Point de vue de Jenny
[306 jours avant]
En moyenne dans sa vie, une personne va marcher trois fois le tour du monde.
Les points de vues varient, les gens sont différents, et cette information peut alors être interprétée de deux manières bien distinctes : la terre est petite ou la terre est grande.
Moi, je ne sais pas ce que j'en pense. Quand on se souvient du fait que des gens meurent de faim, subissent le changement climatique et attrapent des maladies de merde, je me sens bien loin de tout ça.
Je suis consciente d'être privilégiée. J'ai un toit, une famille, et je dois me lever ce matin encore pour aller en cours. L'éducation est un luxe dont des milliers de gens sont privés, et les adolescents comme moi trouvent un moyen de s'en plaindre.
Je laisse divaguer mes pensées encore quelques instants avant que mon père ne crie mon nom.
Je me tourne sur le côté pour attraper mon téléphone. 7h32. Merde, c'est fou comment j'arrive à être en retard même le jour de la rentrée.
Je me lève à la hâte et attrape les deux premières fringues qui me passent sous la main. Je cours jusqu'à la salle de bain pour me préparer avant de dévaler les escaliers à toute vitesse.
En bas je retrouve mon grand frère, Ethan, un bol de céréales dans la main droite, qui essaye d'enfiler maladroitement son pantalon de l'autre.
Ethan est beau, même très beau. Mais aussi très con. Je dis ça seulement parce qu'on a une relation frère-sœur basique où on se frappe et s'insulte sans aucune raison particulière.
Il a de courts cheveux châtains, un teint assez mat, et des yeux noirs profonds. C'est le genre de mec qui fait tomber toutes les filles, et c'est lui-même un coureur de jupons. Pas besoin de préciser que chaque soir je dois faire face à une de ses nouvelles conquêtes.
Quand je me retourne, je tombe face à face à mes parents. Je cours dans leurs bras. Le temps se suspend. Leurs valises sont laissées à moitié sur le sol, mais il n'y a pas que ça. Depuis toujours j'ai l'impression d'être laissée à moitié, comme si quelque chose me manquait. Et maintenant qu'ils vont partir pour leur travail, je perds encore une autre partie de moi.
- C'est seulement pour 4 mois ma chérie...
Je me contente de resserrer notre étreinte.
- Vous allez me manquer.
- À nous aussi, maintenant dépêche-toi tu vas être en retard.
Je souris et attrape mes affaires. Mais je sais bien que ça n'est pas fini. Et comme pour confirmer mes dires, mes parents me rattrapent instantanément dans leurs bras. Ethan se rajoute mais je lui donne un coup de pied en lui murmurant que c'est moi la préférée et qu'il a été adopté. On part dans un fou rire qui dure plus d'une minute. On rigole autant parce qu'en vrai, c'est moi l'adoptée.
Après encore d'autres salutations larmoyantes je sors finalement en claquant la porte.
Je cours vers ma voiture, qui au passage s'appelle Orlando. C'est une petite Fiat 500 rouge que j'ai reçue pour mon anniversaire de la part de mes parents. Je la déverrouille et vais chercher Max.
Max, c'est ma meilleure amie depuis aussi longtemps que je m'en souvienne. Je l'adore, c'est ce genre de personne unique qui te fait sourire sans raison, et qui illumine tes journées les plus sombres.
Max s'applique toujours le plus possible dans ce qu'elle fait, chose que j'admire énormément chez elle. Elle se met corps et âme dans chacun de ses faits et gestes, tellement, qu'elle en devient parfois obsessionnelle. C'est le genre de personne à jamais pleurer en public. Peut-être parce que si elle commence, elle se dit qu'elle n'arrivera pas à arrêter ?
Max a de longs cheveux noirs qui forment des boucles parfaites au niveau de sa taille, des yeux noisette magnifiques, des taches de rousseur de part et d'autre du visage qui lui descendent jusqu'au bras, des sourcils qu'elle ne taille jamais, référence à Cara Delevingne. Elle est grande et fine, en partie parce qu'elle mange seulement des trucs sains, chose que je ne comprendrais jamais.
Pleins de gens croient qu'on ne peut pas être amies parce qu'on est trop différentes. Mais au contraire, je trouve que ce sont nos différences qui nous lient autant, qu'on se complète. Qu'on prend le meilleur d'elle, et le meilleur de moi, pour créer un nous.
J'arrive finalement devant chez elle et je klaxonne. Elle s'avance vers Orlando et s'assoit en me lançant un regard noir comme elle sait si bien le faire. Le trajet se fait en silence, Max rêvasse de son côté en regardant derrière la vitre la belle ville de Los Angeles. Arrivée au lycée, je trouve par chance un parking assez près de l'entrée, et je tourne la tête pour apercevoir une Max plus que stressée.
- Anxieuse ?
- Un peu...
Nous descendons donc de la voiture pour nous diriger vers l'entrée, mais avant que nous puissions faire plus de 10 mètres, Max se fige brusquement quelques secondes avant de faire demi-tour à toute vitesse.
Sur le moment je ne comprends pas et ma tête se tourne automatiquement vers le point qu'elle fixait. Je louche sur toutes les têtes jusqu'à ce que je le vois. Flynn, le grand amour de Max. Elle l'aime depuis maintenant quoi ? 8 ans ?
J'ai toujours eu un don pour savoir quand deux personnes s'aiment. Mais dans ce cas-là, on a même pas besoin d'un don, ça se voit à 1 km, c'est une évidence, ils s'aiment tous les deux.
Je l'ai déjà dit un million de fois à Max, mais rien à faire, elle ne veut pas m'écouter. Elle se résigne à croire que son amour est impossible. Ça me donne la rage, mais comme toujours je ferais tout ce qu'il faudra pour qu'elle soit heureuse.
Je me retourne vers elle, pour finalement l'apercevoir cachée derrière Orlando. Je la prends par le bras pour l'entrainer vers le lycée mais elle se défend plutôt bien, et comme une apparition, une idée brillante me traverse l'esprit.
Avec Max on a la fâcheuse habitude de faire des paris, pour tester un peu les limites de l'une et de l'autre. Je commence donc à fixer Flynn de l'autre côté de la voiture. Un éclair de malice traverse mes pupilles, je fais volte-face vers ma meilleure amie et je lui dis :
- De toute façon, je parie que t'as même pas le courage d'aller inviter Flynn à sortir...
- Bah bien sûr que j'ai pas le courage sinon ce serait déjà fait.
Un rire nerveux sort de sa bouche.
- Et si je te dis que je ferai ce que tu veux en échange ?
- Tout ce que je veux ? T'es sûre ?
- Jamais été aussi sûre, je réponds avec confiance tout en appliquant du baume à lèvre sur ma bouche desséchée.
Ses yeux en amande s'illuminent et elle me dévisage lentement, puis, je vois un sourire en coin apparaître sur son visage. Elle dépasse Orlando, derrière lequel nous sommes cachées depuis tout à l'heure, et elle se dirige vers son grand amour.
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Everything happens by accident (Tome 1)
Novela JuvenilLors de leur rentrée en dernière année de lycée, Maxine et Jenny, deux meilleures amies, voient leur monde basculé au moment même où elles se mettent d'accord sur un pari. Une bêtise sans importance qui a pris de l'ampleur par la suite. Elles vont d...