Culpabiliser d'être malade

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Culpabiliser d'être malade, c'est pas seulement culpabiliser d'avoir le nom de la maladie en tête. C'est aussi culpabiliser d'avoir fait et dit des choses sans avoir su que j'étais sous le contrôle de cette chose.

Aujourd'hui, je pense que ce sont les médicaments qui m'aident à ne pas être sous une emprise totale, même si mine de rien, j'en dépend encore beaucoup.

Je crois que sans les médicaments, toutes les personnes que je rencontrerais aujourd'hui pour la première fois ne m'auraient jamais reconnus.

Il faut dire que j'étais quelqu'un de bien différent, d'à peine vivant, à peine présent. Toujours traînant avec cet air fantomatique. Incapable de communiquer correctement, d'entendre et de comprendre ce qu'on me disait. Je crois que j'avais l'air d'avoir déjà un pied dans la tombe.

J'ai dit des choses horribles à des personnes que j'aimais. J'étais possédé par une violence inouïe, dans mes mots et dans mes gestes. Et même si je ne savais pas que Médusa était déjà là, je ne peux pas m'empêcher de penser que j'ai fait du mal à des personnes qui m'aimaient. J'y pense tous les jours. Et parfois je me demande si la présence de Médusa peut vraiment « excuser » tout ça. Je me demande si j'ai pas un coeur plus noir que ce que je crois et si je ne me cache pas derrière Médusa pour me protéger de moi-même. Je me demande si Médusa était vraiment tout le temps là, ou si parfois, quand même, j'agissais de mon plein gré. Je me demande comment les gens peuvent me pardonner et si un jour, moi aussi je serais capable de me pardonner.

Je me mets des tonnes de choses sur le dos, à tort ou à raison, mais ça me pèse. Je me dis que c'est à cause de moi si telle ou telle personne agit comme ça maintenant. Je me demande si j'ai été une mauvaise influence, si les gens continuent à souffrir de mes actions passées.

Parfois aussi, je culpabilise pour des trucs idiots. Je culpabilise de ne pas avoir mangé comme il aurait fallu. Je culpabilise d'avoir passé autant de temps à dormir. Je culpabilise que la moindre action quotidienne me coûte une énergie phénoménale. Je culpabilise que les gens viennent me voir à l'hôpital ou sachent que j'y suis. Je culpabilise de culpabiliser les autres. Je culpabilise de ne pas avoir assez d'attention pour lire un livre. Je culpabilise que faire ma toilette seul me demande autant d'efforts psychologiques. Je culpabilise du peu d'énergie que je possède.

Bref, je culpabilise d'être malade.

MédusaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant