Epsilon [Tome 3]

Chapitre 14 - Cauchemar

J'ouvre les yeux, il fait encore nuit dehors. Je bouge mes doigts posés sur son torse nu, il dort paisiblement à mes côtés et je dois dire que c'est une vue qui ne me déplait pas, loin de là... Soudainement, j'entend un bruit qui provient du séjour, dans la pièce d'à côté. Je fronce les sourcils et me lève silencieusement. Je m'avance vers la porte de la chambre et l'ouvre, pour me retrouver dans le séjour. Rien. Personne. J'ai pourtant bien entendu comme des pas... Je prend une grande inspiration en fermant les yeux... Grave erreur. A peine les ai je réouverts que la pièce est tapissée de sang, les murs, le sol et tous les meubles... Il fait noir et j'entend des cris d'agonie de centaines de personnes pourtant je n'en vois qu'une seule au milieu de la pièce ensanglantée. Un homme plutôt grand, habillé de noir, il est face à moi mais je ne vois pas son visage puis tout à coup, ma respiration se coupe quand il lève la main dans ma direction. J'étouffe, mon coeur tambourine dans ma poitrine, je ne sais pas quoi faire.

Je m'effondre au sol, ma gorge se libère et je respire de nouveau à grande goulée d'air. Je redresse la tête, le pièce s'est totalement métamorphosée. C'est impossible. Je vois des corps partout, des femmes, des hommes et des enfants. J'ai un haut le coeur en voyant tout ce sang, les cris ne cessent de me percer les tympans. Non je n'en peux plus, je plaque mes paumes contre mes oreilles et ferme fort les yeux, je ne veux plus, je ne peux plus. Quelque chose coule sur mes mains, je les regarde alors, elles sont couvertes de sang, je n'ai tué personne je ne suis pas comme ça. Je ne suis pas une tueuse. "Tu vas regretter ce que tu as détruit" J'entend dans mon esprit, cette voix je ne la connais pas mais je ne peux pas y réfléchir plus que des hurlements me parviennent encore plus puissants que les premiers. Je n'ai rien fait, laissez moi tranquille. Je veux sortir d'ici, je ne veux plus voir tous ces corps présents même quand mes yeux sont clos. Je veux m'en aller laissez moi. Soudain, tout disparait, les cris, les corps, le sang, tout.

J'ouvre les yeux, je suis dans un jardin. Des rires d'enfants me parviennent, je tourne la tête et vois une petite fille jouer sur une balançoire avec d'autres enfants. Cette petite fille qui sourit sous ce soleil étincelant c'est moi, plus jeune. Mon coeur se serre. Cette vision ne s'est jamais réellement produite, à cet âge là je passait le plus clair de mon temps en cellule ou sur des tables de docteur avec des fils et des seringues partout autour de moi. Cette enfance que je rêvais d'avoir, mais que je n'ai jamais eu... Je sais que je ne pourrais pas changer mon passé, cette enfance perdue est mon inatteignable... Ma gorge se serre et je retiens les larmes pour ne pas qu'elles coulent.

Je prend une grande inspiration, un froid glaciale s'empare de moi et me pique la peau, où suis je ? Mes yeux s'adapte à la faible luminosité. Je suis dehors, en pleine ville mais comment je suis arrivée là ? Où est Ray ? Etant simplement vêtu d'une de ses chemises et d'un culotte je ne sais pas comment je vais m'en sortir. Merde qu'est ce que je fais ? Le district est toujours plongé dans l'obscurité à cause de l'onde électromagnétique. Il n'y a personne dans le parc où je suis, l'herbe humide me trempe les pieds et je souffle une vapeur blanche à cause du froid. Je crois que je tremble plus à cause de ce que je viens de voir que du froid. Ce cauchemar était si réaliste, qu'est ce qui m'arrive ? Je dois le retrouver, et vite. Je tente alors d'étendre mon esprit mais rien, j'en suis soudainement incapable. Non, pas ça. J'ai la sensation d'avoir perdu mes capacités, merde non qu'est ce qui m'arrive !! Je dois garder mon sang froid, mais des images de ce que je viens de vivre me font froid dans le dos et me pétrifie. Bizarrement je ne sens pas trop le froid me glacer les os, comme si je n'avais jamais eu de pouvoir et que les tests ne m'avaient jamais affaiblie...

Je dois retrouver l'appartement. Je sors du parc, toujours pieds nus. Heureusement que personne n'est là pour voir dans quelle tenue je suis. Je marche sur les trottoirs, quand je commence à sentir une sorte de présence derrière moi. Je regarde discrètement par dessus mon épaule, et la silhouette masculine qui me suit me glace le sang. L'homme a la mâchoire carrée, le crâne rasé et un gros sweat gris qui cache sa large carrure. Je regarde devant moi et accélère le pas. Je l'entend faire de même. Je donnerai cher pour avoir Ray à mes côtés. Malheureusement je vais devoir me débrouiller seule sur ce coup, il ne faut juste pas qu'il me rattra... Une forte poigne me saisi le bras et me retourne brusquement. Ma respiration se coupe quand mon dos heurte le mur d'un immeuble violement. L'homme se colle à moi, un sourire qui en dit long collé au visage. Je n'ai pas mes pouvoirs, je fais quoi ? La panique me gagne peu à peu.

- Laissez moi partir. Je dis en essayant d'être froide mais convainquante.

Il sourit d'avantage. Cet homme me répugne, je sens un arrière gout d'alcool dans son haleine.

- Tu t'es perdue ma jolie ? Dit il en reluquant mon corps ouvertement.

Un haut le coeur me donne soudainement envie de vomir quand ses mains se glissent soudainement sous ma chemise. Une surdose d'adrénaline me traverse le corps et je remonte mon genoux violement dans son entre jambe. Il se plie en deux dans un grognement hargneux. Je ne réfléchis plus, mon instinct prend le dessus et je cours le plus vite possible. Mon coeur tambourine dans ma poitrine quand je pense à jusqu'où il aurait pu aller... J'entend ses pas se rapprocher dangereusement, il me court après !! Je m'essouffle vite, il faut que je trouve quelque chose rapidement pour me sortir de cette merde. Un soulagement indescriptible s'empare de moi quand je vois l'immeuble de Ray sur ma droite, je vire soudainement, grimpe les quelques marches qui mènent à l'entrée. Je pousse les lourdes portes et me retrouve dans le hall. Je me retourne furtivement, mes yeux s'agrandissent quand je vois l'homme entrer à son tour. Je heurte brutalement quelque chose de dur et me retrouve les fesses par terre, mon coeur tambourine toujours aussi fort.

Je dois rapidement me relever, mais je lève d'abord les yeux vers ce que je viens de me cogner, ou plutôt vers qui. Mon coeur rate un battement quand je vois Ray, ses yeux ont cette magnifique couleur verte forêt. Son regard doux sur moi se reporte sur l'homme arrivant à grande vitesse vers moi, son regard change du tout au tout, une colère monstre en prend possession. Il fait quelques pas vers l'homme qui court toujours, comme obnubilé par moi, il me fait peur, on aurait dit un chien enragé qui cherche à tout prix à mordre, les yeux fous. Ray l'attrape par la gorge et l'envoi dans le mur opposé, l'homme est assommé sur le coup. Je suis toujours à terre, chamboulée de ce qu'il vient de se passer.

Ray me regarde, une lueur de détresse dans les yeux, je me lève et me précipite vers lui. Je ne lui donne pas le choix et me blottie dans ses bras, les larmes aux yeux. Ce cauchemar, et cet homme qui a voulu... Je le serre contre moi encore plus fort. Je ne veux plus les voir, je ne veux plus entendre leurs cris d'agonie qui résonnent encore dans ma tête.