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  Je déglutis en voyant l'escalier qui s'enfonçait devant moi dans les entrailles de la terre. Je n'en voyais pas le bout.

  Nous allions rencontrer de nouvelles personnes, m'avait-on dit. Leoris avait eu l'air très réticent à cette idée, il s'était crispé entièrement lorsqu'Amadeo en avait fait l'annonce. Jalilia avait semblé le remarquer, et s'étaient empressés de lui assurer que tout se passerait pour le mieux. Je n'avais pas osé poser la moindre question.

  Je n'avais pas plus d'indices concernant les individus chez qui nous nous apprêtions à aller. Je ne savais pas qui ils étaient, même si je supposais qu'eux aussi étaient des « résistants » face à Cornelia. Je ne connaissais rien d'eux, ni leur âge, ni leur nombre. Peut-être allais-je me trouver parmi une centaine de personnes d'un coup ? S'ils voyaient une nouvelle débarquer, ne se méfieraient-ils pas ? Comme l'avait si bien fait Leoris. M'attaqueraient-ils, une arme à la main ? Non, bien sûr que non. J'étais bien accompagnée.

  Le doute s'immisçait tout de même en moi, augmentant au fur et à mesure que je m'enfonçais, toujours plus profondément, dans le sol. J'étais accompagnée, cela ne faisait aucun doute. Mais pouvait-on dire « bien » ? Des personnes que je connaissais à peine. Et que je n'arrivais vraiment pas à cerner. À vrai dire, je n'avais pas eu le choix de leur accorder ou non ma confiance. Je ne savais même pas où j'étais. Seule, perdue. Je m'étais retrouvée - par je ne savais même pas quel moyen - chez eux. Ils ne m'avaient pas encore tuée, c'était déjà ça ! Je pouvais m'estimer heureuse.

  Et s'il s'agissait d'un piège ?

  Plongée dans mes pensées, je ne vis pas la marche plus étroite que les autres. Mon pied atterrit directement sur la marche inférieure et n'arrêta pas ici sa course ; j'en dévalai encore plusieurs, perdant un peu plus de mon équilibre à chaque centimètre dévalé. Mon derrière s'apprêtait à entrer en contact avec le bois dur de l'escalier quand des bras m'attrapèrent fermement et me remirent d'aplomb.

  Le souffle court, je me retournai vers le propriétaire de ces bras salvateurs. La lueur inquiète que je lus dans ses yeux acheva de me troubler. Une voix résonna dans ma tête. C'est Leoris qui est venu te calmer tout à l'heure, Mirley, pas moi.

  Pourquoi, Leoris, pourquoi fais-tu tout cela ? J'aurais voulu le remercier, mais les mots ne réussirent pas à franchir le barrage de mes lèvres. Je ne parvins à échanger avec lui qu'un regard, que je finis par rompre.

  Lorsque je me tournai de nouveau pour continuer mon chemin, je sentis le regard insistant d'une personne sur moi. Je me rendis compte que nous étions arrivés en bas de l'escalier ; un garçon nous attendait là. Ses yeux me scrutaient.

  Je le reconnus immédiatement.

  Je compris alors l'appréhension qu'avait eue Leoris avant de venir à cet endroit. C'était dans ses souvenirs que j'avais vu le garçon qui me dévisageait à présent. C'était lui qui avait craché à la figure de ma Paire d'horribles paroles, le visage décomposé et déformé par la haine.

· • ·

  Ils étaient dix. Hommes comme femmes. De tous âges. Contrairement à ce que je craignais - doutes qui s'étaient décuplés en voyant le garçon des souvenirs de Leoris -, tous m'accueillirent avec bienveillance.

  Leoris semblait s'effacer. Il n'affichait plus du tout cette assurance insolente, cette sorte de supériorité, dont il faisait preuve depuis que je le connaissais. Jalilia, tout au contraire, était pleinement détendue et parlait joyeusement avec tout le monde. Amadeo, assis dans un coin, observait les gens autour de lui sans dire un mot.

MirlewnaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant