Chapitre 13

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L'heure est désormais avancée. Je rejoins le jeune Louis qui me propose gentiment de me raccompagner jusqu'à la sortie du château. Je lui admire toujours ses habits princiers.

J'ai accepté, nous voici dans les couloirs, à peine éclairés, à discuter :

— Sincèrement, vous étiez splendide.

Y repensant, mesurant l'ampleur de ce qu'il vient de se passer, moi, jouant pour les plus Grands, aux côtés de Monsieur Lully en personne.

Une soudaine euphorie s'empare de moi :

— Louis ! Imaginez-vous ! Je suis la harpiste de Sa Majesté ! J'étais insignifiante et aujourd'hui..!

— Amplement mérité ! assure-t-il avec enthousiasme.

— Vous êtes bien gentil. Je vous dois énormément.

— Nullement ! C'est vous qui avez toujours été d'une bienveillance extrême à mon égard.

Je lui souris, touchée.

— Je voulais vous proposer demain de m'accompagner à la bibliothèque du Roi. J'ai des traductions de textes antiques à faire... Et j'ai pensé à vous, me confie-t-il.

— Oh ! Évidemment, avec grand plaisir. Vous me faites un grand honneur.

— Merci. Je vous souhaite une bonne soirée. À demain, Élisabeth.

J'apprécie sa compagnie bien plus joviale et honnête que celle de Constance. Mon mal au cœur ne s'est point éteint.

Je m'efforce de m'endormir, mais cela m'est impossible ; mes pensées se confondent et se mêlent, me donnant la migraine, je revois sans cesse ces dames hypocrites, ou Louis-Alexandre, sans parler des propos de Constance. J'ai le sentiment de n'être qu'une arriviste.

Il était si évident que Jérôme disposait d'attachements, me suis-je imaginée être sa première compagnie féminine ?

Les larmes même me viennent.

Je ressens une profonde culpabilité, maudissant ma naïveté et mon innocence.

Je suis si exposée à la Cour, la proie facile, j'ignore où je vais.

Si Constance a deviné mon goût pour Jérôme, qu'en est-il des autres ?

Apparaît alors dans mon esprit les visages avenants de ma mère et de ma sœur. Il faut qu'elles apprennent mon succès musical !

J'imagine bien ma cadette en sauter de joie, venant dans mes bras, et me répétant que je suis la meilleure musicienne du siècle, de ce ton adorable d'enfant.

Ma mère serait certainement fière d'avoir eu ainsi confiance en moi. Elle m'a étonnée, dans un sens très appréciable.

J'espère qu'elles se portent bien, et ne se sentent pas trop seules. Je leur écrirai demain, et irai prier pour elles. Je les porte tant dans mon cœur.

Que me dirait ma mère, d'ailleurs ? Seulement que j'ai à garder la tête haute, et à continuer de suivre mes principes.

Ce que je vais essayer de faire.

Je pus ainsi dormir, les brûlants rayons du soleil me réveillant, j'ai la grande surprise de voir ma chambre envahie par de multiples boîtes, robes, et bijoux de toutes sortes.

Je sors du lit à la hâte, consternée.

— Bonjour Mademoiselle ! s'exclame Mélanie, toute excitée.

— Qu'est-ce que...

Entre alors des valets, qui continuent d'amener des présents :

— Mademoiselle, nous avons encore ceci, et enfin ce pli, nous informe-t-on.

La comtesse de Lisière [EN PAUSE]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant