18. Retours.

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Hmmm... Ah.... Aïe... Ma, ma tête me lance. La reprise de conscience est douloureuse. Lorsque j'ouvre les yeux, c'est d'abord flou. Puis tout devient plus net, pour ce qu'il y a à voir. Je tente de bouger, mais mes mains et mes pieds sont entravés. Je ne peux pas crier, un bâillon m'en empêche. C'est bien ma veine ! A croire que cela devient une habitude de me faire assommer. 

Plus de vingt années de ma vie ont été effacées de ma mémoire par un trou noir total, mais non, le destin semble bien décidé à combler ma vie de trous et de coups. D'ailleurs, je suis actuellement dans une pièce très sombre. Le peu que j'arrive à distinguer n'est seulement possible car la lumière extérieure pénètre par le pas de la porte. 

Au dehors, j'entends du remue-ménage. Bon sang, est-ce que quelqu'un va venir pour m'expliquer où je suis et tout ce que cela signifie ? Je prends soudainement conscience que je suis seul, Daniel n'est pas ici. Je ne me trouve donc pas prisonnier des cagoulés. Ce qui ne laisse qu'une seule option : Madder. 

La pièce est assez petite. Je peux sentir les battements de mon cœur au niveau du coup que j'ai reçu, cela en serait presque hypnotisant si la douleur ne se rappelait pas à moi à chaque pulsation... J'entends des pas s'approcher derrière la porte. La personne s'arrête devant la porte, j'aperçois l'ombre de chacun de ses pieds, un cliquetis s'active au niveau de la poignée, puis c'est la lumière.

Aveuglante. La silhouette devant moi est à contre-jour, ainsi je ne peux pas identifier clairement la personne qui se tient devant moi. C'est une vision presque biblique qui s'offre à moi. Mon cœur manque de s'arrêter lorsque la personne s'adresse à moi.

"T'as vraiment la peau dure, toi !"

Angelica !... Je n'en reviens pas, elle est en vie ! Mais... que fait-elle avec Madder ? Mes sens s'emmêlent : joie extrême, crainte, soulagement, peur... Tout mon être ne sait plus où donner de la tête. Elle me retire le bâillon de la bouche et  abrège mes souffrances intérieures.

"Je ne sais pas si tu es un génie, ou un taré, Raphaël !... Désolée pour ce qu'ils t'ont fait.

- Ce n'est rien... j'imagine. Où sommes-nous ?

- Oh, ça, je laisserais Gabriel tout t'expliquer. Me répond-elle.

- Gabriel ? 

- Raphaël, prépare-toi. Tu vas avoir un choc. Confesse-t-elle, l'inquiétude se devine dans sa voix.

- Est-ce vraiment possible de me choquer plus après tout ces trucs de dingues ? 

- Je crois bien que oui... Putain, ce que c'est bon de te revoir !"

Sur cette intervention, elle se met à genoux et me sert dans ses bras. Son étreinte me fait un bien fou ! Elle semble bien décidée à faire durer ce moment, j'en profite pour lâcher prise. Je ne peux retenir le trop plein d'émotions. Alors mes larmes coulent silencieusement et trouvent refuge sur son épaule. 

Tellement d'informations se télescopent dans ma tête : Angie est vivante, saine et sauve. Libre. Daniel doit également être présent. Nous ne sommes pas auprès de Madder sinon Angie ne serait pas en liberté. Elle a par ailleurs évoqué un "Gabriel" dont je n'avais pas encore entendu parler. Mais c'est alors que je me souviens de notre mission d'infiltration et des documents volés à Madder. 

Je suis coupé dans mes pensées quand Angie finit par se dégager. Elle me saisit la tête et me regarde droit dans les yeux. J'ai du mal à voir clairement ses traits à contre-jour, mais je distingue suffisamment pour reconnaître ce visage devenu si familier pour moi depuis mon éveil.

"Prépare-toi à passer un sale quart d'heure, Raph. Reprend-elle.

- Pou... pourquoi dis-tu ça ? 

- Gabriel est en colère après vous deux.

- Nous deux ? Tu veux dire, Daniel et moi ? 

- Vous... vous avez fait un sacré merdier chez le scientifique. Mais Raph, mets ta fierté de côté et laisse-le exprimer sa rage. 

- Mais, je ne comprends pas ! 

- Je... je suis désolée, je ne suis pas douée pour ces trucs-là. Je veux juste que tu ne sois pas surpris, et que tu ne le prennes pas personnellement, c'est tout. Je dois te laisser, Gabriel ne va plus tarder à arriver. Bon courage, Raphaël.

- Merci, je suppose ?"

Cette seconde intervention d'Angie me laisse perplexe et les questions se bousculent : qui est ce Gabriel ? Qu'a-t-il de si particulier ? Et surtout, pourquoi serait-il en colère contre moi ? ET Dan ? Je ne tarderai pas à avoir la réponse, de toute façon. Je repense machinalement aux dernières minutes dans le repère de Madder, et tout à coup, la réalité me frappe : ce groupe d'individus était là pour une raison précise. Peut-être avons-nous compromis leur plan ? 

Angie a laissé la porte ouverte, je suis aveuglé par la lumière. Ma tête me fait toujours un mal de chien. Mes yeux font le point, et petit à petit, je distingue l'image qui s'offre à moi. J'aperçois une maison, en face, et une sorte de chemin en terre battue. J'en profite pour scruter l'intérieur de la pièce où je me trouve : on dirait une sorte de grange, ou une remise à outils. Il y a d'ailleurs plusieurs ustensiles : fourche, balais, boîtes que j'imagine pleines de clés et autres tournevis. 

Je tente de me redresser mais le coup que j'ai reçu lorsque j'ai été assommé devait être trop violent, ainsi je dois rester au sol. Je donnerais n'importe quoi pour un verre d'eau. Le lieu semble animé, mais étrangement, je ne vois personne passer devant l'endroit dans lequel je me trouve. 

C'est alors que le souvenir me revient ! J'avais l'un des deux sacs contenant les dossiers papier de Madder. Je scrute la pièce pour voir s'il est ici. Non... Bien sûr que non, c'est évident. Ils n'allaient pas laisser ça sans y jeter un coup d'œil. Je me demande si la clé se trouve toujours dans mon caleçon... Je me dandine tant bien que mal, et je sens qu'un objet me gêne.  Ouf ! Ils n'ont pas eu l'idée saugrenue de fouiller jusqu'ici. Je ne peux m'empêcher de pouffer de rire à l'idée d'avoir une clé USB dans mon caleçon. Trop occupé à m'assurer que la clé était là, je n'ai pas remarqué que quelqu'un venait d'arriver. 

"Faut qu'on cause, Chambers..."

Mon cœur manque de s'arrêter de battre lorsque j'entends mon nom de famille.

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