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    Le soleil perçait aux travers des fenêtres pour venir s'écraser sur mon visage. Celui-ci me réchauffait la peau pourtant refroidit par le vent hivernal. Il était 8h30, et aujourd'hui, je ne commençait qu'à 9 heures. Grasse matinée me diriez-vous ? En réalité, pas vraiment. Oui, car je devais toujours me lever pour m'occuper de mon frère, et j'avais aussi profité de ce moment pour ranger un peu la maison que j'avais délaissé depuis quelques jours. Le bus était presque vide ce matin, logique, la plupart des étudiants commençaient leurs cours à 8h. Les immeubles lointains de la ville se faisaient d'autant plus présent dans mon champs de vision que le trajet avançait. Malgré le fait que certains ne l'aimait pas, moi, j'aimais le bus. Étrangement, il me permettait de pouvoir m'évader aussi souvent que je le voulais de l'ambiance pesante de la maison, de pouvoir conserver un semblant de vie normale, et puis l'abonnement était la dernière chose que j'avais pu me payer sans travailler, la dernière chose qui représentait ma vie antérieure.

Mais il faut passer à autre chose, et aller de l'avant, me murmurait une voix. C'est d'ailleurs ce que je faisais en descendant du bus pour rejoindre le lycée. Il n'y avait que 2 minutes de marche de l'arrêt au lycée. 2 minutes qui me permettait de chasser tout ce qui pourrait me trahir. 2 minutes pour prendre définitivement possession de ce masque. 2 minutes pour reprendre possession de mon ancienne vie.

Les couloirs du lycée étaient vides, s'en était presque rassurant. Il restait 10 minutes avant que mon premier cours ne commence. 10 minutes pour aller vider mon sac dans mon casier. Il se tenait à présent devant moi, je l'ouvris. Du moins, ce n'était pas réellement le type de casier que l'on voit dans les films américains, non loin de là. Ici, ce n'était que de vulgaires cases qu'il fallait se dépêcher de réserver en y posant son cadenas. À la guerre comme à la guerre. Dedans, se trouvait quelques un de mes livres qui m'étaient attribués pour l'année, et puis il y avait aussi ce sac. Ce sac de sport que je n'avais jamais utilisé pour l'instant, ce sac que j'avais envoyé sur un coup de tête. Il ne me servait à rien, car les cours de sport avaient lieu l'après-midi, or durant cette partie de la journée, ma présence ne se faisait plus sentir dans ce lieu. À l'heure où certains couraient autour d'une piste se demandant quel en était, ou tandis que d'autres se montaient les uns sur les autres pour former des pyramides dont leur dos ignorait et ne comprenait l'intérêt, moi je partais travaillé. J'étais perdue entre monde étudiant et vie active, entre vie d'adulte et jeunesse, entre responsabilité et apprentissage. J'étais perdue entre deux mondes, deux mondes si différents, deux mondes qui ne me faisaient pas savoir où était ma vraie place. Derrière un balai et des factures ? Ou derrière un tableau et un flot de connaissances incompréhensibles ? Je ne savais pas, mais qui pouvait savoir ? Je n'étais pas la seule dans ce cas, pas la seule qui se retrouvait contrainte de travailler alors qu'elle n'était même pas sortie des bancs du lycée, et je me demandais si les gens comme moi savaient où était leur vraie place. Pas celle qu'ils ont été contraints de choisir, pas celle que le gouvernement à tenté de leur imposé en vue de leur âge, non leur vraie place. Moi, je ne savais pas, mais est-ce qu'un jour je l'ai vraiment sue ?

- Ana ?

Une voix me tira de cette tirade profondément intense et enfouie en moi. C'était Melody. Vraiment ?

- Melody !

- Je voudrais m'excuser pour la manière dont je me suis comportée la dernière fois...

- Non, t'inquiètes ce n'est rien... Lui fis-je.

En réalité, sa réaction m'avait profondément blessée. Mais, je ne voulais pas le montrer. Je ne voulais pas montrer le fait que les paroles d'une personne pouvaient m'atteindre, du moins je ne voulais pas montrer cela à la personne qui en était la cause. Ça serrait lui donner un moyen de m'atteindre, une faiblesse de plus dans les yeux d'autrui.

That's why I love you, again.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant