Chapitre 6 - partie 2

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Le trajet jusqu'à la bouche de métro se fait en silence. Aucun de nous deux ne parle. De toute façon, qu'est-ce que nous aurions bien pu nous dire ? Je me laisse guider par Robin dans ce labyrinthe qu'est Paris.

Toutes les rues se ressemblent : de grands immeubles plus ou moins délabrés, une route principale remplie de voitures klaxonnantes, beaucoup de piétons pressés.

On est loin du cliché parisien selon lequel la tour Eiffel est visible à chaque coin de vue et où un air romantique plane dans l'air à chaque instant. Ce qui planerait à ce moment serait plutôt une merveilleuse odeur de pollution...

Pendant les dix minutes de marche jusqu'à la bouche de métro, je suis restée légèrement en retrait, suivant Robin comme un petit chien qui suit son maître. A part les deux ou trois fois où il s'est retourné pour vérifier si j'étais bien derrière lui, il ne m'a adressé ni la parole ni un regard.

Je me demande si je dois m'en réjouir ou m'en lamenter. Marcher en présence de quelqu'un dans un silence totale est malaisant et j'ai la sensation qu'il faut que je comble ce vide. D'un autre côté, j'ai bien peur de me faire insulter si j'ouvre la bouche.

Et puis ce silence me permet de repenser au déroulement de ma première journée de cours et à toutes mes rencontres. Ou plutôt, ma rencontre avec Robin. J'aimerais pouvoir affirmer l'inverse, que je pense à ma rencontre avec Fanny et Jane, mais mon cerveau est obsédé par ce gars étrange.

Je sais bien que quelque chose ne va pas avec lui. Il y a quelque chose dans son attitude. Tout d'abord, le fait qu'il me nomme "le chien". Après, le fait qu'il m'insulte à un moment et m'ignore à un autre. Et puis, ses yeux. Ses yeux bleu océan. Je ne sais pas ce qu'il se passe avec eux. A chaque fois que je les regarde, j'ai l'impression de m'y noyer. Est-ce qu'il est normal de se noyer dans les yeux d'un inconnu ? Je ne crois pas.

Et enfin, sa proposition de me raccompagner. Quand on déteste quelqu'un, on évite de passer de temps avec lui, non ? Alors pourquoi me l'a-t-il proposé ?

Et le plus bizarre dans tout ça, c'est que j'ai accepté. Ok, j'ai accepté parce que Jane m'y a poussé. Mais, étrangement, je ne regrette pas. Je pourrai avoir peur et me demander si Robin n'a pas de mauvaises intentions derrière la tête.

Mais non. Ma raison me dit de me méfier, mais mon cœur me dit que je peux le suivre. Suis ton cœur, suis ton instinct. Ils te mèneront toujours dans le droit chemin. Ce dicton, mon grand-père me l'a si souvent répété...

Il est un peu plus de dix-sept heures et la station de métro est bondée. Nous nous engouffrons dans la foule.

— Surtout, ne me perds pas de vue, m'ordonne Robin en se retournant vers moi un quart de seconde.

Waw ! Mais ma parole, c'était presque gentil ! Il se soucie de moi ou je rêve ? Mais comme pour répondre à ma question mentale, Robin se retourne une seconde fois et me regarde durement.

— Et surtout, prends tes repères. Je ne vais pas te ramener tous les jours.

Je me ratatine. Robin ? Une parole gentille ? Je peux toujours rêver. Il ne pense qu'à lui. Nous continuons notre route parmi tous ces gens. Tout le monde a l'air pressé.

Dans ma campagne, les habitants étaient détendus car la plupart étaient des paysans, ou des retraités. Dans la petite ville où se trouvait mon ancien lycée, chacun allait à son rythme, saluait ses voisins et laissait une petite mamie traverser la route tranquillement.

Quand certains ados faisaient du bruit et se bousculaient, il y avait toujours des petits vieux qui levaient les yeux au ciel en ronchonnant à leur voisin Ah ! Ces jeunes !, mais rien de bien méchant. Ici, les citadins de tous âges sont hâtés par leur boulot ou par leur envie de rentrer chez eux.

DIVISÉS - Transformation [en pause]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant