Chapitre 5

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 - Coucou mon chéri ! Comment ça va ?

 - Je suis à l'hôpital. Pourquoi ?

 - Tu pourrais éviter de t'arrêter à ça ?

 - Comment ? Je suis cloitré dans ma chambre et tu viens de moins en moins me voir.

 - Je suis désolée, j'ai beaucoup de travail. J'essaierai de venir plus souvent. Et tes amis alors ? Ils ne sont pas passés te voir ?

Mieux vaut rester silencieux, ça m'évitera de montrer à quel point ça me touche. En fait ma mère est la seule à être venue me voir depuis que je suis à l'hôpital. 

 - Bon, alors quoi de neuf ? Je vois que tu as de nouveaux médicaments. Tu as vu le médecin ? Et est-ce que tu t'es fait des amis ?

 - Oui j'ai été au rendez-vous parce qu'on ne pouvait pas l'annuler même si tu n'es pas venue. Et pour ce qui est des amis, j'aurai le droit de sortir dans ma chambre quand on aura les résultats des derniers tests pour être sûrs que je n'ai pas une maladie infectieuse qui pourrait contaminer les autres.

 - Super. On croise les doigts alors.

Elle a l'air stressée. Elle a envie de me dire un truc, ça se voit.

 - Et donc il ne s'est rien passé d'intéressant ? Rien du tout ?

 - Bah ... Si il y avait cette fille bizarre qui m'a fixée pendant ... Je sais pas pendant combien de temps mais c'était plutôt long.

 - Elle était jolie ?

 - Maman !

Et voilà, on rit de nouveau. En y réfléchissant, ma relation avec ma mère est plutôt tendue depuis quelques années. Tout le monde me dit que c'est l'adolescence mais ce qu'ils ne savent pas, à part Nadel et Lassana évidement, c'est que ça a commencé à empirer quand j'avais dix ans. 

On discutait normalement autour de notre plat de pâtes, à midi, on parlait de ma semaine de cours. Ma mère essayait désespérément de comprendre ce qui m'avait poussé à me battre avec l'un de mes meilleurs amis de l'époque, et cette fois j'ai répondu, posant la bombe qui ferait sauter notre bonne entente.

 - Il a dit que Papa était parti parce qu'il me trouvait trop nul et qu'il voulait pas s'occuper de moi. Et il a dit que toi tu restais avec moi juste parce que t'étais obligée.

Le problème, c'est qu'à ce moment-là, elle n'a fait que déculpabiliser mon père mais elle n'a absolument pas nié qu'elle se sentait simplement obligée de m'élever. Aujourd'hui je lui en veux encore mais pas vraiment pour ça. Je pense que c'est surtout parce qu'elle n'a pas essayé de me donner même l'illusion d'une famille normale.

 - Evan ? Tu as l'air pensif ... Je suis sûre qu'elle était très jolie, cette fille.

 - Pas du tout. Rien qu'en la voyant, j'ai su que c'était le cliché de la fille timide.

 -Et alors, ça ne l'empêche pas d'être jolie si ?

 - Maman arrête avec ça. 

Heureusement pour moi, cette conversation gênante prend fin quand un infirmier entre dans ma chambre et nous demande de le suivre. Les résultats des derniers tests sont sûrement arrivés.

 - Ce n'est pas une maladie infectieuse, déclare le médecin quelques minutes plus tard après les courbettes habituelles.

Je peux enfin sortir de cette fichue chambre ! J'en pouvais plus de rester seul, enfermé. Après, ça veut aussi dire qu'on ne sait pas ce que j'ai. Peut-être qu'un jour ils comprendront que c'est rien et qu'ils me laisseront sortir.

Nos cœurs capricieuxOù les histoires vivent. Découvrez maintenant