Le son des pas m'emplissait l'esprit, m'en donnait mal à la tête et m'obligeait à serrer les dents pour encore tenir debout. Nous traversions les couloirs, aussi silencieux que lors d'un enterrement. A vrai dire, cela n'était pas totalement faux, car beaucoup savaient que leur vie se terminerait ici, que leurs derniers souvenirs se passeraient entre ces murs froids, lors de ce moment si effrayant. Les armes s'entrechoquaient en un tintement qui faisait froid dans le dos, et les chuchotements me donnaient l'impression que les fantômes de la mort m'encerclaient déjà. Heureusement, j'avais depuis retrouvé Esmée, et celle-ci se tenait à présent à mes côtés, m'accompagnant parmi toutes ces personnes dans cette marche funèbre. Ariane, elle, avançait devant moi, et je voyais d'ici les muscles de son dos se figer après la moindre explosion.
Celle-ci s'était battue pour amener sur elle quelques-unes de ses affaires, comme son long manteau en cuir, un pantalon cargo kaki ou ses rangers. Et apparemment, sentir ces vêtements lui caresser la peau semblait lui donner un regain d'énergie. Certes, les balles pourraient plus facilement l'atteindre, mais elle avait tout de même pensé à installer quelques protections autour de ses coudes, de ses genoux, de ses mains, ainsi qu'un plastron. Et comme elle me l'avait dit il y a quelques minutes, "l'habit ne fait pas tout. Si tu sens l'adrénaline couler dans tes veines, c'est comme si les projectiles avaient soudainement peur de toi, et ils changent de direction."
Je ne la croyais qu'à moitié, mais ce dont j'étais sûre, c'était que l'adrénaline coulait bel et bien dans ses veines. Elle l'embrasait toute entière, et la faisait avancer sans un regard en arrière. A présent, les longs pans de tissu descendaient le long de son dos droit jusqu'à se percuter à ses cuisses après chaque nouveau pas, et ses bottes claquaient vivement sur les pierres à ses pieds.
Hemna et les autres avaient décidé de passer par les sous-terrains du bâtiment, et cela me faisait penser à Yann et sa fille. Ils avaient sûrement dû fouler ce sol il y a quelques minutes, et j'espérais qu'ils avaient réussi à trouver refuge. Les yeux fermés de Mila dansaient encore devant les miens, et cela me faisait réellement mal au coeur, de savoir qu'un si petit nourrisson risquait déjà sa vie, alors qu'elle avait à peine commencé. Devant moi, je vis soudain un raie de lumière blanche éclairer le visage des premiers, et je compris que nous étions enfin arrivés au bout du tunnel. La lune pointait à nouveau, et très vite, nous nous retrouvâmes tous à l'extérieur.
Le vent froid s'immisça violemment sous ma combinaison, et malgré la nuit, je pouvais voir la brume danser autour de nous, et nous brouiller la vue de son masque gris. Dehors, le son des tirs se faisait plus net, beaucoup plus clair qu'à l'intérieur de la bâtisse, et j'eus l'impression que mes tympans allaient exploser, en même temps que mon coeur, quand une bombe éclata à quelques mètres de nous. Pour beaucoup d'entre nous, notre réflexe fut de se protéger la tête et de plonger vers le sol, mais les mentors devant nous nous intimèrent de nous relever. Autour de nous, nous voyions plusieurs maisons léchées par les flammes, noires de poussière et proches de l'écroulement.
Ce paysage était aussi spectaculaire qu'effrayant, et je parvins à discerner quelques larmes discrètes sur les joues de nombreux soldats. Ceux-ci devaient sûrement être accablés par toute cette violence inexpliquée, ce chaos indescriptible, et j'en faisais partie.
Après cette péripétie, nous continuâmes à marcher en cadence, priant pour ne pas se prendre un quelconque débris sur la tête, et accélérant pour éviter toute cette mascarade. Par de nombreux gestes de bras, les soldats confirmés nous indiquèrent le chemin pour retrouver les vaisseaux qui allaient nous transporter jusqu'au champ de bataille. Nous nous mîmes alors à courir dans l'obscurité, nous guidant grâce aux cris de chacun perdus dans la nuit. Soudain le mot "Attention !" se fit entendre à plusieurs reprises, chargé d'angoisse, et j'eus le temps de relever le menton pour apercevoir un nouvel obus, qui s'écrasait lourdement en direction du bâtiment gris.
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Sur une autre planète
Science Fiction"La vie sur Terre est un combat permanent pour ne pas sombrer, mais je ne pensais pas que la vie sur Vivia en serait un nouveau, tout aussi différent..." Depuis mon arrivée sur Vivia, planète qui m'était jusqu'à maintenant inconnue, je redoute chaqu...