Après l'histoire avec Hana, je n'ai plus fait confiance à personne. J'étais beaucoup trop déçu, brisé. Je n'en pouvais plus, j'étais fatigué de vivre sur le qui-vive, d'angoisser tout les jours pour savoir si j'allais dormir au chaud, si je n'allais pas me faire voler ou d'autres choses comme ça. J'avais perdu le peu de mon moral qui me restait. Et toujours aucunes nouvelles des recherches sur Elijah.Je m'étais trouvé un coin qui me coupait un peu du froid, dans une rue, blotti dans mon carton. J'avais réussi à en trouver un assez grand sur lequel je pouvais me coucher sans problème. Je faisais la manche, parfois, quand je n'étais pas trop épuisé.
Et puis je buvais, un peu et je fumais, beaucoup.
Combien de temps s'était écoulé depuis mon départ du foyer ? Je n'en savais rien. Peut être 6 mois, peut être plus, peut être moins.
Et puis, ce matin là, c'était le jour de mes 18 ans. Mon avenir était sensé être plein de promesse, mais là, je ne savais même pas si je tiendrais un mois de plus. Ce matin là, il pleuvait. Une pluie battante, qui ne laisse rien percevoir. J'étais allongé sous un porche sale et détrempé. Avec ce temps, mendier ne servait strictement à rien. Pourtant, alors que je frissonnai dans mes habits trempés, une mamie s'est avancée vers moi.
-Jeune homme vous m'entendez ?
J'ouvre les yeux et la regarde. Je me redresse lentement en position assise. Je passe une main dans mes cheveux noirs. C'est une vieille dame aux cheveux gris et au joli chemisier rose et blanc.
-Vous allez bien ? Quel âge avez vous ?
-18 ans..Elle me regarde, attristée et se met à fouiller dans son portefeuille. Elle me tend deux gros billets de 20 €. Je manque de m'étouffer et les larmes me montent aux yeux.
-J-je ne peux pas accepter, c'est bien trop !
-Mais si, allez y, vous en avez plus besoin que moi !Je déglutis, la gentillesse de cette dame me va droit au coeur. Elle me tend alors la main.
-Puisque vous ne voulez pas accepter, laissez moi, au moins vous offrir quelque chose à boire et à manger ! Venez.
Je me met debout, ramasse mes affaires et la suis. Mon ventre vide me fait mal. On arrive dans un petit café et on s'installe vers le fond sur une banquette rouge. La chaleur s'infiltre doucement en moi. Je suis très mal à l'aise. Je n'ai rien à faire ici. Je garde la tête baissée. Mes mains tremblent et je peine à me tenir droit.
La dame commande un sandwich chaud et deux boissons. J'essaie de manger lentement pour savourer mais la faim est trop forte. Elle me regarde manger.
-Ça fait longtemps que tu vis dehors ?
-Je sais pas, peut être 6 mois, peut être moins.Elle soupire bruyamment. Une demie heure passe et je manque de m'endormir, les bras croisés sur la table en formica. Elle me tapote l'épaule.
-Je vais devoir y aller maintenant. Tu peux rester un peu, je me suis mise d'accord avec le serveur. Prends soin de toi jeune homme..
Après je somnole un peu. Je perds la notion du temps quand une main me secoue brusquement. Un serveur me regarde avec des yeux écarquillés. Il me chuchote ;
-Tu devrais partir, tout de suite. Le patron arrive bientôt.
Il a peine le temps de finir sa phrase que le fameux patron arrive. Il a l'air très en colère. Je prends peur.
-Qu'est ce que tu fais ici, voyou ! Sors tout de suite ! Tu fais fuir les clients !
Je saisi mon sac précipitament et cours vers la porte en me cognant violemment sur le rebord de la table. Le patron me hurle encore dessus. Les clients nous dévisagent. La honte me brûle les joues.
Je fuis. Je cours loin. Mes jambes tremblent encore. J'ai peur.
Je finis par m'écrouler sur un banc, à l'écart. Mon souffle est court et saccadé. Je fouille dans mon sac mais ma main rencontre une surface cartonnée. C'est une enveloppe blanche. Je l'ouvre délicatement. Elle contient un peu d'argent.
Les larmes menacent de couler sur mes joues creuses.
La vieille dame.. Je ne l'ai même pas remerciée..

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Néza
ContoJe considère que ma vie est séparée en deux parties, la première avant l'annonce et la deuxième quand tout s'est écroulé. La première est synonyme d'enfance, d'innocence, de piano, de mon amitié avec Aloïs, de la boutique de disque et malheureusemen...