5. Ce fut un plaisir de converser avec vous, mademoiselle.

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Je fermai soigneusement la porte de ma chambre, puis me dirigeai vers mon cabinet de toilette. Je ne manquai vraiment de rien. J'avais une bibliothèque pour mes livres, une grande chambre, et je m'occupais d'enfants adorables. Je ne regrettais rien.

Je m'aperçus que, comme si une domestique avait deviné mes intentions, plusieurs sauts d'eau chaude étaient déposés à côté du baquet. J'en vidai plusieurs dedans. Ensuite, je délaçai, avec quelques difficultés, mon corsage. Je le fis glisser au sol, puis fis subir le même sort à ma jupe, mes jupons, mes bas et souliers, mon corset. En chemise, je me plongeai enfin avec délices dans l'eau chaude. J'adorai prendre des bains, ce qui était le cas de peu de personnes. Tous étaient convaincus que l'eau propageait des maladies. Mais depuis le temps que je me lavais, jamais je n'avais été malade.

Je fermai les yeux, savourant ce silence. Mes journées étaient bruyantes, à cause de ces quatre adorables enfants, alors je profitais de chaque instant de calme. Que pouvait faire Athénaïs à cette heure-ci ? Depuis deux semaines, elle n'était venue voir ses enfants qu'accompagnée du roi, qui lui venait parfois seul. Je savais bien que ma sœur n'avait aucun amour maternel. Cela m'attristait.

Soudain, j'entendis une voix m'appeler. Je reconnus aussitôt la voix du roi. Je sentis les battements de mon cœur s'accélérer. Que se passait-il ?! Je me redressai brusquement, sortant du bain en vitesse. Qu'arrivait-il aux enfants ?! Je manquai de glisser sur le parquet à cause de mes pieds mouillés. Sans prendre le temps de me sécher ni de me couvrir, je me précipitai vers la porte, que j'ouvris brutalement. Je heurtai un corps, et me rattrapai au chambranle pour ne pas tomber.

Je relevai le visage, et aperçus le roi. Il me fixait, ses prunelles grises amusées. J'étais en chemise, trempée. Ma bouche s'entrouvrit de honte. Je plongeai dans une profonde révérence, essayant de lui montrer le moins de mon corps possible. Sa voix grave me parvint :

« - Relevez-vous, mademoiselle. »

Les avertissements de mon frère me revinrent en mémoire. Je me redressai, mais gardai les yeux baissés. Je n'avais pas le courage de le regarder. Il s'excusa :

« - Pardonnez-moi, je ne pensais pas que... »

Du coin de l'œil, je le vis hausser un sourcil :

« - Que vous preniez des bains. Je voulais vous parler. A propos de mes enfants. »

J'acquiesçai silencieusement, la gorge nouée par la timidité. Il reprit, la voix amusée :

« - Allons-nous converser dans le couloir ? »

Je me sentis rougir. Je devais à présent être cramoisie. Je balbutiai :

« - Oh, non, nous... Enfin, je...

- Que diriez-vous d'aller dans le petit salon ? »

Je m'empressai de hocher la tête, puis demandai d'une voix ténue :

« - Puis-je prendre de quoi... De quoi me couvrir ?

- Bien sûr. Vous m'y retrouverez. »

Il se retourna, se dirigeant d'un pas majestueux vers le salon. Aussitôt, je me précipitai dans ma chambre, et en refermai brutalement la porte, les mains tremblantes. Que devait penser le souverain de moi ? J'étais tellement incapable de lui parler normalement !

Je ne devais pas le faire attendre. Je pris rapidement une robe d'intérieur, que je passai avant de la nouer, dissimulant mon corps du mieux que je le pouvais. Puis, je pris une grande inspiration, tendant de réfréner ma panique. Après tout... Nous allions juste parler de ses enfants. Je sortis de ma chambre après avoir chaussé mes mules. Je rejoignis le petit salon d'un pas angoissé, m'arrêtant sur le bas de la porte.

Deux sœurs pour un roi (Tome 1)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant