Chapitre 22

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C'est une soirée d'appartement n'ayant rien de particulier, on joue des sommes exorbitantes aux jeux, on applaudit au billard, la musique enivre autant que les buffets de collation..

On me sollicite sans cesse, je n'ai pas un instant de répit, avec Jules nous tentons vainement de nous rejoindre depuis le début de la soirée.

Constance ne me quitte pas, et elle est ce soir particulièrement insupportable, l'alcool lui réussit mal.

Elle rit pour un rien, ce qui la rend apparemment attrayante pour ces messieurs.

Elle n'a jamais manqué de prétendants, pour quelles raisons s'attache-t-elle donc autant à mon meilleur ami ?

Quoiqu'il est vrai qu'il semble plus fréquentable que ceux-là, et qu'il est mieux fait.

Soudain, un homme devant dépasser l'âge du père de mon meilleur ami, vient à me proposer du champagne. À dire vrai je n'ai jamais eu l'occasion d'en goûter, je l'en remercie.

J'allais le porter à mes lèvres que, à cause d'un geste brusque, j'en échappe le contenu sur mon buste, stupéfaite.

— Jules ? m'étonné-je. Qu'est-ce qui te prend donc ?

— Oh, daignez pardonner ma très malheureuse maladresse. Monsieur, permettez, je raccompagne Mademoiselle.

Cet air faux ne lui ressemble pas, je reste profondément consternée pendant qu'il m'emmène hors des salons.

— Veux-tu bien m'expliquer ce comportement ? reprends-je.

Il poursuit sa marche à un rythme plutôt soutenu, tenant fermement ma main.

— Pardon Élie, j'ai été simplement malhabile. Je souhaitais te parler de mon idée pour me dévoiler auprès de Laure, que saisi par l'enthousiasme, je... Je l'ignore.

Je te trouve plutôt fatiguée, change-toi, et pars directement te coucher. Bonne nuit Élie.

Il s'apprêtait à me laisser de la sorte, sur le perron de ma porte, que je retiens son bras.

— Et donc, ne me parles-tu pas de ton idée pour Laure ?

Il se retourne et m'observe brièvement avant de sourire.

— Demain. Es-tu encore travaillée par la lettre de ta mère ? Je t'avoue que j'ose encore à peine le croire, j'ignorais que nos mères pouvaient se ressembler autant..

Penses-tu que cela concernerait l'intimité que nos familles se portent ?

— Tu crois ? À dire vrai, je ne veux plus y songer, j'ai suffisamment émis d'hypothèses, et elles aboutissaient toutes minablement à des larmes...

Mon meilleur ami se mord les lèvres, après avoir fait claquer sa langue ; il soupire. Puis soudainement, il m'amène contre lui. Je resserre notre étreinte.

— Tu as raison, n'y pense plus.

— Tu es le frère que je n'ai jamais eu, Jules, lui murmuré-je, un peu émue.

— Je sais pertinemment à combien je te suis indispensable, surtout à Versailles.

Lui et ses airs prétentieux, il contient un rire. Il se dégage de notre étreinte, et revêt étrangement un air plus sévère.

— Non, ma sœur à la vérité, pardonne-moi... Je suis incapable de te protéger de Louis-Alexandre, qui ne t'en veux que par ma faute, il fallut que je lui accordasse ma confiance... Je me déteste.

Il déglutit, le regard fuyant.

— Non point ! Je sais que tu es toujours de mon côté, que tu sais tout de moi, que lorsque des rumeurs courent à mon sujet, quelqu'un sait la vérité. Cela suffit. Allons, retournes-y. Tu as raison, je ferais mieux d'aller me coucher maintenant.

La comtesse de Lisière [EN PAUSE]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant