-Yuri a fait un malaise !C'est la phrase qui passe en boucle dans ma tête. Je m'en veux. Si j'étais resté avec lui peut être que j'aurais pu faire quelque chose. Si j'avais insisté pour qu'il avale au moins un truc lors des repas peut être que ça ne serait pas arrivé. Mais je n'ai rien fais. Je suis débile.
Je me mords les lèvres, assis par terre contre le lit où Yuri est allongé. Il s'est endormi après avoir repris connaissance, complètement affaibli.
Sa peau est blanche, translucide.
Ses traits sont tirés. Il paraît fatigué. Fatigué de de battre pour vivre, pour survivre. Je passe ma main sur la sienne en tremblant. Elle est glacée malgré les couvertures sous lesquelles on l'a emmitouflé. Le médecin est venu et il a dit que le seul vrai remède, se serait qu'il mange un peu.
Je me rassois et tente de me concentrer sur le livre que je suis entrain de lire ; Will et Will, par John Green. L'angoisse me tord les tripes. Je me sens totalement inutile. Ça me fais mal.Un frottement me fait sursauter. Yuri a ouvert ses yeux, verts et hypnotisants. Il me regarde et tente un espèce de sourire qui se voulait sûrement rassurant mais qui me rend triste. Mes yeux se posent sur une phrase de mon livre. Je me penche doucement vers lui et la lui lit à mi-voix, comme pour ne pas le brusquer.
« Pour vivre il faut tomber, atterir, se relever et recommencer de plus belle. Pour vivre il faut prendre le risque de voler sans ailes »
Ma gorge est sèche. Je voudrais lui poser tant de question, tout savoir sur lui, comment tout à commencé, comment il a cessé de vouloir manger. Et comment le sortir de tout ça.
-Depuis quand, est ce que tu es anorexi-
-Je ne suis pas ce que tu dis. Me coupe t-il.
-Yuri, regarde moi s'il te plaît.Je pose ma main sur son bras mais il a un brusque mouvement de recul. J'ai l'impression que quelque chose se brise à l'intérieur de moi. Ce simple geste vient de me blesser profondément. J'hésite à continuer à parler. Les mots ne veulent pas sortir. J'ai peur de tout gâcher entre nous.
J'ai peur que tout vole en éclat à la moindre parole.
-Est ce que...tu en a parlé à quelqu'un ? À Êto par exemple ?
-Non.Je jette un regard sur le plateau plein de nourriture posé au pied du lit et le tire vers nous.
-Mange un peu, je t'en supplie. Pourquoi tu te rends malade ?
-Je ne suis pas malade.
-Arrête de nier Yuri, tu vois bien que quelque chose ne va pas.
-Putain mais non je ne suis pas malade ! Arrête de me regarder comme un putain d'anorexique ! Merde ! J'en ai marre ! Je ne veux pas de ta pitié !Il repousse violemment son plateau. L'eau gicle sur les draps. Une colère sourde monte en moi. Je ne sais plus quoi faire. Je voudrais le raisonner mais je n'y arrive pas. Les mots sortent de ma bouche comme des lames de rasoir.
-Ok, si tu le prends comme ça, vaudrais mieux que je te regarde pas du tout ! C'est ça que tu veux hein ?
Je tourne les talons. Immédiatement je m'en veux. Je souffre de lui avoir crier dessus. J'ai l'impression que je ne suis plus rien à ses yeux, que je ne compte pas. J'ai mal. J'ai envie de pleurer. Je passe la porte quand un cri retentit. C'est Yuri.
-Non Néza ! Pardon je suis vraiment désolé !
Je fais demi tour en courant. La porte de la chambre s'ouvre et cogne violemment contre le mur. Une masse informe est cachée sous les draps et tremble. Je tire la couette. Yuri est en larmes, ses ongles sont plantés dans son visage et il repète des mots comme ;
«stupide, personne ne veux de toi, tu ne le mérite pas, tu me dégoûte»
Je ne réfléchis pas et le prend dans mes bras. J'ai peur. Il est secoué de tremblements. Ses larmes gouttent sur mon pull. Je lui caresse doucement le dos en essayant de le calmer. Je me déteste de l'avoir mis dans cet état si démuni. Je lui murmure à l'oreille pendant que mes larmes coulent à mon tour.
-Pardon Yuri, tout est de ma faute, excuse moi...
On reste un moment sans bouger blottis l'un contre l'autre sans rien dire. Le ton est apaisé.
Je le serre fort mais j'ai peur qu'il se brise en mille morceaux.
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Néza
Short StoryJe considère que ma vie est séparée en deux parties, la première avant l'annonce et la deuxième quand tout s'est écroulé. La première est synonyme d'enfance, d'innocence, de piano, de mon amitié avec Aloïs, de la boutique de disque et malheureusemen...