Vingt-huitième chapitre

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Décembre 2172 - Age d'Octave - 31


Ainsi que Camile Haram le lui avait promis, l'administration d'Afrique autorisa à titre exceptionnel et pour une durée de vingt ans sa demande de prolongation de visa. Le message n'expliquait toutefois pas ce qui rendait sa demande exceptionnelle.

Octave reçut donc l'équivalent de vingt années d'espérance de vie oxydrienne, converties en Yuans. Une somme importante que, selon son accord avec Camille, il devait investir aux quatre-cinquièmes dans le groupe de l'héritier. Cela revenait à acheter une parcelle de désert et bien que cela ne l'enchante guère, il ne revint pas sur sa parole.

Avec les vingt pourcents qu'il lui restait, Octave disposait encore d'une manne suffisante pour imaginer s'offrir une petite propriété, dotée d'un lopin cultivable. Il ne ferait pas fortune, mais bien géré, cela pouvait assurer son quotidien.

En vue de son acquisition, il se rendit un matin dans une agence ImmoRamb, l'intermédiaire inévitable de la région.

La femme qui le reçut l'invita à la suivre dans une bulle de discrétion. Quatre sièges y entouraient une boite cubique noire qui faisait office de table basse.

― Quel plaisir de rencontrer un oxydrien ! fit elle tout sourire. On en croise très peu par ici. Dites-moi tout, monsieur Banks. Quel type de terrain cherchez-vous ?

Ayant appris l'importance de la séduction dans les affaires capitalistes, il lui sourit en retour, et exagéra son accent qu'il savait charmant.

― Je cherche une villa agricole, dit-il en arabe, tout ce qu'il y a de plus simple. Idéalement située dans le secteur du Maroc...

― Quel est votre budget ?

Tout en posant la question, elle posa la main avec délicatesse sur le dessus du cube noir et des centaines de petits hologrammes en jaillirent. Chacun modélisait une propriété nue de toute habitation, ainsi que ses alentours. En général, une villa était imprimée sur mesure, offerte pour l'achat d'un terrain nu. A la revente, la maison était recyclée de sorte que le futur acheteur puisse à son tour la personnaliser.

― Disons un million de Yuans, annonça Octave non sans fierté.

Elle le regarda tendrement. Il croyait l'impressionner, mais ses clients habituels possédaient bien davantage. La plupart des hologrammes disparurent, trop chers pour lui. Ceux qui restaient s'agrandirent pour occuper le même espace.

― Avez-vous passé certains des Test Psychologiques ? Cela m'aiderait à déterminer ce qui vous conviendrait le mieux.

― Pas en Orient, non. J'ai fait le Grunen-Thick...

Sans répondre, la vendeuse pianota quelque chose dans l'air, tout en lui posant d'autres questions. L'ordinateur peaufinait la recherche du terrain adéquat, éliminant quelques hologrammes à chaque réponse.

Au milieu du flot des critères, la vendeuse buta imperceptiblement sur l'une d'elles.

― Monsieur Banks... Vous avez un parent en Afrique ?

― Non, pour...

Il réalisa en un éclair ce pourquoi elle avait buté.

― Peut-être faites-vous allusion à mon père, Rodrigo Banks ?

― Ha ! C'est bien ce que je pensais !

Octave ressentit soudain une indescriptible émotion, comme une vive mélancolie, tandis que remontaient aussitôt en lui les souvenirs de son enfance. Depuis combien de temps avait-il cessé de se demander ce qu'était devenu son père ?

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