Chapitre 7 - 1 : L'innocence perdue (Winry)

263 25 7
                                    


- Tu crois que ça ira, pour Gracia ? demanda Alphonse en regardant le paysage défiler à travers les vitres du train.

- Je pense... Tu sais, elle est très forte. Et puis... Elysia lui donne une raison d'avancer.

Je le savais de source sûre, puisqu'elle me l'avait dit de vive voix, la veille du départ. J'avais longuement lanterné avant que l'on se décide à partir, partagée entre la peur de la gêner et la honte de l'abandonner. L'avoir côtoyée dans ces moments difficiles avait créé entre nous un lien d'une force étonnante. Je sentais que je n'irais plus à Central City sans venir la voir... et dans les jours à venir, j'allais souvent penser à elle.

Malgré tout, nous avions fini par quitter la demeure des Hugues, pour plein de raisons. J'étais partie en catastrophe de Resembool, laissant en plan Pinako avec des chantiers d'automails en cours, mais son dos la faisait souffrir et l'empêchait de travailler aussi vite qu'elle l'aurait voulu. Elle était impatiente de me voir rentrer et lui prêter main-forte. Par ailleurs, j'avais le sentiment que la situation pesait beaucoup à Al, et qu'il avait besoin de quitter Central, la maison endeuillée et les nuits troublées par les pleurs d'Elysia.

Il s'était calé contre la fenêtre du train, regardant filer les arbres et les champs avec un regard plein de lassitude, lâchant de temps à autre un soupir. Je devinais que le désespoir de la fillette avait dû lui remémorer sa situation d'orphelin. Après tout, moi aussi, j'y avais repensé. Mais faute d'avoir retrouvé les corps, nous n'avions jamais eu d'enterrement digne de ce nom pour mes parents. Je me demandais toujours si ce n'était pas encore pire.

En le voyant avec sa stature d'enfant, son air mélancolique, et en repensant à tout cela, je me dis que lui et Edward, je les connaissais bien mal, finalement. En repensant à l'époque où ils avaient tenté de ressusciter leur mère, je me souvenais que je n'avais pas la moindre idée de ce qui se tramait. Les en aurais-je empêché ? J'aurais sans doute essayé, sentant confusément qu'il y avait quelque chose de dangereux à avoir ce genre de souhaits ; mais je ne me doutais de rien.

 Je vivais ma vie paisiblement entre l'école et l'apprentissage de la fabrication d'automails tandis qu'ils suivaient leur propre enseignement auprès d'Izumi Curtis, ne donnant que rarement des nouvelles, tant ils étaient occupés. La curiosité dévorante des deux frères pour l'alchimie et les découvertes en tout genre avaient quelque chose qui m'avait toujours un peu effrayée. J'avais souvent eu l'impression qu'ils allaient tomber dans le gouffre de leur appétit insatiable, et je n'avais pas tout à fait tort quand on en faisait le bilan aujourd'hui.

Alphonse avait été amputé de quatre ans de sa vie. De tous les moments qu'il avait vécu enfermé dans cette armure, il n'en gardait aucune trace. Celui qui se réjouissait à l'idée de pouvoir serrer de nouveau les autres dans ses bras et sentir leur chaleur s'était évanoui, et celui qui était revenu parmi nous était plus orphelin que jamais.

Quant à Edward... il avait perdu son bras et sa jambe, et maintenant, il ne reconnaissait même plus son propre corps... Je baissais les yeux en y repensant. Comment allait-il ? Arrivait-il à s'habituer à ces bouleversements ? Je n'en avais aucune idée, il ne m'avait redonné aucune nouvelle depuis son coup de téléphone. J'aurais dû y être habituée, mais je ne parvenais pas à m'y faire. Pourquoi fallait-il qu'il soit aussi renfermé ? A chaque fois que je pensais à lui, j'étais assaillie de sentiments contradictoires.

Est-ce qu'ils arriveront à retrouver son corps d'antan ? A chaque fois qu'ils se frottent à la transmutation humaine, ils en ressortent dévastés. J'aimerais mieux qu'ils ne prennent pas plus de risques et qu'ils se contentent de ce qu'ils ont... mais peut-on vraiment s'habituer à ça ?

Je me remémorais la conversation que nous avions eue il y a deux semaines seulement, quand il m'avait appelée, peu de temps après que j'avais découvert une vis oubliée lors de ma réparation. Il m'avait horrifiée en m'annonçant que ces automails allaient devoir être intégralement reconstruits, et j'avais pris le premier train pour Central, abandonnant mamie Pinako et toutes les réparations prévues, la rage au ventre.

%\%\%\%\%\%\%\%\%\%\%\%\%\%\%\

Et voilà, un nouveau chapitre commence (que je n'ai pas posté vendredi parce que j'étais sur les routes toute la journée) On retrouve le point de vue de Winry, qui n'est pas le personnage le plus facile à écrire, je l'avoue ^^° 

J'espère que ce chapitre vous à plu, et je vous dit à la prochaine (mecredi, donc)

Bras de fer, Gant de velours - Première partie : LacostaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant