J'émerge lentement de mon sommeil cotonneux. Je ne veux pas me réveiller. Je suis bien là, j'ai beau me souvenir de tous les problèmes que j'ai, je ne suis pas stressé. Sortir de cette bulle semble trop douloureux, trop compliqué. Et pourtant c'est ce qui est en train d'arriver.
Je me réveille et ouvrir mes yeux me donne la sensation que des milliers de bouts de verre pénètrent ma chair à chaque nouveau millimètre de visibilité. J'ai l'impression qu'à mesure que je reprends conscience la pesanteur augmente jusqu'à devenir insupportable.
Dès que mes yeux sont complètement ouverts j'entends des exclamations, de petits cris de bonheur et de surprise.- Je vous avais dit que ça marcherait.
C'est la voix d'Adina. Curieux de savoir qui est dans la pièce, j'entreprends de me redresser, geste interrompu par la vision de l'Inconnue.
- Hey mec va pas nous faire une autre crise cardiaque.
- Crise cardiaque ? J'ai fait une crise cardiaque ? Pourquoi ? Et comment vous l'avez amenée ici ?
- Bon tu vas te calmer maintenant ? On va t'expliquer mais il va d'abord falloir se calmer si tu veux pas que les toubibs se ramènent. Elle a pas le droit d'être là je te signale.
- Si on veut éviter les médecins, on ferait mieux de partir en vitesse. Ils sont avertis quand notre rythme cérébral change.
C'est la première fois qu'elle parle depuis que je me suis réveillé. Sa voix est très douce mais à la fois sûre d'elle. Elle sait ce qu'elle dit. De près aussi, cette aura de timidité se dégage. Ou peut-être que j'hallucine à cause des médicaments. Ça ne m'empêche pas de l'observer plus en détail que je n'ai pu le faire avant. Elle est bien plus mince qu'elle n'en avait l'air de loin, je dirais même maigre mais je n'aime pas ce mot. Après tout chacun son physique. Elle a l'air toute frêle, comme si la moindre brise pouvait l'emporter.
- Ok petit génie, reprend Adina, me tirant de ma rêverie. Bon bah on se casse.
- Je peux partir toute seule comme ça vous passez quand même du temps avec lui. Vous n'avez plus besoin de moi de toute façon.
De quoi elle parle ? J'ai l'esprit embrouillé, j'ai du mal à réfléchir. Je n'ai pas le temps de lui poser de questions, elle part déjà en courant. Ensuite Adina et Clément m'expliquent leur plan fou pour me réveiller, le plus surprenant est qu'il a marché ! Puis les médecins arrivent, vérifient mes constantes, me débranchent de tous les appareils qui s'assuraient de ma vitalité jusqu'ici. Après environ une heure ma mère débarque en pleurs. Je me demande combien de temps j'ai été inconscient pour qu'elle se mette dans cet état. Quoique rien que la crise cardiaque a dû la chambouler au plus haut point.
D'ailleurs moi aussi. Rien que le fait de penser à ce qui est arrivé me donne un nœud à l'estomac. J'aurais pu mourir. Encore.
Après cinq heures le Docteur Viveleretard daigne se présenter. Bon d'accord, on m'a dit qu'il était en pleine opération, c'est pardonnable. Bref, il m'annonce sans surprise que je vais encore rester à l'hôpital un bout de temps, surtout qu'après ma biopsie la tumeur s'est révélée cancéreuse. J'ai officiellement un cancer du poumon.Deux jours plus tard je suis dans ma nouvelle chambre en section cancérologie. Je dois passer voir Clément pour lui dire que j'ai été déplacé ici mais je ne maîtrise pas trop le fauteuil roulant alors il devra attendre. Entre temps je m'informe un peu sur le cancer du poumon, les traitements. Le seul problème c'est que je n'ai pas retenu les détails que le médecin a donné parce que je ne retiens pas ce que je ne comprends pas. Il faudra que je lui parle.
Trois nouveaux jours sont passés. Je peux de nouveau marcher et j'ai pu discuter avec Clément et Adina, qui ne m'apprécie décidément pas. Ils m'ont beaucoup parlé de Siam, puisque tel est le nom de l'Inconnue qui n'en est plus une, principalement parce que je leur ai posé des questions sur elle. Ils m'ont dit qu'on ne pouvait pas aller la voir parce que son nombre de visites est restreint.
Elle est anorexique, du moins c'est là qu'est sa chambre. Selon Adina, après être sortie de ma chambre le jour où je me suis réveillé, elle a passé l'heure qui lui restait avant de devoir retourner dans sa chambre à faire des allers-retours en courant dans les escaliers. Comment une personne comme elle peut douter une seule seconde par rapport à sa beauté ?
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Nos cœurs capricieux
RandomEvan est un adolescent normal. Il a des rêves plein la tête, des tonnes d'amis, et le mental d'acier qu'il garde sur le terrain de basket lui promet un brillant avenir. Jusqu'à ce qu'il n'en ait plus. Après deux jours à l'hôpital, Evan s'ennuie plus...