Insondables | ˢᵗʳᵃʸ ᵏⁱᵈˢ

𝟐𝟒 : Dun Dun

Jeongin
Je comprenais maintenant pourquoi Chan arrivait au lycée en même temps que Changbin. Il vivait chez lui, puisqu'il était désormais l'opprobre de son père. Quelle honte. Quel genre de parent était-il pour ne pas accepter son enfant tel qu'il était ?

Chris ne m'avait pas tout raconté durant la fête, il était resté vague. De ce fait, il n'avait pas été lui-même, et j'avais besoin de l'entendre me le dire lorsqu'il avait toute sa tête. Je voulais savoir s'il me faisait assez confiance pour se confier.

Un étrange sentiment me submergea en songeant au fait que Chris était amoureux. Je l'ignorai, mettant ça sur le compte de la fatigue, mais je savais parfaitement de quoi il s'agissait. J'essayais juste de me rassurer.

Je m'étais pourtant promis de ne plus jamais ressentir ce genre de chose.

Aussitôt arrivé au lycée, je saisis fermement le bras de Chan, et le tirai à l'écart.

— Ok, maintenant, tu m'expliques, ordonnai-je.

Je constatai alors le teint anormalement blafard de mon Hyung, ses yeux gonflés, ses cheveux désordonnés, mais surtout, sa joue tuméfiée. Il était très mal en point ces temps-ci, et aujourd'hui semblait être bien pire que de coutume.

J'étais terriblement inquiet pour lui. J'avais un besoin irrépressible de savoir ce qui le rendait dans cet état lamentable.

— Chan ! Qu'est-ce qui t'est arrivé ?

J'avais presque crié. Je posai délicatement une main sur sa pommette boursouflée. Chris tressaillit et se dégagea immédiatement.

— C-C'est rien, Jeong...

— Ouais c'est ça, et moi je suis une idole de K-Pop. Hyung, dis-moi qui t'a fait ça !

— J-Je me suis fait ça tout seul, Jeong, balbutia le blond, t'inquiète pas...

— Maintenant ça suffit les boniments, Chan ! Ça fait deux semaines que ça dure, deux semaines que tu ne dis plus rien d'autre que des mensonges ! C'est ton père qui t'a fait ça, n'est-ce pas ?!

Mon aîné se redressa brusquement, l'ahurissement se peignant sur son visage. J'avais désormais la preuve incontestable qu'il ne m'avait pas raconté n'importe quoi.

— N-Non... qu'est-ce qui t-te faire croire ça ? s'enquit doucement Chris.

— T'étais pas très sobre samedi, Hyung.

Chan déglutit et concentra son attention sur ses chaussures.

— J-Je sais pas ce que je t'ai dit au juste, mais c'est faux.

Je m'esclaffai d'un rire ironique.

— Si tu crois que je vais gober ça, tu te fourres le doigt dans l'œil ! Je ne suis plus aussi naïf qu'avant, Hyung, je ne suis plus un gamin qu'on peut modeler à sa guise.

— J'étais ivre, Jeong, rétorqua durement le blond. Sois conscient de ça, j'avais pas toute ma tête.

— Tu veux peut-être que j'aille demander à Changbin ? Si tu veux savoir, je sais que t'es gay et que ton père ne l'a pas accepté. Je sais aussi que Binnie est au courant de cette histoire. Dis-moi maintenant Hyung, pourquoi tu ne me l'as pas dit à moi aussi ?!

— Tu n'avais pas à le savoir.

— Tu me considérais peut-être pas comme ton meilleur ami, mais on était proches, Chan. Je te faisais confiance, et je croyais que toi aussi !

— J'ai confiance en toi, Jeong, assura l'Australien.

— D'accord, alors dis-moi de quel gars t'es amoureux.

— J-Je n'aime personne...

Écumant de rage, je vis rouge.

— Tu me l'as dit toi-même, Hyung ! T'as vraiment peur à ce point-là que je réagisse mal ?! Je m'en branle de ton attirance, putain !

— Mais merde à la fin ! cria alors Chris. J'ai quand même le droit de garder ça pour moi, c'est personnel !

— Ouais, alors pourquoi tu l'as dit à Changbin ?! T'as pas d'explications pour ça, hein ?! La vérité, c'est que t'as aucune confiance en moi, Hyung.

Cela me faisait mal, très mal. Mais je me devais de l'admettre, Chris ne voyait pas en moi quelqu'un en qui il pouvait se confier.

— T'es qu'un enfoiré, Chan-ah. Ne t'avise plus jamais de m'approcher à nouveau. Dégage de ma vie.

Mon Hyung sursauta à l'entente de l'appellation irrespectueuse que je venais de tenir à son égard. Mais je m'en fichais pas mal d'être déférent, il n'était désormais plus rien pour moi.

— Jeongin, je...

— Arrêtez votre bordel et allez en cours, retentit soudainement la voix nasale de Seungmin.

Il s'était imposé entre nous deux, refroidissant ma colère. Je me saisis de mon sac et les laissai en plan.

Je ne voulais plus me frotter avec cet hypocrite. Mais je ne pouvais pas m'empêcher d'être terriblement inquiet, et de ressentir une rage folle pour le père de Chris. Ce genre de réactions me donnait des envies de meurtres.

Mon ancienne amitié avec Chan me manquait. Ses sourires faisant ressortir ses fossettes me manquaient. Ses étreintes pour me réconforter lorsque de vieux souvenirs douloureux me revenaient me manquaient.

J'avais besoin de mon Hyung dans ma vie, plus que de n'importe qui. Le voir s'éloigner de moi me brisait. Mes yeux baignés de larmes en lâchèrent finalement quelques-unes.

Me disputer avec Chan me harassait, je voulais juste savoir ce qui le tracassait, et son obstination à m'éviter n'arrangeait rien. Je ne voulais pas le voir souffrir à cause de son père. Il était ce qu'il était, il ne pouvait pas changer, mais ça, c'était apparemment quelque chose que son géniteur refusait de comprendre.

Si Chris refusait de me dévoiler quoi que ce soit, il ne me restait plus qu'une seule option.

Changbin.

Peut-être que je pourrais lui soutirer des informations. Je le cherchai du regard et l'aperçus au fond de la cour avec le châtain, Felix, je crois.

Je marchai vers lui d'un pas décidé, fermement résolu à obtenir ce que je voulais.

— Binnie ?

Le noiraud se tourna vers moi.

— Yep ?

— Dis-moi de quel gars Chan est amoureux.

Il cligna plusieurs fois des paupières, désarçonné. Felix, à ses côtés, ne réagit pas, j'en conclus qu'il devait être également au courant.

J'inspirai profondément pour ne pas laisser éclater ma rogne.

— Jeong, euh...

Changbin semblait mal à l'aise, exhalant un soupir.

— Écoute, prononça-t-il prudemment, c'est un peu... compliqué.

— Pourquoi ?

— Comment dire... Chris ne préfère pas que cette nouvelle se diffuse, donc...

— Mais merde ! Tu le sais, son père le sait, même Felix le sait ! Alors pourquoi moi pas ?! C'est quoi le problème avec moi ? Attends... Oh...

Je m'arrêtai net et mes yeux s'écarquillèrent.

Ne me dites pas qu'il...

Non, non, non, ce n'était pas possible, Hyung ne pourrait tout de même pas...

Je plaquai une main sur mon visage.

Qu'est-ce que j'étais con.

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