Chapitre 1

95 7 0
                                    

Encore une salle triste. Des murs inexorablement blancs malgré les nombreux posters et dessins colorés affichés. Des meubles gris et métalliques sûrement achetés pour pas cher. Mais le plus triste dans cette salle, c'est ma mère, qui a fondu en larmes avant même le début du rendez-vous, et dont la demi-heure de maquillage quotidienne est définitivement réduite à néant. Les cheveux en pétard après deux jours sans prendre soin d'elle, elle me fait vraiment pitié, même si c'est elle qui devrait me soutenir et non l'inverse.

Aujourd'hui, après deux jours dans ma chambre des urgences de l'hôpital, on va m'annoncer les résultats de mon IRM. Vue la mine du médecin qui nous reçoit, je ne suis pas près de sortir. Au moins, une fois que j'aurai ma propre chambre, mes potes pourront venir me voir, ça me changera de ma mère, que j'adore mais qui pleure vraiment trop. 

 - Je suis désolé Madame, commence le médecin.

A peine a-t-il commencé que je le coupe :

 - Je n'ai plus dix ans, vous pouvez me parler directement.

 - Oui, désolé Arthur, s'excuse-t-il.

Quel hypocrite !

 - Je m'appelle Evan.

 - Oh ... Bon, reprend-t-il après un petit silence, je suis désolé Evan mais nous ne savons toujours pas ce que tu as.

Ma mère éclate en sanglots de plus belle. Moi je ne réponds pas. A quoi ça sert ? Et soudain je réalise ...

 - Mais c'est génial, je vais pouvoir sortir vu que j'ai rien !

 - Non, pas vraiment. Nous ne savons pas ce qui t'arrive, mais ton insuffisance cardiaque reste importante et vu ce qu'elle a causé ...

Frisson général. Enfin ma mère et moi frissonnons, parce que Docteur Hypocrite voit des gens comme moi tous les jours.

 - Vu ce qu'elle a causé, tu restes en observation en service cardiologie. Tu es officiellement un patient de l'hôpital Albert Ruffman.

Je soupire alors que ma mère commence à discuter des modalités avec le médecin. Et quand je dis discuter, je veux dire qu'elle tente de faire comprendre à ce pauvre homme les paroles qu'elle bafouille entre deux pleurs. 

Je me lève et vais à la fenêtre. Tous ces gens à l'air pressé dans la rue, qui marchent, écoutent de la musique, discutent et rient ... Est-ce que je pourrai les rejoindre un jour à nouveau ? Ou est-ce que je suis destiné à moisir dans ce fichu hôpital ? Je suis ici depuis à peine deux jours, mais ils m'ont paru comme autant de siècles. 

Au moins, en service cardiologie, Nadel et Lassana, mes deux meilleurs potes et coéquipiers en basket, pourront venir me voir. On se connait depuis le primaire, au grand malheur de nos parents puisque notre amitié nous a poussés à faire tellement de bêtises et enfreindre tellement de règles qu'ils s'en arrachaient les cheveux. Nous avons été dans la même école primaire, le même collège et maintenant le même lycée.

On est un peu le trio infernal, solidaires quoi qu'il arrive. A trois, on forme le triangle, la figure la plus solide existante. Et en ce moment, j'ai vraiment besoin du soutien de ce triangle.

Nos cœurs capricieuxOù les histoires vivent. Découvrez maintenant