui falloir du temps, mais je suis prêt à le prendre.
Je le vois hocher la tête, cependant, ses yeux sont encore remplis de peur et il continue de trembler. Fidèle à moi-même, je reprends mes distances et son corps se détend légèrement. La lenteur a toujours été la clef de la séduction. Il me l'avait fermement appris et c'est pour cette raison qu'il m'avait donné deux mois complets. A présent qu'il a disparu de ma vie, je n'ai plus de contraintes. La séduction d'Erwan prendra le temps qu'il faudra.
Mon regard posé sur lui est toujours aussi torride et je le vois devenir de plus en plus rouge à mesure que les secondes s'écoulent. Il s'agite, visiblement mal à l'aise, tandis que je continue de le fixer. Je redoute le moment où il me suppliera d'arrêter, mais cet instant n'arrive pas et je me détends.
Il faut à tout prix que je lui fasse oublier le châtiment de Thibault.
