Chapitre 16

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Pdv Antonio Salieri:

Je souhaitai une bonne journée à Therese, qui se levait également très tôt, et partis en direction du palais. Le ciel s'était dégagé et la brise se faisait plus légère, signe de beau temps. Aucun nuage ne faisait obstacle aux premiers rayons de soleil, provoquant de larges bandes lumineuses à travers l'horizon. J'avais quelques leçons à donner ce matin et ensuite, je pourrai finaliser la composition de mon nouvel opéra. Le précédent avec mademoiselle Storace avait récolté de nombreuses critiques positives et un bon accueil de la part du public le tout, en une quinzaine de représentations réparties sur seulement vingt jours. Je comptais faire tout aussi bien pour le prochain. J'avais la chance de vivre à une époque où Vienne était un intense foyer musical sous la protection de Joseph II, qui était réputé pour être un grand adepte de musique hélas, bien trop souvent incompris. Il accordait une place importante aux compositeurs et aimait énormément placer les plus prestigieux sous sa bénédiction. C'était ce qu'il avait fait avec moi et plus tard, avec Mozart. S'il venait à mourir un jour, nous perdrions tous deux un père protecteur.

La matinée s'était déroulée tranquillement et sans agitation, pour mon plus grand plaisir. Je n'aimais pas les troubles fêtes et préférais quand tout suivait son chemin sans causer d'ennuis. Je décidai de me rendre en salle de composition afin d'avoir accès à d'autres instruments que le seul piano que j'avais à disposition dans mon bureau. J'avais besoin de tester des accords au clavecin et au violon pour mon nouvel opéra. Je voulais être sûr du rendu. Par chance, les couloirs étaient presque vide, hormis les employés qui circulaient, et je m'installai dans la pièce, prenant grand soin de fermer derrière moi pour ne pas être dérangé. Cependant, à peine avais-je eu la chance de m'asseoir au clavecin que la porte se rouvrit en une volée, laissant apparaître Mozart, qui semblait revigoré et débordant d'énergie.

- Oui, c'est bien vous qu'il m'avait semblé apercevoir entrer ici, remarqua-t-il.

Il se retourna pour fermer la porte avant de s'appuyer contre celle-ci. Je ne savais pas ce que j'avais fait pour mériter cela, mais partout où j'allais, je le retrouvais dans mes pattes. Il me fit un large sourire et je tournai le regard pour me concentrer sur les touches de l'instrument.

- Il faut dire que c'est une chance que je vous croise maintenant Salieri. J’avais justement l'intention de passer vous voir. N'est-ce pas merveilleux?

- Pourquoi donc?

- Cela m'évite un déplacement.

Je haussai les épaules. Habituellement, ce n'était pas un vulgaire déplacement jusqu'à la porte de mon bureau qui l'importunait. Il avait même plutôt tendance à s'y rendre bien plus qu'il ne le devait.

- Et pourquoi cherchiez-vous à me voir?

- Constance m'envoie.

Il se redressa de contre la porte et sortis de la poche intérieure de sa veste un morceau de papier complètement froissé, qu'il déposa devant moi.

- Vous ne m'en voudrez pas, je me suis permis de la lire, ajouta-t-il.

Prudemment, j'attrapai de deux doigts une extrémité de la lettre qui m'était adressée et la dépliai. Je ne prenais même plus la peine de relever le fait qu'il avait lu mon courrier, le plus étonnant aurait été qu'il ne le fasse pas. C'était là un signe supplémentaire qu'il avait retrouvé sa vivacité et j'en étais ravi. Je le préférais ainsi.

- Ne perdez pas votre temps à la lire. Je peux vous faire un résumé.

Je retirai mes yeux du morceau de papier et posai mon regard sur lui, qui se racla la gorge et commença à faire des tours dans la pièce.

Victime de ma victoireOù les histoires vivent. Découvrez maintenant