7. Honor

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En moins de cinq minutes, c'était au bas mot la vingtième fois que j'essuyai mes paumes à même mon jean. J'avais chaud. J'étais stressée. C'était le cas de le dire.

J'avais une boule qui obstruait ma gorge et le cœur qui battait sourdement dans ma poitrine. Le tempo se répercutait à peu de chose près dans chaque os qui constituait mon corps. Une sensation nettement désagréable, mais qui me rappelait les démons de mon passé, si ce n'est ceux du présent.

Je devais penser aux priorités. De celles que j'avais ignorées pendant des siècles. De celles que j'avais préféré me débarrasser. Sans retour en arrière possible. Du moins, c'est ce que j'avais cru jusqu'à ce que ce garçon – cet homme – ne m'apparaisse. Et me renvoie ma décision comme un coup de crocs bien placé.

Son arrivée dans ma vie n'était pas une coïncidence. Sharan avait des plans pour chacun d'entre nous, n'est-ce pas ? Elle mettait des âmes sœurs pour chaque loup, elle nous veillait, aussi loin qu'elle se trouvât. C'est ce que j'aimais à penser. Ce qui me permettait parfois de mieux respirer. Les humains pensaient à Dieu, nous, loups, c'était à Sharan. Notre Mère à tous. La grande Shaman. Je n'étais pas croyante au point de voir Sharan partout, mais il y avait des signes qui ne trompaient pas. Qui ne pouvaient pas.

Des coups à la porte. Je sursautai. Je me tournai et Brielle me sourit.

— Tu avais l'air un peu dans la lune.

Je passai ma paume sur ma nuque et grimaçai quand j'en sentis la moiteur. Je soupirai et me tournai de nouveau vers le lavabo et y appuyai mes mains. Un peu dans la lune ? C'était un sacré euphémisme si vous vouliez mon avis. J'étais des crans au-dessus.

— Je ne sais pas quoi lui dire. Je ne sais même pas comment... je dois me comporter ! C'est bien beau de s'occuper d'enfants abandonnés si je suis incapable de faire face à...

Ma progéniture ?

Mon fils ?

Comment est-ce que j'étais censée nommer ça ? Ne pas le savoir faisait-il de moi un monstre ? J'avais abandonné cet enfant. Je... quel droit avais-je de pouvoir faire partie de sa vie après un tel choix ? Qu'étais-je censée lui dire ? Qu'il était né d'un viol ? Aucun enfant ne devrait avoir à entendre une telle chose. Aucun. Parce que c'était un poids trop lourd à porter. Une vérité avec laquelle on ne pouvait pas toujours vivre. Moi-même n'aurais pas voulu savoir, mais je n'étais pas vraiment la mieux placée pour décider à la place de...

— Il n'y a pas de mode d'emploi pour ça, Honor. On peut choisir de devenir parent. Mais finalement, on le devient au contact de l'enfant. On apprend à composer avec une part de soi, on apprend à lui donner de l'amour et de l'affection et à lui montrer que même si on tombe durement, il y aura toujours moyen de se relever. Tu n'es pas sa mère, Honor. Mais tu peux le devenir.

Donner naissance à un enfant ne faisait pas de nous des parents. L'éduquer, l'élever, c'était ça qui nous hissait à ce statut. Après tous les petits que j'avais vu défiler ici, j'en savais quelque chose. J'en avais même plus qu'une simple idée.

Je n'avais jamais jugé les femmes qui prenaient la décision de m'abandonner leur chair. Mais moi, je me jugeai. En voyant l'homme qu'était devenu ce petit bébé que je n'avais pas oser tenir dans mes bras, je m'en voulais. Je m'exécrai et rien, absolument rien ne pourrait m'ôter cette impression.

— M'excuser n'aurait aucun sens pour lui, soufflai-je. Brielle, je... je ne sais pas si...

Ma deuxième posa ses deux mains sur mes joues, bien à plat. Elle me sourit et c'était si tendre et si doux à la fois que j'eus envie de pleurer. Sans raison. Enfin, il y en avait tellement !

DE SANG ET D'ARGENT T7 Half of a man [Terminée]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant