Everything happens by accident (Tome 1)

Chapitre 30

Point de vue de Jenny

[240 jours avant]

29 novembre.

Pour moi, cette date représente tout. Une mort, un changement, un abandon soudain. Ma vie s'est basée là, elle a dû recommencer là.

Je me lève somnolente de mon lit, sachant pertinemment que je ne tarderai pas à y retourner.

Cela fait à peu près un mois que tout va bien, mais bien sûr ce jour devait arriver, comme chaque année en fait. Parce que oui, c'est simple de se persuader qu'on a la force d'aller de l'avant, et d'oublier son passé, mais comment oublier si cette date refait surface à chaque fois ?

Et bien sûr, le monde a choisi que notre tournoi de volley, et, moi en tant que capitaine pour le diriger se passerait aujourd'hui. Sinon ça n'aurait pas été marrant.

Je n'éprouve rien de plus que de la haine, de la nostalgie, et de la rancoeur envers cette date. Et si je la déteste tant, c'est tout simplement parce que il y a exactement 12 ans, la vie m'a privé d'une chose irremplaçable. D'un père.

Alors chaque année je reste chez moi, que ce soit un jour de cours, ou de week-end, une journée pluvieuse ou une ensoleillée, je reste enfermée et passe la journée seule à réfléchir.

Je commence par un bain chaud, merveilleux moyen pour perdre la notion du temps et méditer tranquillement. En me glissant dans l'eau, rien, aucun sentiment. Juste un énorme néant à la place du cœur.

Je suis perdue, pour tout. Ma tête est comme un tourbillon d'idées et de souvenirs. Aujourd'hui je n'ai plus le goût a rien. Je ne sais plus rien. Comme si juste l'évocation de ce jour m'avait coupé tout sentiment, je me sens tout simplement vide. Je ne sais même plus si je dois lire l'horoscope "en couple" ou "célibataire", et me plains même de la stupidité de ne pas avoir inventé une option : "j'essaie de le faire tomber amoureux de moi pour un pari". Ça paraît pourtant evident.

Je sors de la baignoire, remets mon pyjama, et retourne finalement dans ma chambre pour me cacher sous ma couette. Mon téléphone sonne sur ma table de chevet et je grogne en l'attrapant.

Alors, prête pour le match ?

C'est Emma. Je soupire un bon coup, il va bien falloir lui dire que je ne compte pas venir. Tous les ans je lance une excuse à deux balles différentes pour éviter la civilisation, et malgré ça, personne ne l'a encore remarqué. Personne à part Max, pendant plusieurs années elle a essayé de m'aider, de vraiment m'aider mais je crois qu'à force de me recroqueviller sur moi-même et de l'envoyer chier elle a finit par comprendre que je devais être seule.

Je me sens pas super bien,
je pense pas venir...

Les trois petits points signalant qu'elle est en train d'écrire apparaissent immédiatement.

Quoi ?! Mais comment ça ?!
T'es la capitaine ! Tu peux pas
nous faire ça !

Sans aucun regret, j'éteins mon téléphone. Aujourd'hui je veux être coupée du monde. C'est un jour de deuil et non de fête, alors que tout le monde aille se faire foutre.

***

- Hummm... je grommelle en me retournant sur mon lit.

Des coups font écho dans ma tête. Je me retourne encore une fois. Mon lit est moins confortable que d'habitude. Les coups ne s'arrêtent pas. Je crois qu'ils ne sont pas dans ma tête, est-ce que quelqu'un toque à la porte ? J'ouvre lentement les yeux et regarde autour de moi pour me repérer et me rappeler de quelque chose. J'ai un mal de tête absurde et je ne suis pas dans ma chambre, mais sur le canapé du salon.