Chapitre 32 : Lilian Thuram
Craquements des chevilles et des poignets, dernière gorgée, et Grégoire rentrait dans le couloir après son baiser habituel. Sans vraiment savoir pourquoi, il ressentait plus de peur que d'habitude, ses mains tremblant par moment et son estomac lui jouant des tours. Quelque chose allait se passer, et apparemment Aimé l'avait aussi compris. Rentrée sur le terrain, les joueurs avaient tous l'air déterminés, alors qu'il y semblait avoir trop de confiance en eux quant à cette demi-finale. Greg en avait déjà perdu deux sur ces deux dernières années, il ne voulait pas que l'expression ''jamais 2 sans 3'' se concrétise avec ce match au stade de France. Juste avant le coup d'envoi, Greg pu voir Lilian continuer à faire quelques petits échauffements, il ne savait pas pourquoi, mais son instinct lui disait de le surveiller pendant le match, quelque chose allait se produire tout particulièrement pour lui.
Coup d'envoi. Son attention devait restée sur le match et ne pas dévier sur son instinct ou quoique ce soit d'autre. Zucker était une vraie plaie, un démon pour le pressing, en l'espace d'une mi-temps Greg avait eu l'impression d'avoir dû surveiller trois joueurs. Quelque part, Grégoire aurait préféré ne pas avoir de mi-temps, passer un quart d'heure à entendre Aimé les démolir en leur rappelant que c'était une demi-finale et qu'ils ne devaient pas être des fantômes sur le bord du terrain... Il se serait fait plus petit qu'il ne l'était déjà s'il avait pu, juste pour échapper à la destruction totale que faisait Aimé sur leur moral, ç'allait rester définitivement dans leur mémoire s'ils n'arrivaient pas à faire mieux en seconde période. Ils ne pouvaient pas perdre cette demi-finale, ils devaient faire mieux que l'illustre génération qui leur avait précédée.
Retour sur le terrain. Ils ne devaient pas perdre. Ils ne devaient pas perdre. Ils ne le pouvaient pas. Greg pouvait voir le même genre de pensée habiter l'esprit de Lilian, c'était leur année, ils étaient chez eux, pas question de s'arrêter là. Coup de sifflet, reprise. Pressing des deux côtés, fatigue grandissante, le cœur de Grégoire était de plus en plus erratique et il ne savait pas pourquoi, quelque chose n'allait pas. Et puis Greg comprit quand Lilian fit une erreur et laissa Zucker atteindre les cages et marquer.
''Non, non, non, non, non, non...''
Son esprit était maintenant rempli de ça, la peur de perdre une nouvelle fois prenant le contrôle et laissant tout son bon sens de côté. Et puis le grand moment commença : Avec un ballon vite relancé, ce fut leur tour, leur contre-attaque, avec Youri à environ 10 mètres des filets, Thierry derrière lui et encore d'autres joueurs peu loin derrière, l'équipe avait une occasion servie sur un plateau d'argent. Youri réalisa un extérieur du pied droit sorti de l'espace pour, il pouvait le dire avec autant de surprise qu'il voulait, Lilian, qui tacla pour marquer. Lilian venait de marquer. Lilian qui ne marquait jamais, même à l'entraînement, venait de remonter au score et de leur redonner espoir ! Ils finirent une nouvelle fois écroulés en un tas de corps sur le terrain, écrasant leur buteur, l'instinct de Greg ne s'était pas trompé, encore une fois. Il restait une demi-heure pour rentrer dans l'histoire de l'équipe et aller en finale jouer contre le Brésil, pour apporter une première étoile sur le maillot à l'effigie de leur pays. Et à peine quelques minutes plus tard, le miracle choisit de prendre le nom de Lilian Thuram pendant quelques secondes. 2-1. Lilian avait mis une demi-volée sans même comprendre comment. Bordel pour l'instant ils étaient en finale ! Tutu qui n'avait jamais marqué un seul petit but venait de faire se soulever un stade entier et sûrement tout le pays en l'espace de vingt minutes. Tutu qui fuyait toujours le cadre les emmenait en finale.
Mais rien n'était terminé, il restait une vingtaine de minutes à jouer avant la fin du match, les croates restaient déterminés et Greg ne pouvait rien leur enlever et il ne pouvait qu'encore plus les respecter pour ça. Et décidément, ils aimaient se faire peur. Grégoire avait cette fois-ci assisté à la faute, ils allaient devoir jouer à 10 pendant le temps restant alors que Laurent méritait à peine un carton jaune pour avoir poussé le joueur croate, mais la décision revenait à l'arbitre, malgré cette grossière simulation. Carton rouge contre Laurent. Grégoire trouvait ça injuste et absolument pas mérité mais il n'était pas du genre à aller lui-même se trouver un carton en allant discuter avec l'arbitre.
15 petites minutes à tenir, à ne laisser filer aucun ballon, à ne donner aucune occasion, à ne rien laisser passer, et la finale leur ouvrait ses portes. Tout le monde retenait son souffle alors que la dernière minute approchait, ils allaient le faire ! Une dernière Marseillaise dans les tribunes, et le match était terminé ! La France allait participer à sa première finale de coupe du monde grâce à Lilian Thuram, qui le soulevait du sol malgré la fatigue que le match avait instaurée. Grégoire n'en revenait pas. Ils jouaient contre le Brésil déjà quatre fois champion du monde en finale chez eux. I Will Survive était mérité ce soir.
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Footballeur & Journaliste
Roman d'amourGrégoire à peine transféré de Lyon à Bordeaux trouve bien plus que des buts à mettre après sa première conférence de presse. Ce qu'il ne savait pas était que ses pensées seraient habitées par un certain journaliste.