Texte 2

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Thème : Sous les feux de la Lune


Je regardai à droite, à gauche. Personne. Je m'engageai sur le passage piéton et traversai la rue. Je devais marcher pendant une dizaine de minutes avant d'atteindre l'endroit tant attendu, le festival d'été.

Il avait lieu tous les ans au temple près de chez moi. Avec mes amis d'enfance nous avions convenu de toujours nous y réunir une fois le lycée passé. Dans différentes universités, il s'agissait de notre rassemblement annuel.

Je m'étais penchée sur des études de droit, grossière erreur d'ailleurs... Incapable de suivre les cours et de me concentrer lors des études d'arrêts, je n'en menais pas large en classe. J'avais cette impression d'apprendre une nouvelle langue et si j'avais choisi économie en seconde ce n'était pas par hasard.

Je traversai une deuxième rue. Les lampions rouges commençaient à se dessiner en haut d'une multitude de marches. Je voyais déjà le sommet du temple trôner au-dessus des pins malgré la nuit. En deux-trois mouvements, je me retrouvais au milieu des stands. Les enfants s'agitaient et les parents essayaient désespérément de les retenir pour qu'ils se tiennent à carreau.

Je reconnus les stands habituels, celui avec les pommes d'amour, celui avec les masques traditionnels et celui avec la pêche aux canards.

Les souvenirs des années passées refirent surface. Amie avec Iris et Castiel au jardin d'enfant, je me remémorais lorsque Castiel m'avait tiré les cheveux et que je m'étais cachée sous les jupons de ma mère. Depuis, cela avait bien changé. Je m'étais un peu éloignée de ces deux-là pour faire les quatre-cents coups avec Alexy et Armin. Néanmoins, nous étions tous restés un groupe soudé.

Je me rapprochais du lieu de rendez-vous lorsqu'une voix cria mon nom. Un sourire se dessina sur mon visage. Alexy était déjà là.

Il s'était jeté sur moi et j'oscillai difficilement sur mes deux pieds afin de ne pas tomber.

- Tu es lourd !

- Armin l'est plus que moi !

J'entendis le concerné s'énerver dans mon dos. Lorsqu'il arriva à ma hauteur, je remarquai qu'il était accompagné non seulement d'Iris mais aussi de Lysandre. Je les saluai tous les deux en supportant Alexy dont le poids n'avait pas faibli.

En quelques minutes nous étions tous rassemblés en-dessous d'un lampion. Un peu l'écart de la fête, nous étions assis soit sur un rocher soit sur l'herbe verte. Rosalya avait ramené un jeu de carte. La jeune femme y jouait avec Nathaniel, Dajan, Alexy et Lysandre tandis que Jade déballait les minis feux d'artifice.


Armin s'était installé à côté de moi tandis que Castiel s'était allongé sur le rocher.

Nous avions tous grandi. J'avais beaucoup de mal à l'accepter. Parfois, je me disais que j'aurais dû choisir la même filière qu'Alexy même si les matières enseignées ne me plaisaient pas. Je voulais seulement être avec eux tous, tous les jours, comme avant. Je redoutais déjà l'heure de partir.

J'aurais aimé resté sous la lumière de ce lampion pour l'éternité, coincée dans une bulle intemporelle. Je regrettais que Castiel et Lysandre ne fassent plus de musique. Je détestais qu'Armin soit parti étudier dans une ville à plus de cents kilomètres de notre village. Je rouspétais contre Rosalya qui avait cassé avec Leigh.

Je fulminais contre ma manie de râler. Un véritable cercle vicieux qui semblait bien m'aimer...

Armin sembla le remarquer car il s'assit dos à moi tout en me poussant. La tête entre les genoux, je ne réussissait pas à me relever.

- Hermine...

- Ah ah, tu n'en as pas marre de ce surnom ?

- Non, il me rappelle trop l'ancienne époque, souriai-je à ce souvenir.

 - On a grandi, hein.

- Je refuse.

Il rit. 

- Tu ne peux pas refuser quelque chose d'aussi naturel que de grandir, grommela Castiel à côté de nous.

- M'en fous ! répliquai-je dans le déni.

Armin se pencha davantage en arrière. Il avait de la chance, je n'étais pas raide comme un bout de bois. Soudain, il se releva et se positionna à ma droite. Il s'était allongé alors que Castiel était à ma gauche.

- Allonge-toi aussi, dit le jumeau.

Je lui obéis sans vraiment réfléchir. Mes amis dans un sens, allongés côte à côte, je me tenais dans l'autre sens, ma tête entre les leurs. Castiel râla. Juste en-dessous du lampion sa lumière m'aveuglait. Je mis mon poing devant mes yeux pour éviter de me griller la rétine. Je vis alors la lune derrière l'objet en papier. L'astre semblait avoir un coeur rouge flamboyant.

- Sous les feux de la lune, ça ne ferait pas un bon titre de film, s'amusa Armin.

- Je veux crever, riposta Castiel à qui l'ambiance ne convenait visiblement pas.

Je ris. Rien ne pourrait me faire oublier ses soirées et j'espérai du plus profond de ma poitrine qu'elles continueraient à avoir lieu. Je comptais bien me souvenir de mon enfance et de mon adolescence pendant plus de soixante-dix années.  


Un texte de Mireali ~

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