La Force Uniquement (En pause jusqu'à TROS)

18

Dans les dortoirs, les hommes étaient séparés des femmes par un grillage en plein centre de l'entrepôt. Des centaines de triples lits superposés recouvraient entièrement les lieux, tous entassés pour en compter le plus possible. Mais malgré cela, il n'y en avait pas assez pour tout le monde. Une bonne partie des travailleurs étaient allongés dans les allées ou sous les lits. Le chanceux bénéficiait de la générosité d'un autre, qui lui donnait un oreiller, pour se contenter du matelas. Certains même retiraient leurs draps contour pour le donner à un résident du parterre, qu'il n'attrape pas froid sur le sol en béton durant la nuit.

À croire que celui qui avait dessiné les dortoirs de cet endroit ne croyait même pas ses employeurs capables d'attraper autant de criminel.

Finn était allongé sur le côté, la tête appuyée contre son avant-bras et les yeux grands ouverts, alertes. De l'autre côté du grillage se trouvait Rose, dans la même position que lui. Leur nuit sans sommeil s'achevait bientôt, malgré l'étoile qui n'était pas près de se lever. Les nuits duraient 52 heures régulières sur la planète du Premier Ordre, mais qui s'en souciait ? Ils étaient enfermés dans des galeries de mine en tout temps.

Trois puissants coups de gong retentirent dans tout le dortoir. C'était le réveil matin, annonçant le moment de se lever pour aller travailler. Tous se mirent sur pied en synchronisation, mais la grâce n'allait pas plus loin. Il était presque impossible de se déplacer dans cette masse dense de personnes qui s'embarquaient les unes sur les autres.

Finn et Rose durent se séparer, mais la mécanicienne lui fit un sourire qui se voulait optimiste sous ses profonds cernes.

Les esclaves - car oui, les prisonniers retenus après le passage au tri devenaient des esclaves - se massèrent vers les portes de sortie. Les étroits corridors les forçaient à se placer en file indienne pour se rendre en salle commune afin de prendre leurs quinze minutes de déjeuner - si l'on pouvait appeler la bouillie infâme qu'on leur servait ainsi. En dehors de ce moment, ils n'avaient aucun répit pour s'assoir dans la journée entière. On leur donnait leur repas qu'ils devaient avaler tout en piochant les murs à la recherche des précieuses pierres noires.

Finn rejoint Rose, assise dans un coin de la salle. Elle appuya immédiatement sa tête contre son épaule quand il s'installa en tailleur.

- Tu crois que la Résistance nous cherche ? demanda-t-elle.

- Bien sûr. Ils ne sont rien sans nous, pas vrais ?

- Mais oui.

Les promesses d'un arracheur de dents semblaient plus crédibles à côté de cette remarque, mais il n'y avait rien de mieux à faire apparemment. Rose ne s'affolait pas facilement, mais mieux valait ne pas la mettre à l'épreuve plus que nécessaire.

Des stormtroopers surveillaient les lieux. De nouveaux modèles d'armures avaient vu le jour apparemment. Les jambes de même que les bras étaient maintenant noirs marqués d'une ligne rouge et du sigle du Premier Ordre, et les visières prenaient une forme concave qui donnaient un air agressif aux soldats.

Finn fut tiré de ses contemplations quand il remarqua un surveillant à l'autre bout de la salle qui l'observait fixement, son blaster bien haut contre sa poitrine. Celui-ci portait l'ancienne armure, la même que la sienne autrefois. Il se mit soudain à marcher vers lui d'un pas de plus en plus rapide, ce qui le rendit nerveux. Il se massa contre sa copine pour lui faire barrière de son corps.

Le stormtrooper s'arrêta droit devant lui et baissa la tête.

- FN-2187 ?

- Ce n'est pas mon nom.

Le soldat soupira sous son casque et décrocha de sa ceinture un petit appareil en forme de blaster, mais qui avait visiblement une autre utilité, qu'il pointa sur le visage de Finn. Il fut ébloui un instant, et cru qu'on venait de lui tirer entre les deux yeux.

- FN-2187 est bien votre nom selon les archives.

Apparemment, le lieutenant n'avait pas avalé son histoire de Finn Skywalker, et avait fait ses petites recherches.

- Je suis Finn. Il n'y a rien d'autre à savoir.

- Effectivement. Je suis FN-1864, tu te souviens ?

L'immatriculation disait vaguement quelque chose au jeune homme, mais il en avait tellement connu de son temps dans les cadets...

Le soldat cru comprendre ce que pensait Finn, puisqu'il se pencha pour retirer son casque. Aussitôt qu'il vit les traits allongés et les cheveux mi-longs châtains du jeune homme cascader, ses souvenirs lui revinrent.

- Teek ?

- Le premier de classe, devenu traître, qui fait son retour. Je ne t'aurais pas cru assez idiot pour faire autre chose que de te cacher le reste de ta vie pour la vivre paisible après avoir réussi à nous échapper.

- Écoute, je ne pouvais pas rester les bras croisés. J'ai été élevé pour la guerre. Je suis toujours un soldat, mais je ne me bats plus pour la même cause. Celle-ci vaut bien plus.

Cette affirmation n'était qu'en partie vraie, mais personne n'était obligé de le savoir.

Soudain, Finn fut éblouit par un éclat argenté et un tintement de métal qui s'amplifiait, toujours plus près. Il détourna les yeux de son interlocuteur pour scruter ses arrières, et il vit une revenante qu'il crut sortie de son imagination : son ennemie mortelle, détruite il y a longtemps.

Le capitaine Phasma.

Il en perdit la voix un moment. Elle ne semblait pas l'avoir remarqué baissé dans son coin - ou bien sa présence ne l'intéressait pas le moins du monde. Le jeune stormtrooper semblait étrangement nerveux tout à coup, et remit son casque.

- Tu parles, cracha-t-il. Je devrais te tuer. Tu es en partie responsable de nos malheurs.

- Vos malheurs ? s'incrusta Rose.

- Quels malheurs ?

Finn n'eut pas le temps de réagir qu'une main gantée s'abattit sur son visage. La gifle fut si violente que l'intérieur de sa joue se fendit contre ses molaires, et un gout sanguin se rependit sur sa langue. Le soldat tourna les talons pour retourner à son poste, mine de rien. Rose se leva, les nerfs à vif et prête à défendre son petit ami, mais celui-ci la retint d'un bras. Après une salve de protestation à mi-voix, elle obtempéra, comprenant que s'énerver ainsi ne ferait qu'empirer leur situation.

Le gong retentit de nouveau. Finn soupira. Quels étaient ces malheurs ? Les restrictions s'étaient surement renforcies depuis sa fugue, mais au point qu'on s'en rappelle trois ans plus tard ?

Il embrassa Rose sur le haut du crâne tout en retournant la discussion dans sa tête, puis suivit à son tour son groupe qui se rendait à la galerie 2. Du dynamitage était prévu ce jour-là. Heureusement, avec le boucan que cela causait, on n'arrivait même plus à penser.