Chapitre 4 - 5 : Découvrir une alliée (Edward)

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Pendant que Roxane se préparait, je tuai le temps en explorant le contenu de son étagère pour me changer les idées.

Mis à part une pile réduite de vêtements, elle avait surtout des partitions, et je n'y connaissais pas grand-chose. Enfin, je savais plus ou moins lire la musique, ma mère m'avait appris le principe. A force de l'accompagner quand elle jouait de la musique et de tourner les pages de partition au bon moment, je pouvais reconnaître le rythme et l'écart des notes, mais jamais je n'avais su, comme elle, les nommer ou fredonner une mélodie en suivant des yeux les portées. C'était une des choses que j'avais trouvées impressionnantes à l'époque. Ces lignes tachetées lui semblaient aussi évidentes à lire que les cercles d'alchimie qui s'entrechoquaient dans mon esprit en permanence. Roxane, elle, devait avoir la tête remplie de musiques et de chants.

C'était sans doute plus agréable. Les murs n'isolaient pas grand-chose, et je l'entendais fredonner un air léger dans la pièce adjacente, accompagnée par le son des éclaboussures. Comment faisait-elle pour garder cette légèreté, alors qu'elle vivait dans cette ville, dans ce taudis, je n'en savais rien, et pour tout dire, j'étais presque jaloux face à sa bonne humeur.

Il n'y a pas si longtemps, j'arrivais encore à m'amuser, à trouver un peu de légèreté ici et là, mais depuis que j'avais mis les pieds dans le cinquième laboratoire, j'avais l'impression que plus jamais je ne saurais rire. Trop de choses m'étaient tombées dessus ce jour-là, des choses qui me dépassaient complètement. Les Homonculus, les choses qu'ils avaient dit ce jour-là, les prisonniers sur le point d'être sacrifiés, les quantités obscènes de pierre philosophale... Tout cela formait un magma terrifiant dont je n'arrivais pas à me souvenir clairement mais dont le simple souvenir m'oppressait. 

La gorge serrée, je reposai le livret de partitions et me repliai sur moi-même, prostré, les genoux contre la poitrine, serrant les dents, la tête fourrée au creux de mes bras. Mon frère me manquait terriblement, Winry aussi, et Hugues...il ne valait mieux ne même pas y penser. Gracia Hugues m'inquiétait,le souvenir d'Envy me terrifiait plus que je ne voulais me l'avouer. Lui qui avait eu plus d'une fois l'occasion de me massacrer, qui avait assez d'autorité sur lui pour l'empêcher de m'achever ? Qui avait assez de puissance pour lui imposer le respect ? Et pourquoi ne pas m'avoir tué ? Pour m'utiliser ? Dans quel but ? Je ne savais pas ce qui était le pire, entre le trou béant que laissait l'absence d'Al, lui qui avait toujours été près de moi d'aussi loin que je me souvienne, l'inquiétude que j'avais pour tout ceux qui étaient restés à Central-city, à portée demain de l'ennemi, et l'angoisse profonde que j'avais à l'idée de ce que j'aurais à affronter à l'avenir...

- Ça va ? questionna Roxane d'une voix douce, me faisant pourtant sursauter.

Je levai les yeux vers elle en tâchant de composer une expression anodine, et rougis immédiatement en découvrant qu'elle s'était penchée vers moi simplement enveloppée dans sa serviette de bain.

- Ça va, mentis-je, d'un ton un peu grognon. Juste la fatigue.

La réponse sembla lui convenir, en tout cas, elle se dirigea vers son étagère pour y prendre des vêtements propres. Quand je compris qu'elle allait se changer dans la pièce, je tournai précipitamment la tête vers le mur. Était-ce possible d'être à se point impudique ?

- Si tu veux rester dormir ici, je te prête un double des clés.

- ... Tu prêtes souvent des doubles de clés aux inconnus ? C'est un peu désinvolte de me proposer, ça tu trouves pas ?

Déjà que tu te ballades à poil dans la même pièce que moi, achevai-je en pensée.

- Très rarement. Mais bon, il n'y a pas grand-chose d'intéressant à voler ici, et puis, tu as une bonne aura.

- Hein ? lâchai-je en me tournant vers elle.

- C'est gravé sur ton front que tu es quelqu'un d'honnête, traduit-elle avec un sourire tout en boutonnant sa robe.

- Ah, vraiment ? commentai-je d'un ton un peu sarcastique.

Si elle savait à quel point je passe ma vie à mentir ces derniers temps !

- Allez, tiens, m'apostropha-t-elle en me jetant un trousseau de clés. Fais comme chez toi, si tu veux dormir ou prendre une douche... Il faut que tu sois en forme si tu veux séduire les militaires.

- Je ne veux pas séduire les militaires. Je veux me faire passer pour une crapule.

J'avais machinalement attrapé les clés au vol et la regardais prendre son sac pour partir.

- Peu importe comment tu t'y prends, tant que ça marche. Je compte sur toi pour m'aider à retrouver Cindy, rappela-t-elle en me montrant du doigt, les sourcils froncés par une expression résolue.

- C'est toi qui va m'aider, plutôt !

- Ne me sous-estime pas, nabot !

- EH !

Je lâchai une de ces bordée de jurons dont j'avais le secret, mais elle avait déjà refermé la porte avec un éclat de rire, qui s'éloigna sans scrupules dans le couloir en même temps que le claquement de ses talons. Je me calmai, faute de public, et me laissai tomber sur son lit qui me fit rebondir avec un grincement de ressors. Je restai allongé là, poussant un soupir. Un moment de solitude. Je me sentais poisseux, la poitrine écrasée sous mes bandages qui commençaient vraiment à se défaire ou à roulotter, me sciant la peau par endroits. A coup sûr, prendre une douche me ferait du bien. 

J'espérais vaguement qu'il n'y aurait pas de miroir dans sa salle de bain, voir mon reflet me mettait toujours mal à l'aise... Je me mordillai les lèvres, tandis que les personnes que j'avais côtoyé pendant mon séjour à l'hôpital me revenaient dans un flash. Je devais les protéger. Tous ceux que j'aimais, tous ceux qui m'avaient aidé, je devais les protéger. Et pour cela, il fallait d'abord que je m'acquitte de cette mission.

- Allez, m'encourageai-je à voix haute en me rasseyant sur le lit grâce à mon élan. C'est le travail qu'on ne commence pas qui est le plus long à finir !

Cette journée promettait d'être très remplie...

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Hop-là, un petit chapitre supplémentaire, qui évoque un peu les événements passés et les préoccupations de notre petit alchimiste (Comment ça, je vais me faire frapper ? Mais non, mais non ! XD) J'espère que cette partie vous aura plu et je vous dit à lundi pour la suite ! ;) 


Bras de fer, Gant de velours - Première partie : LacostaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant