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Derrière celui-ci se trouvait une pièce glaciale, autant par sa température que par son atmosphère. Le temps y semblait figé, malgré les toiles d'araignées et les innombrables insectes qui grouillaient partout. Je fis un tour et observai cette salle circulaire. Elle contrastait fortement avec le couloir dans lequel je me trouvais juste avant. Seul point commun, le miroir qui servait de porte que je venais de franchir pour arriver là. Je la refermai derrière moi. Elle claqua et une fissure se forma dans le miroir.

Il faisait très sombre, mais j'arrivais à peu près à distinguer les éléments que j'avais sous les yeux. Une sorte d'établi faisait le tour de la pièce, épousant la forme arrondie des murs. Le bois dans lequel il était fait était joliment sculpté. Je m'accroupis pour être à sa hauteur. J'apercevais, à travers la poussière, des gravures. Des formes géométriques, surtout. Des volutes, des arabesques. Je les frôlai du bout des doigts puis me relevai. Cet établi portait de nombreux objets, parmi lesquels un assortiment de brosses à cheveux de différentes tailles, faites dans ce qui semblait être de l'ivoire. Il y avait également de nombreux flacons et fioles, vides, et un grimoire poussiéreux, dont la couverture s'émiettait, probablement autant grignoté par le temps que par les rats.

Mon regard se posa sur un pan de mur neutre, sur lequel seul un miroir était accroché. Ce dernier était brisé de toutes parts, quelques morceaux gisaient au sol. Alors que je m'en approchais, je vis dans le reflet une chevelure noire voleter autour d'une tête qui se détournait. Le cœur battant, je fis brusquement volte-face. Rien. La pièce était calme, silencieuse. Avais-je revé ? Je m'approchai à nouveau du miroir. Il ne me renvoya que ma propre image.

Je me retrouvai de nouveau face au miroir par lequel j'étais arrivée. Une fissure commençait à prendre forme devant mes yeux. La surface miroitante se craquelait. Une magnifique femme blonde apparut. J'eus un sursaut. J'avais l'impression de la connaître sans que ce ne soit vraiment le cas. Sans que je ne sache pourquoi, la voir m'apportait un sentiment d'inconfort. J'avais peur, mais j'étais surtout énervée. J'avais l'impression qu'elle se mêlait à ma vie, qu'elle s'occupait de choses qui ne la regardaient pas. Envahissante. Pourtant, tout en elle dégageait la grâce et la douceur. Ses cheveux blonds tombaient en de magnifiques boucles dans son dos. Son nez droit et aristocratique, son port altier et sa bouche joliment dessinée inspiraient le calme. Ses grands yeux de saphir me transperçaient, semblaient sonder mon âme.

- Ne laisse jamais tes émotions te submerger, ne laisse pas tes sentiments prendre le dessus. La haine, le dégoût et la culpabilité qui sommeillent en toi ne doivent pas se réveiller, tu dois les garder enfouis au plus profond de ton être. Ne les laisse pas ressurgir et tout détruire.

Une rage folle et incontrôlable s'empara de moi.

- Qui es-tu ? Qui es-tu pour me dire ça ? Je ne te connais pas, et tu oses me donner des leçons ? Tu ne sais rien de moi ! Comment oses-tu ?

- Je te connais mieux que quiconque. Mieux que toi-même.

- C'est faux ! Tu ne sais rien de ma haine et de ma culpabilité. De quoi serais-je dégoûtée ? Contre quoi ou qui serais-je en colère ? Pourquoi culpabiliserais-je ?

Elle me regardait sans rien dire, les yeux triste, presque blessée.

- Parle ! Dis-le-moi, puisque tu sais tout !

- Tu dois apprendre à maîtriser tes impulsions.

- Je sais me maîtriser d'ordinaire, mais là c'est sûr que tu es loin de m'aider !

- Ne fais pas la même erreur que tant d'autres ont faite avant toi, murmura-t-elle.

- Tais-toi ! Je ne veux plus t'entendre, je ne veux plus te voir.

MirlewnaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant