Chapitre 10

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Les Immortels comptaient de nombreux avantages avec leurs pouvoirs, mais l'un des plus profitables devait sûrement être la vitesse. Que ce soit loup ou vampires, ils traversaient des pays en quelques minutes, et des continents en heures, tant que la terre le leur permettait. C'est pourquoi Stanislas, sous la directive de la noiraude, décréta à sa meute qu'ils se rendraient à Lille. L'alpha ne se posa pas de question, accordant une fois aveugle à sa nouvelle protégée, mais cela le surprenait nonobstant. Qu'Irène sache parfaitement où se terrait Gabriel Eston. Il ignorait quelles villes étaient jumelées à la métropole du nord. Un détail qui paraissait incongru, et auquel personne ne s'intéressait. Personne hormis la vampire.

En fait, découvrir la position du sorcier se révélait bien sommaire. D'une part, en enlevant ses amies, il attendait qu'elle le retrouve et vienne les récupérer. Donc, il s'était basé quelque part en France, afin de lui faciliter la tache. D'autre part, Lille se jumelait avec de nombreuses autres villes. Mais, une en particulier retenait son attention. Cologne. L'endroit où ils s'étaient rencontrés lors de cette soirée, la soirée qui installa la misère dans leur vie. En effet, un détail qui paraissait incongru, et auquel personne ne s'intéressait. Personne hormis la vampire qui gardait un lien étroit avec les éléments de son passé.  

Irène et ses dorénavant alliés lycanthropes parviendraient à destination en moins d'une heure probablement et ils n'auront qu'à pister l'odeur bien spécifique d'un sorcier millénaire pour le trouver. Pendant ce temps précieux, Carline et Angelina tremblaient, surtout la brune qui  ne voyait pas sa vie s'arrêter aussi facilement, et elles patientaient, puisqu'elles se persuadaient d'un sauvetage. Elles croyaient en Irène.

- Vous signez votre arrêt de mort, mes p'tits gars ! susurra la blonde aux deux gardes en face d'elles. Notre copine, elle va venir et elle va tous vous couper en morceaux ! Commencez les paris pour désigner celui qui sera décapité en premier ! On est maybe des humaines sans défense, dont vous pensez disposer à votre volonté, les mecs ! Mais, nous, nous avons une vampire vieille de mille ans de notre côté ! Et elle vous déchiquètera !

A vrai dire, Angelina se questionnait sur ses tremblements. Avait-elle peur pour sa vie, ou pour celle de Carline si elle ne se taisait pas rapidement ? En fait, elle se porterait même volontaire afin d'écraser sa bouche venimeuse d'un bâillon. Néanmoins, il s'agissait d'un bouclier que la brune utilisait pour cacher son anxiété. Et les gardes ne semblaient pas encore excédés au point de la punir.

Heureusement, Irène parvint à vivement les rejoindre. Un entrepôt que Gabriel avait dû racheter. Lieu parfait pour kidnapper deux jeunes adolescentes mortelles qui crieraient à l'aide. Déployant les loups, la meute pénétra par toutes les portes possibles et s'attaquèrent, transformés dans leur forme lupine, aux ennemies férocement. Stanislas suivit la vampire qui se jeta la tête la première au milieu de ce piège. Ne croisant pas la moindre créature, elle avança, plus déterminée que jamais, vers la pièce d'où provenait une faible senteur humaine.

Toutefois, en entrant, elle saisit son erreur. Gabriel, ou la Trinité, peu importait qui avait réellement orchestré cet enlèvement, avait dû donner des ordres clairs. Dont, notamment, si quelqu'un venait à forcer les lignes défensives, assassiner immédiatement les deux captives. Irène aperçut à peine l'arme pointer sur le crâne de Carline et tirait, puis la nuque d'Angelina se brisait. Un vampire appuya extraordinairement vite sur la gâchette et un sorcier ôta son dernier souffle à la brune. Incapable de contenir les battements de son coeur frénétiques, ni ses quelques larmes dévastées, elle manqua de s'effondrer.

Stanislas dut intervenir à sa place. Promptement, il se changea en loup et bondit sur les deux monstres turpides qui, comme l'avait prédit Carline plus tôt, furent violemment déchiquetés.

Irène pleura ce jour-là. Mais, et c'était connu de tous, elle ne pleurait jamais. Pourtant, aujourd'hui, tandis que deux êtres vivants étaient morts à cause d'elle, de son obstination et de sa prétention à se considérer plus forte et plus rusée que Gabriel, elle échouait encore à protéger ses proches, ne laissant que le chaos. Elle incarnait en partie bien son titre. La Paix, la Guerre et la Désolation. Sans cesse à désirer la paix, mais à n'obtenir que la guerre, et à inspirer la désolation.

- Irène, il faut partir ! semblait lui crier l'alpha depuis une poignée de minutes, durant lesquelles elle fixait éperdument les corps sans vie de ses amies. Votre frustration, votre colère, votre rancune, repoussez-les dans un coin de votre esprit et battons en retraite ! Gabriel ramène de plus en plus d'adversaires et mes loups fatiguent à les maintenir hors de votre portée. Je vais vous guider dans un endroit qui n'est même pas à mon nom. Il ne pourra pas nous retrouver ! Dépêchez-vous, par pitié !

- Je n'abandonnerais par leur corps ici. Prenez-les, c'est ordre.

Le loup comprenait - ou, du moins, il le présumait - ses pensées et il accéda sur le champ à sa requête. Deux membres de sa meute se reconvertirent en forme humaine et transportèrent les cadavres jusqu'à l'extérieur. Irène s'activa pour sortir à son tour, mais un regard l'accrocha. Avec tant de véhémence, qu'elle se stoppa brutalement dans ses mouvements et que Stanislas faillit lui rentrer dedans. Pivotant légèrement, elle le perçut. Dissimulé derrière un voile ensorcelé, afin qu'elle soit la seule à le voir. Malgré la distance, il entendait tout et elle le savait.

- Il nous faut partir, Irène ! gronda l'alpha. Le temps nous fait défaut aujourd'hui, alors ne nous risquons pas à admirer la décoration, s'il vous plait ! Que regardez-vous ainsi ?

- Mon horrible rêve, mon merveilleux cauchemar, ma plus belle honte et mon pire sacrifice. En une coulée de secondes, je m'en suis voulue. Pour Carline et Angelina. Ensuite, j'ai haï Stanislas. Parce que, s'il ne m'avait pas retrouvé, ces deux pauvres humaines seraient toujours en vie. Finalement, la faute ne repose ni sur moi, ni sur lui. Mais, sur toi. Ou plutôt sur ton incapacité à contrôler tes créatures, au contraire de la Trinité qui s'impose à sa guise... Leur décès, et je le jure sur ma propre existence, je t'en tiendrais responsable. Jusqu'à la fin. Gabriel.

Stanislas, qui écoutait silencieusement, haussant un sourcil à chaque mot, comprit trop tard à qui s'adressait Irène. Celle-ci détourna son regard tempétueux et disparut dans la lumière du soleil éclatant, pendant que Gabriel demeurait dans l'ombre de son entrepôt, dans les ténèbres de ses erreurs. L'alpha ne put le remarquer, puisque le sorcier se voulait invisible à tout œil, sauf à ceux de son ancienne bien-aimée, mais l'antagoniste autorisa une larme de rage à rouler sur ses joues creusées par ses regrets. Lui aussi, il s'en tiendrait responsable.

L'Insurrection [En correction !!]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant