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Je fus réveillée en sursaut au milieu de la nuit par une voiture ayant mis de la musique à fond. Je me retournai dans tous les sens, cherchant pendant un long moment la position propice pour que je puisse me rendormir.

  Je me mis sur le dos et fixai mon plafond. L'épisode de la bibliothèque s'était produit quelques jours auparavant déjà, et pourtant il restait gravé en moi et me revenait sans cesse en mémoire. Que s'était-il réellement passé ce jour-là ? J'étais vraiment persuadée que je ne m'étais pas endormie. Mais pourtant Nola m'avait assuré que la bibliothèque n'avait pas été plongée dans le noir. Elle m'avait dit que j'avais dû m'endormir, et d'un sommeil sacrément lourd, car elle avait eu du mal à me réveiller, même en me secouant de toutes ses forces. Était-ce possible que ce fût encore un coup de cette mystérieuse Cornelia...? Non, bien sûr que non. Cette histoire me rendait folle.

  Ne parvenant toujours pas à trouver le sommeil, je finis par soulever ma couette et m'asseoir au bord de mon lit. Je décidai de me lever une bonne fois pour toutes. Je me sentais faible, sûrement pour cause de mon manque de sommeil, mais il me semblait bien que je n'avais pas le choix.

· • ·

« - Mme Sambre est absente. Ça te dit qu'on aille prendre un verre au bar en face ?

- Allez, pourquoi pas ! »

Nous traversâmes la rue et arrivâmes au bar. Nola choisit un Ice Tea et je pris un Coca. Nous passâmes du bon temps, à parler de tout et de rien, puis l'addition arriva. Je jetai un œil sur le morceau de papier et sursautai, tout en reculant ma chaise instinctivement.

« - Heu... Axelle ? Ça va ? T'es toute pâle ! Tu te sens bien ? »

Je regardai à nouveau le ticket. Non, je n'avais pas rêvé. Des lettres était écrites au stylo avec de l'encre plus que noire : trois lettres qui me donnaient la chair de poule, trois lettres qui hantaient mes pires cauchemars. PeV.

Je rassurai Nola et allai me réfugier aux toilettes. Je n'en pouvais plus, j'étais à bout. Comment ces lettres s'étaient retrouvées là, sur ma table ? Et ce n'était pas dû au hasard ; elles n'étaient pas imprimées sur le papier, mais avaient bien été ajoutées volontairement à la main. Mais comment ? Pourquoi ? Cette Cornelia me hantait. Était-elle là, près de moi, sans que je ne le sache ? J'avais l'impression de n'être en sûreté nulle part. Je frissonnai.

   Il fallait que je me calme. Je passai un coup d'eau fraîche sur mon visage. Au moment où je me relevais face au miroir, j'aperçus une chevelure noire soyeuse disparaître dans l'embrasure de la porte à laquelle je tournais le dos. Je fis brusquement volte-face, la respiration saccadée.

  Je m'approchai de la porte, tendue comme la corde d'un arc. Elle était fermée, rien ne bougeait. J'en ouvris brusquement le battant. Je retins ma respiration. La lumière était éteinte. Je l'allumai.

  Rien. Il n'y avait rien à part des toilettes et un petit lavabo. Je fis bien vite le tour de l'étroite pièce, vérifiant même au plafond. Je me rendis rapidement à l'évidence ; il n'y avait rien du tout.

  Lorsque je revins, Nola m'observait, inquiète. Préférant ne pas l'affoler plus, je lui dis que j'avais simplement mal au ventre. Elle m'offrit gentiment mon verre et nous retournâmes au lycée.

Je repensai tout l'après-midi à cette écriture sur le ticket. Quelqu'un m'avait-il suivie et écrit ces lettres simples, mais pourtant lourdes de sens, pour me faire passer un message ? S'agissait-il d'une menace ? Ou peut-être Nola avait voulu me faire une mauvaise blague, mais cela m'aurait étonné car ce n'était pas son genre. D'ailleurs elle ne savait pas ce que représentait ma blessure. Et la scène des toilettes ? Était-ce pure folie ? Avais-je des hallucinations ?

· • ·

J'étais dans mon lit et je n'arrivais pas à m'endormir. Je me levai et me plaçai face à la psyché. Je scrutai mon reflet sur la surface miroitante. Mon visage était fatigué, des cernes creusaient mes yeux. Mes cheveux roux avaient perdu leur éclat flamboyant. Ils étaient ternes, emmêlés. J'avais un teint pâle, maladif.

  Je vis mes parents se mêler à mon reflet, comme s'ils étaient là, juste derrière moi, dans cette chambre qui n'était pas la mienne. La chambre d'un orphelinat. Ils souriaient, me couvaient du regard. Je respirai un grand coup.

« - Je ne me laisserai plus abattre, je vous le promets. Je vais me reprendre en main, et vous serez fiers de moi. Je vous aime. »

  Une fois que j'eus prononcé ces mots, comme s'ils n'avaient attendu que ça, leurs reflets s'effacèrent.

Une envie pressante me pris soudain. Je me dirigeai vers les toilettes.

  Alors que je retournai dans ma chambre, j'entendis une voix masculine dans mon dos.

« - Coucou. »

Mon sang se glaça. Je me retournai lentement et eus juste le temps d'apercevoir vaguement deux silhouettes plantées devant moi avant de me retrouver dans le noir complet, assommée.

MirlewnaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant