Texte 4

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Thème : Fait exploser le labo de chimie


Aucune réponse. Silence radio. Ma vie est brisée. J'ai offert mon cœur en offrant la plus belle chose au monde et je l'ai perdu. J'ai l'impression qu'on m'a tiré deux balles : la première a atteint la cible, la deuxième m'a enterré vivante. Mes lèvres rouges se sont teintes de rose : si la vie avait autrefois existé, désormais, elle n'y était plus. Je me suis fanée et j'ai oublié pourquoi je vivais réellement. Lâche, c'est ce que j'aurais aimé lui dire, mais mes doigts restent pourtant accrochés aux siens. Et je le supplie de ne pas m'abandonner. Fais-moi l'amour. Encore et encore. Ne m'oublie pas.

Ses doigts caressent mon visage, descendant le long de mon cou. Ça me rappelle la pluie, le contact délicat, les frissons qui me parcourent. Son silence le rend plus séduisant. Il ne parle plus, il rejette au fond de lui ce qu'il ne cesse de vouloir enterrer. Ses lèvres embrassent les miennes doucement, goûtant doucement l'interdit. Le monde bascule doucement et mon dos se dépose sur la surface froide d'un bureau du laboratoire de chimie. Mes cheveux forment les pétales d'une fleur et mes seins en font les feuilles. Mes bras s'accrochent à son dos alors qu'il soigne doucement de baisers mon cou. Ses baisers sont comme une douce caresse du vent, j'en frissonne d'un peu partout.

Mes mains s'accrochent à son dos alors que nos vêtements dépaysagent la pièce. Je n'ai plus l'impression d'être dans un local, mais d'être allongée dans ma chambre, chevauchant l'homme que je désirais autant. Seuls nos souffles traduisent ce qui se passe dans la pièce. Notre amour est secret, et même s'il y a voulu y mettre fin, il renaîtra toujours de ses cendres. Et pourtant, malgré le doux temps qu'il fît dehors, la noirceur revint. Ses yeux hélas autrefois doux il y a peu devinrent aussi froid. C'était la dernière fois. Il allait bloquer mon numéro : mon amour ne lui parviendrait plus jamais. Ses paroles firent exploser en moi la colère, mais aussi mon impuissance. J'étais sa fleur, me disait-il, et je le serai toujours, mais il ne pouvait pas s'occuper de moi. J'étais devenue envahissante, je l'entravais et je l'empêchais de respirer et de vivre sa vie normalement. J'étais devenue une pauvre bête désespérée qu'il désirait tout autant pour ce besoin de dépendance qu'il incarnait. Il se sentait puissant : il avait conquis le cœur d'une jeune fleur et il l'avait défloré. J'étais néanmoins un grand défi : jamais il n'eut envie autant de moi que de sa femme. Ce ne serait pas facile de me résister, déjà qu'il venait de flancher. Mais il ne recommencerait plus.

Je mords sa lèvre doucement, il sait qu'il est mien. Il est à moi, notre histoire était la plus belle chose qui lui était arrivé. Il était devenu plus fort grâce à moi, il se sentait plus puissant que le ciel et il ne cessait de me dire qu'il veillerait toujours sur moi, comme un soleil. Mets-moi une laisse, fais-moi tienne pour toujours. Il secoue la tête et son non détruit autour de moi les repères qu'il avait mis pour me guider comme un ouragan déchaîné. Alors qu'il profite d'un moment pour s'éclipser, disparaissant comme l'ombre de la bougie qu'on souffle, s'habillant à la hâte, je reste seule au milieu du labo. Je suis aveugle, je ne sais même plus qui je suis. Ce jour ne peut arriver aujourd'hui.

Je répète de ne pas m'abandonner. Je n'ai que lui. Il m'aime et je l'aime. C'est ce qui fait de tout ça notre secret à nous : et seulement à nous deux. Je me sens à nouveau vide et sans vie. Je me suis égarée quelque part je ne sais où et le silence est désormais ma nouvelle maison. Je ramasse mes vêtements un par un ne sachant pas trop comment les mettre. Qu'est-ce que ce morceau ? Je ne sais même plus ce qu'il a fait pour me déshabiller : je n'arrive pas à reproduire la délicatesse de son touché, de ses mains...

Mon cœur meurtri, mon âme rejetée et mon corps souillé par les vérités teintées de mensonges, je rampe vers l'armoire. S'il ne m'aime plus, autant ne plus m'aimer moi-même... pour ce que j'aimasse déjà peu de moi. Mes mains tremblent déjà un peu, mais je saisis des bouteilles. Je veux m'égarer à la mer. Je veux m'oublier. J'avale doucement le liquide dans la bouteille. J'ai des hauts le cœur, c'est pire que boire du jus de pruneaux. Mon corps tremble un peu, mon front devient moite, et je continue. Je passe à la suivante, puis à une autre. J'en perds les noms, le temps, la volonté. Mes mains tremblent un peu comme si c'était ma dernière volonté de vivre. Mais non, je n'ai plus de volonté à moins qu'il me dise qu'il m'aime à nouveau. À moins qu'il me supplie de rester avec lui, de continuer de l'aimer, de devenir sa femme et la mère de ses enfants. Mais si j'espérais qu'il revienne, il n'est jamais revenu.

Je rejoignis peu à peu le calme, disparaissant, faisant exploser le laboratoire de chimie de ma douleur et de ma tristesse et laissant derrière moi ces histoires sordides d'un chagrin d'amour.


Un texte de Marie (http://www.amoursucre.com/forum/t85211%2C1-charlotte-rosalya-france-québec.htm#p10504558)

Chrono ChallengeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant