Déversoir

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J'ai envie de pleurer. Je suis actuellement sur le lit de ma meilleure amie. Je suis restée en pyjama toute la journée à regarder des séries. En temps normal, ça fait du bien. Mais pas là. J'ai pas pris ma douche, je sens la transpiration et je suis pas foutu de bouger mon cul de ce lit. Mon dernier repas était une tasse de café au lait avec des céréales, à midi. Mais j'ai même pas faim.

Mes dents ont recommencées à faire des claquettes, c'est ce qu'on dit quand je fais une crise d'angoisse et que ma mâchoire se met à trembler.

J'envoie des sms à mon ex-petite amie qui m'a brisé le coeur uniquement parce que je suis nostalgique. Ca me rappelle comment j'étais avant. Avant toute cette merde.

Ca va faire 4 mois que j'ai vu aucun membre de ma famille. J'ai reçu aucun message. J'ai toujours envie de pleurer, la seule qui pourrait me consoler, c'est ma petite soeur. Elle me manque affreusement.

J'ai cet album photo, dont je sais pas quoi faire. Il y a trop de photos, trop de souvenirs. Tout ça contribue juste à me rendre plus triste.

J'essaie encore de me persuader que tout va bien. Mais ça ne marche pas. Je pisse dans un violon en me répétant que tout va bien. Tout devrait bien aller. Mais c'est moi. Je ne vais pas bien.

Je suis un boulet qui vit dans une famille d'adoption parce que la mienne en a rien à foutre de ma gueule. Et ça n'a presque rien à voir avec le fait que je sois trans. C'est juste qu'ils me détestent. Je suis un boulet pour les gens que j'aime. Un putain de boulet qu'est pas foutu de lever son cul de ce lit pour aller prendre une putain de douche. Un boulet qui se lève à midi, qui pue le rat mort, qui passe ses journées en pyjama sur Netflix. Un boulet à qui on doit apprendre à tenir une fourchette parce que même ça, il sait pas faire. Un boulet à qui on doit donner à manger (donc dépenser du fric). Un boulet dépendant de tout et de tout le monde, on dirait un gosse. Aucune logique. Aucune initiative. On doit lui dire de faire son lit, de mettre ses vêtements au sale, d'aller prendre sa douche et comment tenir une fourchette. Je suis un boulet qu'on aime, même quand il pue, parce qu'il est vraiment adopté.

Une eau de la douche avec laquelle je  chercherais sûrement à ressentir cette sensation de brûlure. C'est mon nouveau truc, les douches brûlantes. Ça laisse pas de traces. Personne peut m'enlever la douche des mains ou me surveiller. Je cherche juste à me rappeler que mon corps existe et que je suis pas qu'une âme brisée.

J'ai envie de me balancer moi-même aux ordures. Je vous jure, c'est un dégoût. Je suis là, renfermé sur moi-même alors que je devrais être joyeux et heureux parce que je suis en bonne santé, que j'ai encore des amies et un copain.

Mais en plus d'être un boulet brisé, je suis un boulet déprimé. Si on me proposait de quoi m'entailler la peau, franchement, je dirais pas non. J'ai déjà piqué un rasoir dans la salle de bain pour me mutiler, je peux pas leur faire le coup deux fois. Et puis un couteau ça fait trop mal. Parce que je suis un boulet déprimé, mais douillet, en plus de ça. Putain, c'est vraiment de la merde...

Et pis je réponds aux messages de mon ex comme un putain de petit chien. Mais comment je peux être encore à ses pieds après ce qu'elle m'a fait ? J'en sais foutrement rien...

Ma vie est actuellement à mon image : purement dégoutante. Je me dégoûte et je dois sûrement dégoûter les autres aussi. C'est peut-être pour ça que j'ai plus de famille. Peut-être qu'eux aussi sont en dégoût devant cette chose que je suis ? Ça serait pas étonnant. La conclusion, c'est que je suis une chose dégoûtante.

Désolé pour la violence de mes mots, c'est juste que parfois, ça fait du bien de s'exprimer.

MédusaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant