1 KYLE

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Il est temps. Les combats s'enchaînent et c'est bientôt le mien. J'y suis préparé, à vrai dire, je m'y destine même depuis un long moment. J'ai effectué mon premier combat y'a une semaine, mon deuxième aujourd'hui. Mon corps me fait encore affreusement mal. Ils n'y vont pas de mains mortes. Moi qui pensait au début que c'était juste des petits combats, ce n'est pas le cas du tout. Au contraire, la plupart sont des professionnels, ils exercent les sports de combats depuis des années et viennent ici pour avoir un petit surplus de salaire. Je ne suis pas venu pour ça, même si c'est toujours intéressant d'avoir dédommagement financier. Le reste de la semaine, je suis venu tous les soirs. J'ai appris des tonnes de techniques rien qu'en regardant la défense des adversaires, leurs contre-attaques etc... Je suis prêt, 100 % prêt. La technique n'est pas ma priorité. Je veux juste donner les coups, et même les recevoir, après tout je le mérite bien. Je mérite pire.

- Et maintenant, faisons place à Freefy. La semaine dernière il a été K.O mais pour une première il s'est extrêmement bien défendu, vous n'êtes pas d'accord ?!

Et la foule se met à hurler en accord avec l'organisation de ce show. On se trouve dans un hangar abandonné, du moins ça a tout l'air, étant donné que les combats sont illégaux, vaut mieux être à l'abri des regards prêt à balancer les faits. Freefy est mon surnom sur le ring, je devais en trouver un rapidement avant de monter, personne ne doit connaître notre vrai nom, c'est une des premières règles qu'on nous donne. J'ai prononcé Freefy sans savoir de quoi ça résultait. Ça a l'air de plaire donc c'est le principal. Puis je m'en fou. Ce n'est pas qu'un surnom. Je suis là pour des choses bien plus importantes.

Ici les combats se font à mains nues. Je retire mon t-shirt et garde juste mon short. Quand je monte sur le ring, les gens se mettent à hurler. Mon adversaire se tient devant moi et je sens que ça va être spectaculaire. Je ne l'ai jamais vu combattre. Mais d'après ce que j'ai compris, ce n'est pas sa première fois. Son corps est net contrairement au mien. J'ai des hématomes et des plaies partout. J'ai du mal à sentir mes phalanges tellement les coups ont déjà fusé. Mais je ne reculerais jamais.

C'est alors que l'animateur, Djue, lance le départ. Les spectateurs deviennent sérieux entre deux encouragements. Les paris sont déjà lancés. Et le premier coup m'atteint au visage. Je suis à peine sonné. Il envoie du lourd en effet, je n'ai pas une couille molle en face de moi.

Quand je me relève, frottant ma lèvre déjà en sang, je vois le visage d'Ivy. Elle apparaît sans cesse depuis l'accident, notamment pendant les combats et tous les autres moments où je suis face à moi-même. Comme là, où j'encaisse les coups pour me punir, pour me rappeler à quel point j'ai foiré et également pour démolir le démon qui a en moi.

Je donne le second coup et il riposte à la vitesse de la lumière, c'est maintenant que ça va devenir intéressant. Les coups fusent et les cris se perdent tout autour de nous. Ma tête me fait déjà mal. Je lui redonne un coup direct dans la mâchoire pour enchaîner avec des coups appelés cross, aussi direct mais plus puissant.

Mais le visage d'Ivy m'empêche de me concentrer et c'est l'erreur. Il en profite pour me faire l'équilibre, je tombe à terre et c'est lui qui a la main sur moi. Il me bloque avec ses jambes pour me balancer des dizaines de coups dans la gueule. Je sens déjà le goût du sang dans la bouche qui me brûle également la gorge. Je reprends le contrôle en me dégageant avec mes jambes et avec la force qui me reste. Mes membres sont complètement endoloris mais ici, on ne cesse jamais les combats. On doit mettre l'adversaire K.O. Je lui renvoie plusieurs crochets et quand il s'abaisse un quart de seconde, c'est avec un descendant que je termine mon adversaire. Il se claque contre le sol, épuisé. Il ne se relève plus. Et quand l'animateur annonce la fin du combat, tout le monde se met à hurler mon nom en plus des applaudissements. Djue monte sur le ring pour me lever le bras vers le haut. Les cris résonnent dans ma tête tels des percussions. Faut que je sorte très vite d'ici sinon je vais exploser.

Je descends du ring pour me diriger dans la pièce qui nous sert de vestiaires. Devant le miroir, je ne me reconnais plus, mon visage est maculé d'un sang épais. Ça ne cesse de couler, je suis sûr d'avoir déjà perdu un litre. Mes poings sont dans un sale état, la douleur me réveille quand je bouge à peine mes doigts. Je prends une douche et me change avec le peu de force qu'il me reste. Je vais voir celui qui surveille les paris.

- Tiens Freefy. 250 dollars. Et plus tu combattras, plus tu gagneras. Il faut te faire connaître.

Il me tend la liasse de billets et je suis plutôt satisfait. Bientôt, je pourrais accumuler les combats dans la même soirée. Je sors du bâtiment en esquivant les spectateurs qui hurle mon nom. Putain, ils sont fous eux, plus fous que nous.

Je regagne ma voiture et quand je regarde mon téléphone, j'ai 2 appels manqués de Scott et 5 de Lexie. On dirait qu'il pense que je n'ai aucune vie à part eux. J'envoie un message en leur disant que je suis occupé, que je n'ai pas le temps de passer les voir. Lexie a changé mais elle est toujours aussi envahissante, même encore plus, elle m'étouffe. Et si elle ne se calme pas, je vais encore devoir hausser le ton et la blesser. Je n'en ai pas envie, mais si c'est la seule solution, je n'hésiterais pas. Scott, quant à lui, il se sent obligé de me surveiller depuis cette fameuse soirée, se sentant aussi coupable que moi. Mais bordel tout est de ma faute !

Je reste assis devant le volant me remémorant les premiers souvenirs avec Ivy. Notre rencontre qui a été chaotique, à cause de moi encore une fois. Si je n'avais pas été aussi con, j'aurais profité d'elle plus longtemps encore. Peut être même que cet accident ne se serait jamais produit. Je donne un grand coup dans le volant avant de démarrer et de souffler. Après un bonne bataille, on laisse place à un excès de vitesse pour reprendre son esprit. Je sors du parking et passe de 0 à 100 km/h en quelques secondes. J'entends des coups de klaxon mais n'y prête pas plus attention.

Après avoir roulé pendant plus d'une heure pour me changer les idées, je rentre à la maison. Evidemment, James m'attend dans la cuisine impatiemment.

- Tu étais où Kyle ?

- Depuis quand ça te préoccupe ? Putain James, tu m'as toujours laissé libre de faire ce que je voulais, pourquoi ça changerait ?

- Seulement si tu me dis où tu vas et ce que tu fais, l'un ou l'autre, mais là rien !, hausse-t-il le ton pour montrer le peu d'autorité qu'il a sur moi.

- C'est bon, je ne suis plus un gamin.

- Non Kyle, en effet, alors arrête de réagir comme tel.

Furieux, je serre les poings. Ce n'est vraiment pas le moment.

-Et c'est quoi de tout ça ? Tu t'es encore battu ?, reprend-t-il quand il se concentre enfin sur mon visage.

- Il ne portera pas plainte si c'est ça dont tu as peur.

- Non, j'ai peur pour toi, je m'inquiète Kyle, tu dérapes.

- J'ai toujours été le même, ne fait pas le choqué parce que je reviens avec deux, trois hématomes en plus que d'habitude.

- Non, tu allais beaucoup mieux depuis...

- Quoi ?!, m'énervé-je fou de rage. Ivy ?!

Ce n'est vraiment pas le sujet à aborder.

- Je t'interdis de parler d'elle c'est bien compris ?

- Il va bien falloir Kyle, c'est la cause de ton changement. Je sais que tu en souffres, parle moi, me lance-t-il alors que j'ai déjà tourné des talons pour monter dans ma chambre.

Une fois que je claque la porte assez fort pour que les voisins l'entendent, je balance mon poing, du moins ce qu'il en reste, dans le mur. Une fissure fait son apparition.

- Putain, fais chier, murmuré-je presque.

Je tombe de fatigue sur mon lit et fait joindre mes mains à mon visage désespéré. Je n'arrive plus à tendre mes doigts normalement sans que la douleur m'assaillit. Je me relève pour prendre une bouteille de whisky planqué dans mon armoire et file dans la salle de bain. Je laisse couler de l'alcool sur les plaies de la main, la douleur est vive mais je sais que ça finira par faire du bien. Je retourne sur mon lit et me vide la bouteille jusqu'à ce que mes yeux se ferment sans difficulté.

Heart or reason 2Où les histoires vivent. Découvrez maintenant