Chapitre 20 - Changbin

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Quand Changbin aperçoit Félix en si mauvaise posture, il ne prend pas le temps de réfléchir. De quel droit est-ce que ce mec se permet de promener sa bouche sur lui ? Une fureur indescriptible s'empare de Changbin, une déferlante qui le transporte vers une colère d'une intensité inconnue. Il déboule sur le pont en brandissant son casque de moto. Les types sont plus costauds que lui, mais ça lui est complètement égal ! Il a assez de haine pour se battre contre une armée de solides gaillards.

Félix lève les yeux et, alors que ça lui semblait impossible, sa haine monte encore d'un cran. Il pleure ! Ça lui donne des envies de meurtre. Ce n'est pas de la frime : oui, à cette seconde, il se sent vraiment capable de tuer.

— Espèces de salauds, laissez-le tranquille !

Le faux blond se met à beugler :

— Eh, mais c'est quoi ton problème ? On s'amuse, pas de quoi en faire toute une histoire !

— Tu ôtes tout de suite tes sales pattes de mon petit ami, ou je te fracasse le crâne !

— Tu te prends pour qui, le nain de jardin ?

Sans leur donner le temps de réagir, Changbin se met à frapper, une première fois puis des dizaines. Il se laisse guider par la rage, qui déverse un flot puissant d'adrénaline dans ses veines. Il reçoit quelques coups, les sent à peine. Dès que l'un des agresseurs revient à l'assaut, Changbin réagit au quart de tour, ses réflexes décuplés. Il connaît les points les plus fragiles d'un visage : le nez et les dents. D'un bras il repousse le faux blond, de l'autre il met son complice à terre. C'est comme un ballet bien orchestré, il faut juste garder le rythme. Et surtout, surtout, la rage au ventre. L'un des deux, qui vient de se relever péniblement en s'agrippant à la rambarde, attrape le bras de l'autre en criant :

— Viens, on fout le camp !

Hésitant, le faux blond essuie ses lèvres en sang du revers de la main. Durant un moment, Changbin et lui se défient du regard, leurs poitrines se soulevant par à-coups. Mais il finit par partir. Le message est clair : ce n'est pas terminé. Un jour ou l'autre, Changbin devra s'attendre à des représailles. Mais, pour l'heure, il a d'autres chats à fouetter. Sécher les larmes de Félix. Il le regarde, les yeux brillants. Encore trop énervé pour pouvoir parler, il lui fait signe de le suivre de l'autre côté du pont, vers un sous-bois où les deux mecs ne les retrouveront pas.

— À qui ai-je l'honneur ? demande Félix, une fois qu'ils se sont suffisamment éloignés. Lui se trouve dans un tel état qu'il ne comprend pas tout de suite que Félix cherche juste à détendre l'atmosphère. Même si il tremble encore comme une feuille, quelque chose dans son regard a changé. Il n'a plus cet air de bête traquée qui l'a rendu fou de colère contre ses agresseurs.

Félix le dévisage avec attention. En se forçant à inspirer profondément, Changbin parvient enfin à desserrer les mâchoires, demeurées contractées tout le temps de la bagarre. C'est terminé, les deux types sont partis, et il est seul avec lui. En tête à tête. Alors, s'il n'en profite pas, il sera le roi des cons.

— Oh, vous savez, ce garçon que vous bouffez des yeux chaque fois que vous le croisez.

Le plus jeune hausse les épaules, lève les yeux au ciel, avec une expression que Changbin a appris à connaître et qui intérieurement le fait crever de rire.

— Quelle prétention ! Comment est-ce que tu as su que j'étais ici ? Félix le considère soudain comme si il n'arrivait pas à croire qu'il soit réellement là.

— J'ai aperçu un vieux sweat moche qui s'enfuyait des gradins. Une lueur furieuse passe dans ses yeux noir.

— De quel droit est-ce que tu donnes ton avis sur mes vêtements ? Est-ce que je me permets de juger ton look de punk, moi ? Il ne changera jamais ! Il vient d'échapper à une agression, et il trouve encore le moyen de le rembarrer. Avec ça, il n'a même pas droit à un merci !

Pierre, Feuille, Ciseaux - ChanglixOù les histoires vivent. Découvrez maintenant