Appartiens-moi

27 Promesse silencieuse

Après notre escapade alsacienne et un retour à son appartement mouvementé, Liam me laisse repartir avec difficulté. Nous savons qu’il va être impossible de se voir durant les deux prochaines semaines et cette coupure forcée ne nous enchante ni l’un ni l’autre.

- Tu vas me manquer ma noisette me dit-il en me serrant contre lui et en enfouissant son visage dans mon cou.

- Tu vas me manquer aussi mon artiste.

La paume de sa main vient envelopper ma joue et ses lèvres se posent sur les miennes. Il me serre contre lui et met toute sa tendresse, tout son amour et toute la passion qui nous caractérise dans ce baiser.

Avec difficulté,  la boule au ventre et la gorge serrée de savoir que je ne le verrai pas avant deux bonnes semaines,  je quitte Liam, monte dans ma voiture et prends la route de chez moi.

Sur le chemin du retour, je passe prendre Mila chez sa nounou et rentre à la maison pour retrouver mon rôle de mère et d’épouse.
Lorsqu’on arrive devant la maison, Mila me fait remarquer que la voiture de son père est déjà dans l’allée.  En passant la porte, c’est un Simon d’une humeur massacrante qui nous accueille

- Vous voilà enfin ! Vous étiez où ?

Interloquée par le ton mordant qu’il emploie je fronce les sourcils et demande à Mila d’aller ranger ses affaires d’école avant d’aller prendre son bain.

- Je viens d’aller chercher Mila chez Stéphanie.

- Et pourquoi aussi tard ?

Son agressivité commence sérieusement à m’énerver. Je n’ai aucune envie de me disputer avec lui après la journée que je viens de passer. Je veux conserver la joie et la bonne humeur que j’ai ressentie avec Liam tout au long de la journée.

- Il est 19h Simon, c’est l’heure à laquelle je la récupère tous les soirs ! je ne vois pas où est le problème !

- C’est un peu tard pour Mila, tu ne penses qu’à ton travail, tu pourrais te débrouiller pour aller la chercher plus tôt !

- Non mais attends, tu plaisantes là ! Tu étais là avant moi il me semble, pourquoi tu n’es pas passé chez Stéphanie si tu voulais que Mila rentre plus tôt ?!

- Laisses tomber ! Tu ne comprends jamais rien de toute façon.

- La seule chose que je comprends depuis des mois c’est que tous les moyens sont bons pour m’en mettre plein la tête. Mais tu sais quoi Simon ? Si vraiment je suis si nulle… eh bien je ne te retiens pas, prends tes affaires et cours trouver quelqu’un qui saura combler tes attentes !

Je lui désigne la porte d’un geste de la main pour lui signifier clairement que s’il le veut, il peut partir mais il ne bouge pas d’un cil. J’ai pris l’habitude de me taire pour éviter les conflits et les disputes mais ma patience atteint ses limites et mon exaspération ses sommets
Ayant une soudaine volonté de le mettre devant ses responsabilités j’ajoute :

- Alors ? Tu choisis quoi ? Une femme, grosse, inutile, et conne mais avec un compte en banque bien garni ou la liberté d’aller trouver la femme de tes rêves ?

- Je n’ai jamais dit que tu étais grosse inutile et conne arrête de te poser en  victime à chaque occasion !

- En effet, textuellement tu ne l’as jamais dit. Cependant tu l’as insinué tellement de fois de manière plus ou moins détournée qu’il ne faut pas avoir inventé l’eau chaude pour comprendre ! Même moi qui suis si conne je l’ai bien compris ! Maintenant tu m’excuseras mais je vais aller m’occuper de ma fille car comme tu l’as si bien souligné, il se fait tard pour une petite fille de son âge. Je te laisse faire le dîner, j’ai peur d’être trop limitée pour ça!

Je souffle profondément pour me calmer et prends le chemin de la salle de bain en appelant Mila pour lui faire prendre une douche.
Je suis en train de la déshabiller lorsqu’elle me prend dans ses bras et me dit

- Moi je te trouve pas grosse maman, tu es la plus belle et je t’aime

Je la serre contre moi et l’embrasse dans le cou

- Mou aussi je t’aime mon petit cœur. Qu’est-ce que tu dirais d’un bain de princesse avec plein de mousse rose ?

- Oh ouiiiii !

Je fais couler l’eau et verse du bain moussant ainsi qu’une boule effervescente qui va rendre l’eau et la mousse toute rose puis je plonge ma petite princesse dans l’eau avant d’entreprendre de me démaquiller à côté d’elle.

Des tas de questions trottent dans ma tête, je me demande comment en l’espace de deux heures à peine, j’ai pu passer du bonheur le plus total au stress le plus intense. Les papillons qui volent dans mon ventre lorsque je suis avec Liam finissent irrémédiablement dans ma gorge et semblent vouloir m’étouffer lorsque je suis face à Simon. Depuis la salle de bain, j’entends Simon qui bougonne et râle tout seul dans la cuisine et cela me fait penser à cet après-midi, lorsque depuis la chambre j’ai entendu Liam siffloter en allant nous chercher à boire. Les contrastes des deux hommes qui font partie de ma vie sont immenses. Pourtant, je suis incapable de laisser le sombre pour aller vers le plus clair, car ma fille, elle, aime son père et le cadre familial que notre vie à trois lui apporte.
Je la regarde jouer avec ses sirènes dans l’eau teintée de rose et me fais encore une fois la réflexion que son bonheur passe avant le mien, et qu’il vaut tous les sacrifices, même celui de renoncer aux nuances claires de mon artiste.