Proposition de voyage en Provence

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Stockholm, juillet

Anders s'appuie un instant contre le chambranle de la porte de la véranda qui donne sur le jardin et observe Sung-ki, installé sur une chaise longue au soleil. Sunshine est pelotonné sur son torse et dort du sommeil du juste.

Un mois plus tôt, le hockeyeur a récupéré son compagnon en miettes à l'aéroport de Stockholm ; aujourd'hui, Sung-ki a définitivement retrouvé le sourire. Anders craignait qu'il ne se plaise pas en Suède, qu'il regrette la Corée du Sud, qu'il ne se sente pas à sa place parmi sa famille. Mais Sung-ki, plein de résilience, a su rebondir après les terribles événements de la fin du mois de juin.

Anders s'approche de son petit ami et s'allonge sur la chaise longue juste à côté de la sienne. Il tend la main pour prendre celle de Sung-ki, qui tourne la tête en souriant. Le danseur chuchote, comme s'il voulait ne pas réveiller le chien blanc :
— Dire que je pensais que la Suède était un pays froid ! En fait, il fait aussi super beau en été !
— Parfois, il fait vraiment chaud, oui. Ça permet de bronzer ; c'est bien.
— Ça me fait tout bizarre de pouvoir le faire, d'ailleurs ! En Corée du Sud, je ne pouvais pas parce qu'on devait garder le teint aussi pâle que possible pour être beaux. Et déjà qu'en venant de ma ville de Busan, j'étais plus hâlé que les autres...
— Pâle ou bronzé, tu es beau dans les deux cas de toute façon.

L'ancien idol rit avant de poursuivre sur une autre voie :
— Et tu as vu comme Sunny m'a adopté ? J'avais un peu peur, au début, qu'il ne m'aime pas, puisque tu m'avais dit qu'il n'acceptait pas Bastian, mais on dirait qu'on est très amis maintenant, lui et moi !
Anders embrasse le dos de la main de Sung-ki.
— Je n'avais pas le moindre doute. Vous vous appelez pareil ou presque ! Ça ne pouvait être que le signe d'une grande amitié.

Le Suédois observe le danseur et son chien d'un regard infiniment tendre, puis reprend avec le sourire :
— Dis, j'ai une petite offre à te faire.
Anders sourit encore lorsque Sung-ki lui lance un regard interrogateur et curieux.
— Une petite semaine en Provence, tous les deux, avec Sunshine, ça te tente ?
Une vaste palette d'émotions se succèdent sur le visage très expressif du Sud-coréen. D'abord, la surprise, tandis qu'il répète le nom que son compagnon vient de prononcer.
— En Provence ? Dans les lavandes ?
Il comprend en même temps qu'il le formule, et l'enthousiasme fait briller ses yeux, puis illumine toute sa figure.
— Oh, oui ! Je rêve de te voir au milieu des champs de lavande comme sur les photos de ta jeunesse que tu m'avais envoyées au début de nos échanges ! Ce serait merveilleux !

Le sourire d'Anders s'agrandit avant de s'effacer aussi vite qu'il est apparu. Car Sung-ki, très rapidement, semble réaliser les obstacles qui se trouvent sur le chemin de ce beau projet, et ceux-ci douchent la joie du danseur avec d'autant plus de force qu'il sait ne pas pouvoir les contourner.
— Mais tu sais, je n'ai rien du tout... Pas un seul won... euro... couronne... Je ne peux pas acheter de billet d'avion ni de chambre d'hôtel, ni rien.
Il lève une main avant que le hockeyeur ne puisse ouvrir la bouche.
— Et tu me paies déjà tout ici. Tout ce que je mange, un abonnement de téléphone... Je ne veux plus avoir de grosse dette qu'il me faut des années à rembourser comme à l'agence, et... Et tu ne dois pas travailler en faisant un boulot que tu n'aimes pas pour me payer des vacances, tu sais. Ce ne serait pas juste.

Anders se fige, puis jette un regard par-dessus son épaule pour s'assurer qu'ils sont bel et bien seuls dans le jardin. Il ne cherche pas à nier le commentaire de Sung-ki : cela serait profondément vain et même insultant pour l'intelligence de son compagnon, qui a parfaitement compris le fond du problème concernant le hockey. Pour autant, Anders ne veut pas lui faire penser qu'il est inutile et qu'il ne lui apporte rien : Sung-ki est la meilleure chose qui lui soit arrivée.

Soleil de MinuitOù les histoires vivent. Découvrez maintenant