Je décide de rejoindre le jeune Louis, plus amène, son jeune visage respirant l'honnêteté.
— Bonsoir Elisabeth, je suis bienheureux de vous voir ici. Avez-vous apprécié le jeu ?
Je retrouve le sourire.
— De même, et oui, j'ai trouvé la musique surtout, d'un accompagnement parfait, me réjouis-je.
— Oh oui, vous êtes musicienne, vous devez avoir l'oreille pour ces choses, confirme-t-il.
— Je l'ignore, mais c'est bien aimable.
Je suis si anxieuse lorsque je saisis que le maître virtuose de la musique est en pleine conversation avec le Roi, juste à côté.
Soudain, je me fige complètement. Ils ont tous deux cessé de parler et leur attention semble se tourner vers nous. Je m'incline maladroitement.
— Bonsoir Mademoiselle. Vous avez apprécié la représentation ? demande Sa Majesté.
— C'était très beau, répond de suite son petit-fils.
— Tant de contrastes et de paradoxes..., poursuit-il.
Soutenant son regard, je murmure en me souvenant :
— « Les enchantements les plus doux sont les plus redoutables.. »
Oh oui, Sire, et ils sont véritables ; les sentiments amoureux sont une parfaite illustration de la complexité humaine.
Et la musique elle.. Elle m'est allée droit au cœur.
— N'est-ce pas ? Un vrai chef-d'œuvre, Monsieur, assure le souverain.
Le compositeur et musicien m'adresse un sourire engageant ; je désire lui conter toute l'admiration que j'ai pour lui et son œuvre, mais je reste comme paralysée.
— C'est un honneur, Sire. Honoré de ce que mes humbles talents puissent satisfaire Sa Majesté, si grande.
Il lui répond d'un léger signe de la tête, puis s'adressant à moi, bien aimablement :
— Mademoiselle de Lisière, passez une très bonne soirée.
Il prend congé, je m'incline.
— Je crois que mon grand-père ne déprécie pas votre présence, me murmure le jeune prince. J'en suis bien aise, car je compte vous voir régulièrement.
— Ahah, moi aussi Louis. Vous avez donc pu rendre votre rapport sur l'Histoire de France ?
— Oui, mon maître Fénelon était tout aussi étonné que moi que je sus retenir autant de choses ! C'est à vous que je le dois.
J'en suis bien contente.
Nous parlons encore un peu, puis je tente de rejoindre les portes de sortie, il y a tant et tant de monde, même dehors.
J'ignore si je reverrai Jérôme.
La nuit est désormais tout à fait tombée, le ciel est dégagé, et les étoiles brillent.
Soudain, je pense le reconnaître dans toute cette profusion de brocarts, de chapeaux larges plumés, et de robes à jupons brodées.
Je crois que lui aussi, je m'aventure dans les jardins qui entourent le Palais, il m'y rejoint assez tôt.
— Nous nous sommes perdus pour nous retrouver, c'est ce qui importe, murmuré-je avec un sourire particulier qu'il ne pourra distinguer. La soirée était tout de même bien agréable, je vous remercie.
— Nous n'aurions pu tomber mieux concernant la qualité de l'opéra.
— Je suis bien d'accord. J'en étais si pénétrée..., dis-je encore émue.
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La comtesse de Lisière [EN PAUSE]
RomanceFin XVIIe siècle (1680-90) Fille de comte, Élisabeth de Lisière est une harpiste de talent qui reste très affectée par la mort de son père, celui-ci laissant pour seul héritage de lourdes dettes. Attachée à l'espoir de retrouver son meilleur ami d'...