Lorsque je me réveillai, il n'y avait plus de traces ni de Werther, ni de Louis-Henri. Je me levai et descendis sans oublier le double de la clé de la chambre. Mon ventre criait famine, mais je l'ignorai et sortis de l'auberge respirer la brise matinale. Et maintenant ?, ne cessait de me glisser ma conscience depuis que nous étions à Paris. Et au fond, pourquoi avoir fuit la Lorraine en compagnie, qui plus est, de Louis-Henri et Bertille ? Plus j'y songeais, plus je me disais que tous ces efforts étaient, en fin de compte, bien inutiles. Il y avait au moins un point positif à cette aventure : j'avais pu faire la connaissance de Werther et Anne avait pu rejoindre sa Bretagne natale - du moins je l'espérais. Depuis notre séparation, non loin de Nancy, je ne pouvais m'empêcher d'être inquiète à son sujet. Bientôt, j'arrivai près d'une fontaine. Je m'assis sur le rebord, ne sachant que faire, car je n'avais pour le moment pas de travail, et que Louis-Henri s'était porté garant pour me trouver un poste de dame de compagnie. Je dépendais donc de lui, une fois encore. Cette fâcheuse tendance qu'avait mon demi-frère à prendre des décisions seul me concernant, et ce, depuis notre départ de Metz, m'agaçait très fortement. Pour qui se prenait-il après tout ? Mon père étant mort, et n'étant pas mariée ni fiancée, j'étais censé être indépendante. Louis-Henri n'avait aucunement le droit de me dire quoi faire et je comptais bien lui faire comprendre. Alors que j'étais perdue dans mes pensées, je remarquai soudain un luminosité moins forte. Levant les yeux, je vis que c'était en fait les ombrelles de deux femmes visiblement aisées. L'une était rousse et avait les yeux en amande bruns. Elle portait une robe de couleur taupe. L'autre avait les cheveux blonds, des yeux verts et portait une robe bleue. Elles me regardaient.
- Regarde la ! Un bon maintient, une peau de porcelaine... Elle est noble ou bien je ne m'appelles plus Elizabeth, murmura la rousse à son amie.
- Mieux tout d'abord s'en assurer, répondit la blonde.
Elles avaient un accent certain que je n'aurais su identifier, prononçant les "r" tels des "w".
- Euh...bonjour ?, dis-je, hésitante.
La rousse sourit.
- Bonjour, mademoiselle, dit-elle. Je suis Lady Elizabeth Pringsley et voici ma soeur Mary. Pourrais-je avoir l'honneur de connaitre votre nom.
- Oh.
Je me levai et fit une courte révérence, comme apprise à Kervillais.
- Je me nomme Cendrine de Tréville, répondis-je. Pardonnez ma curiosité, mais que me voulez-vous ?
L'anglaise, car son nom ne me laissait aucun doute, eut un petit rire.
- J'apprécie votre franchise, miss, dit-elle. Il se trouve que je cherche une demoiselle de compagnie, et comme votre visage et votre posture me plaisent, j'ai songé à vous le proposer.
J'écarquillai les yeux de surprise. C'était...surprenant. Depuis quand allait-on demander à de parfaits inconnus de travailler pour soi ? D'un autre côté, c'était l'occasion rêvée.
- Lady Pringsley, répondis-je enfin, je dois dire que je suis étonnée par votre proposition, mais je cherchais justement un travail et je ne peux décliner cette offre qui semble venir du ciel.
Lady Pringsley sourit.
- Je t'en prie, appelle moi Elizabeth. Où réside-tu, que l'on aille chercher tes effets ?
- Mes effets ?, répétai-je, surprise.
- Bien sûr, il est d'usage que les demoiselles de compagnie vivent avec leurs maitresses, m'expliqua Elizabeth.
- Oh, dis-je. Pour le moment, je vis dans l'auberge de la Tête d'Ore avec mon demi-frère, et je n'ai pas d'autres effets que la robe que j'ai sur le dos. En revanche, il est vrai que j'aimerais lui écrire un mot, lui précisant la raison de mon départ.
- Bien, alors allons-y sans plus attendre, s'exclama ma nouvelle maîtresse en frappant dans ses mains et en se dirigeant vers un fiacre.

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Cendrillon
Historical FictionIl était une fois... Car tout conte commence ainsi. Sauf que, on le sait très bien, la vie n'est pas un conte de fée. Encore moins la mienne. Je suis Cendrine De Tréville, mais tout le monde m'appelle Cendrillon, et voici mon histoire. La vraie.