Nous parlions de nos relations respectives, lui comment il avait rencontré Sarah, moi comment Théo m'avait quitté, quand la porte s'ouvrit derrière nous, et une grande ombre apparut sur le balcon.
- T'abuse, finit par lâcher l'ombre.
- Arrête Mek, c'est rien.
Ken s'était retourné pour faire face à Mekra. Derrière le molosse se trouvait son frère qui lui posa la main sur le bras.
- Viens, laisse-le c'est bon.
S'en suivit un duel de regards entre Mekra et Ken. Je ressentais le malaise profond regnant sur cette terrasse sans en saisir le sens. Qu'est-ce qu'il a lui ? J'ouvris la bouche puis me ravisai. Vu la taille du bonhomme, je n'avais pas envie de l'embêter. Je battis en retraite.
- Je vais me chercher à boire.
Puis, me tournant vers Ken, j'ajoutai :
- On finira de planifier tout ça plus tard.
Je jetai un regard entendu à notre assaillant, et me glissa entre lui et la porte pour échapper à cette lutte silencieuse. Je me dirigeais vers le frigo pour prendre une bière quand quelqu'un m'attrapa par l'épaule.
- Hé Maëlle ! Je ne t'avais pas vue !
- Salut ! fis-je à 2zer en essayant de sourire.
Je ne devais pas être très convaincante puisqu'il me demanda d'une voix sérieuse :
- Ça va ?
- Oui oui. J'hésitai. Il y a un problème avec Mekra ?
- Ah Mek... non rien, t'en fais pas, il joue les gardes du corps c'est tout. Viens, je viens de tester un nouveau cocktail, tu m'en diras des nouvelles !
- Je ne suis pas sûre que...
Je n'eus pas le temps de finir ma phrase que je me sentis trainer, il m'avait pris le bras pour m'entraîner près d'une table. Qu'est-ce qu'ils ont tous à me toucher comme ça ?
Il me tendit un mélange marronâtre, et attendit que je le goûte avec impatience. On aurait dit un enfant qui tend un gâteau de sable à ses parents, et son attitude me coupa l'envie de refuser. Je portai le verre à ma bouge, et en bu une petite gorgée. L'alcool me brûla la gorge instantanément. Le goût n'était ni bon ni mauvais, il était juste trop fort.
- Tu as mis quoi dedans ?
- Crois-moi tu ne veux pas savoir, fit une voix derrière moi.
Solal apparut en me faisant un clin d'œil. Il poursuivit :
- Mais je pense que ça te ferait du bien, amuse-toi un peu, on dirait une enfant perdue !
C'était vrai, je n'étais pas à ma place ici.
- Non, je pense que je ferais mieux de rentrer, je travaille demain.
- Allez, tu ne vas pas partir comme ça ! On n'a même pas eu le temps de faire connaissance !
Son insistance me mit mal à l'aise. 2zer enchaîna :
- Tu ferais mieux d'attendre le Fennec avant de partir, il fera la gueule sinon. Et puis, il faut que tu finisses ton verre !
- La dernière fois c'est lui qui est parti sans dire au revoir.
Je reposai mon verre doucement.
- Ouh, rancunière. Ecoute, si tu pars, je te ramène chez toi. Et prends ce verre !
- Ça ira mer...
- C'est pas négociable. Je te ramène, c'est pour le bien du label, et du clip de mon kho.
Je levai les yeux au ciel.
- T'inquiète, je suis casé, même si tu me suppliais, je n'entrerai pas chez toi.
Cette dernière remarque me fit rire et j'acceptai son offre, tout en laissant la mixture étrange où elle était.
En allant chercher mes affaires, je passai devant le balcon. Ken et Mekra y était toujours, et j'entendais des éclats de voix. Ils se disputaient. Je ne pouvais pas saisir le sens de leurs paroles, je les voyais simplement s'agiter. J'entrouvris la fenêtre pour y laisser passer ma tête.
- Je vais y aller, vous m'enverrez un message pour les derniers détails. Merci pour ta confiance.
Je vis Ken ouvrir la bouche en passant sa main dans ses cheveux, mais je refermai la vitre avant qu'il n'ait eu le temps de prononcer un mot. Une fois mon sac et ma veste retrouvés, je filai dehors avec 2zer.
- Merci de me raccompagner, mais je pouvais me débrouiller toute seule.
- Je voulais en profiter pour te parler.
Donc, ce n'était pas par gentillesse. Je me sentais idiote. Il alla droit au but.
- Tu sais que Ken a une copine ?
Je souris. C'était donc ça qui l'inquiétait, et qui était probablement source de colère chez Mekra.
- Oui, il m'en a parlé.
- Vous avez eu l'air de beaucoup parler tous les deux.
- Oui, c'est pour ça que je suis venue. Ça pose problème ?
- Ecoute, m'ignora-t-il, tu as l'air honnête alors je te le dis : il ne quittera pas sa copine.
- Tu penses vraiment que c'est ce que je veux ? Je ne le connais pas. Et de toute façon, je respecte trop les couples pour les briser.
Je me rendis compte que mes poings s'étaient serrés. Sans que je ne m'en rende compte, la colère avait envahi chacun de mes membres. J'enchaînai :
- Franchement, c'est grave ça, y a moyen que des gens se parlent tranquillement sans avoir d'arrière-pensée ? Tu sais quoi, retournez chez Solal toi et ta fourberie, j'ai pas besoin qu'on me juge.
J'accélérai le pas, et l'entendis me suivre en silence derrière moi.
Finalement, mon histoire avec mon ex m'avait peut-être marquée. L'idée qu'on puisse m'accuser de briser des ménages m'était insupportable.
Une fois arrivée en bas de chez moi, je tapai le code nerveusement et ouvris la porte. 2zer la retint avant qu'elle ne se ferme.
- Désolé, je voulais juste te mettre en garde. Bonne nuit.
Puis il lâcha la porte et disparut.
Je me sentais déboussolée. J'avais effectivement senti qu'il s'était passé quelque chose entre Ken et moi ce soir-là, je ne pouvais pas me le cacher, mais il ne s'agissait pas d'avances ou de tension sexuelle. C'était beaucoup plus doux, beaucoup plus pur. Rien à voir avec ce dont on m'accusait. Le courant était juste bien passé. Très bien passé.
Je me remémorai ses yeux sondant mon âme. Nous avions passé un temps infini à nous regarder. Je soupirai. Arrête ma grande tu vas commencer à te faire des films, de toute façon tu ne voudras jamais sortir avec un mec comme ça. Bien sûr que non, le genre mec populaire et sûr de soi, ça n'était pas pour moi.
Je sortis mon téléphone pour regarder l'heure : 1 heure du matin. Combien de temps étais-je restée avec lui sur ce balcon ?
Une bulle s'afficha :
« T'aurais pas dû partir, on n'avait pas fini. A dans un mois et demi. »
Je montai les escaliers, pénétrai mon appartement, et me ruai sur mon ordinateur pour réserver mes billets de train.
A dans un mois et demi.

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Parenthèse
Fiksi Penggemar"Ta façon de danser reflète ton âme, tu es quelqu'un de bien Maëlle."