Epilogue

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POV : Sarah

Cette année a été compliquée. Ma vie avec Ken l'avait toujours été, entre ses sessions stud', ses soirées entre potes, ses voyages, ses tournées, mais celle-ci avait été particulièrement éprouvante. J'avais cru le perdre. Il s'était d'abord éloigné de moi, doucement, prétextant toujours plus de travail, ses soi-disant manques d'inspiration le menaient à passer ses soirées dehors, à vagabonder. Puis il l'avait rencontrée.

Je n'avais d'abord pas cru Hakim quand il m'avait dit qu'elle poserait souci. Il avait toujours été trop méfiant, il analysait trop peu les gens et les jugeait trop vite. Mais lorsque je l'avais vue, j'avais commencé à douter. Elle était très jolie, brune à la peau claire, sans défaut, sur laquelle s'étaient posées quelques tâches de rousseurs discrètes, les cheveux longs et ondulés, des lèvres charnues, légèrement colorées et un cou long, fin, qui lui donnait l'air hiératique et lui procurai la grâce d'une reine. Moi-même j'aurais pu tomber sous son charme, eussé-je été attirée par les femmes.

J'avais d'abord été en conflit avec moi-même, notre couple battait déjà de l'aile, rien ne servait d'empirer les choses, il fallait que je prenne sur moi et que je lui fasse confiance. Après tout, je ne la connaissais pas, elle était peut-être droite et respectable. J'avais cependant connu ma première dispute à son sujet lors de la première soirée qu'elle avait passé avec nous, chez Mekra. En réalité, ça n'était pas à elle que j'en voulais, mais lorsque Ken m'avait annoncé qu'il ne viendrait pas au weekend chez mes parents prévu pour l'anniversaire de mon père, mon esprit c'était troublé. « Il faut que je suive le tournage ». C'était son excuse. « Maëlle a besoin qu'on la rassure, elle manque de confiance ».

Je m'étais sentie définitivement délaissée. Je ne reconnaissais plus l'homme avec lequel j'avais passé les trois meilleures années de ma vie. L'homme charmant qui avait emprisonné mon cœur au fil du temps, celui à qui j'avais tout donné. La descente avait été brutale, et j'avais fini par me noyer dans la jalousie. Il rentrait tous les soirs de plus en plus tard, à peine un regard, mangeait un repas sur le pouce et allait se coucher, quand il ne sortait pas marcher. J'avais l'impression que ma vue lui était devenue insupportable, et cherchai à comprendre ce qui avait déclenché un tel changement.

J'avais passé des semaines au téléphone avec mon meilleur ami, lui qui était si proche de lui, qu'est-ce que je faisais de mal ? Qu'est-ce que je pouvais faire pour me faire pardonner ? Je vivais dans l'incompréhension et le mépris de moi-même. Je sombrais dans la paranoïa et essayai par tous les moyens de me raisonner. Elle ne pouvait pas être si nocive, c'était forcément de ma faute. Même Mek' s'était radouci à son sujet, il ne voulait pas l'admettre, mais il avait perdu son ton acerbe lorsqu'il parlait d'elle.

Et il y a eu ce jour. Une énième dispute. C'était devenu notre seul moyen de communiquer. Et cette phrase qu'il avait sortie, presque suppliant. « Reste avec moi. » Et je l'avais vue. J'avais vu dans ses yeux cette lueur que je croyais perdue. J'avais compris qu'il m'aimait toujours. Rien n'était perdu, je pouvais continuer à me battre pour sauver ce qu'il y avait entre nous.

Et lorsque je pensais remonter la pente, elle m'avait achevée. Elle était tombée, m'avait dit Eric. La réaction de Ken avait été sans appel, il avait pris le parti de la danseuse contre notre ami de longue date. Eric avait toujours donné le meilleur de lui-même à l'école où j'avais appris le classique plus jeune. Il nous avait toujours poussées à aller à fond, mais nous avait toujours respectées. C'est d'ailleurs pour ça qu'il se liait fréquemment d'amitié avec ses élèves. Et pour une histoire de porté mal réceptionné, il se faisait remercier. J'avais pris la nouvelle comme une trahison de la part de Ken.

J'avais attendu le lendemain de l'accident pour lui en parler. Il s'était violemment défendu, le ton était monté et il avait fini par prendre sa veste et un sac, et m'avait laissée esseulée après avoir claqué la porte. Je ne me souviens plus vraiment de la suite. J'avais pleuré, beaucoup pleuré, et je m'étais retrouvée avec Mariana à qui j'avais fini par me confier.

ParenthèseOù les histoires vivent. Découvrez maintenant