Chapitre 3 - Félix

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Quelques jours après notre discussion au café, je prends un bus pour me rendre dans un quartier au sud de Séoul. Ma grand-mère a insisté pour m'accompagner à la première consultation chez le psychologue, mais cet après-midi est en principe consacré à son bingo hebdomadaire.

Un peu plus tôt en descendant l'escalier, je l'ai surprise parlant à la photo de mon grand-père posée dans l'entrée. Je n'ai réussi à capter que quelques mots : " Tu vois, Tony, le petit, il ..." À mon approche, elle s'est empressée d'attraper un napperon sur le guéridon et de faire comme si elle était en train de l'épousseter avec ce chiffon improvisé.

- Tu veux du thé, Félix ?

Dans quelques mois, elle fêtera des quatre-vingts ans. Les épaules plus voûtées que d'habitude, elle a disparu dans la cuisine, laissant dans son sillage des effluves d'eau de Cologne, tandis que j'ai remis le délicat napperon brisé à sa place, perdu dans la contemplation du cliché qui représente mon grand-père.

Le bus quitte Hongdae, s'éloignant peu à peu du gros des étudiants qui apparaissent et disparaissent au détour des ruelles. Certains braillent de grands "salut" à d'autres, agitent leurs mains ou utilisent la sonnette de leur bicyclette. J'ai l'impression d'être le spectateur d'un monde à part, et d'être trop "étranger" à cette ville pour pouvoir les appréhender.

Ils filent, les jours rouges, vers leurs universités respectives. Ceux qui marchent sur les trottoirs tiennent leur livres et leurs notes sous le bras. En regardant à travers la vitre, je me prends à rêver d'être à leur place.

Me fiant aux indications de ma grand-mère, je descends à l'arrêt "Medical Centre", le bien nommé. Jongno-Gu, le quartier où je me trouve, est fidèle à mes souvenirs de vacances, un quartier bien plus banal qu'Hongdae.

Quelques pas me suffisent pour atteindre un immeuble de plusieurs étages aux vitres fumées qui reflètent le paysage extérieur et le ciel bleu traversé de nuages blancs.
Je me force à entrer, épuisé déjà. Avoir dû me préparer et m'organiser pour sortir et être à l'heure à ce rendez-vous m'a demandé une énergie folle.

Dans le hall d'entrée de l'immeuble, un panneau doré parmi d'autres m'indique que je trouverai M. Choi au cinquième. Alors que j'hésite à appuyer, l'ascenseur s'ouvre sur une femme et un bébé. Je les laisse sortir en maintenant les portes ouvertes pour permettre à la poussette de passer. La jeune mère me remercie d'un sourire, avant de s'éloigner.

C'est le moment tu ne dois pas te défiler.

Une fois dans la cabine, j'ignore toujours ce que je vais dire, ni même si je parviendrai à aligner trois mots.

Cinquième étage ...

Dès que je sors de l'ascenseur, mes lèvres de mettent à trembler malgré moi et j'ai du mal à prononcer mon nom lorsque j'arrive au comptoir de l'accueil. La secrétaire me demande pour quel thérapeute je viens, le Dr Kim ou M.Choi. Comme j'opine du chef à l'évocation du second, elle m'adresse un regard indulgent en l'invitant à patienter. Elle semble en avoir vu d'autres.

Sur le siège voisin, un patient d'une cinquantaine d'années se lève et pousse la fenêtre, juste derrière moi. Un air frais s'infiltre par l'embâillement, balaye ma nuque moite où se comment de petits cheveux dû au stress.

Bientôt c'est l'heure fatidique, et je ne quitte plus des yeux la porte laquée rouge où est accroché un écriteau noir et blanc au nom de M. Choi, psychologue-psychothérapeute, diplômé de l'université Hanguk.

Lorsqu'elle s'ouvre, et que j'entends deux hommes se donner rendez-vous la semaine prochaine, je comprends que je suis en train de perdre la bataille : je la sens arriver, une crise. Je ne peux déjà plus respirer. Une boule dure et boueuse enfle dans ma poitrine.

Mon sweat à la main, je rejoins l'ascenseur aussi vite que je le peux. Mon pouls martèle douloureusement mes tempes, et je prends à peine garde au jeune homme qui se trouve déjà dans la cabine. Je ne pense qu'a sortir d'ici, rentrer avaler un cachet et dormir.

Mais soudain, dans une secousse brutale, l'ascenseur s'arrête quelque part entre le quatrième et le troisième étage.

CHAPITRE TROIS TERMINÉ - 692 MOTS
J'espère que ce troisième chapitre vous aura plu, on avance doucement vers la rencontre de Changlix ne vous inquiétez pas! Donnez moi vos avis et n'hésitez pas à liker et partager si vous voulez venir me parler n'hésitez surtout pas à m'envoyer un message privé sur mon compte instagram : jeanne_dounia, c'est avec joie et reconnaissance que je vous répondrai ! 💜

Pierre, Feuille, Ciseaux - ChanglixOù les histoires vivent. Découvrez maintenant