- Bonjour Siam. Comment tu vas ?
Je hausse les épaules, je préfère ne pas parler quand mes parents sont là. De toute façon, je n'arriverais même pas à enchaîner deux mots. Les deux adultes me foudroient du regard, déçus d'avoir à perdre une heure de travail à cause de leur fille. La psy, en face de moi, me regarde avec compassion.
- Tu pourrais être plus expressive ? Qu'est-ce que ce haussement d'épaule veut dire ?
Je répète le même mouvement, pas décidée à user mes cordes vocales. Je ne comprends pas pourquoi elle continue à essayer de me faire parler pendant les rendez-vous bilan.
- Comment ça va depuis la dernière fois ? La rentrée s'est bien passée ?
Encore une fois, je lève les épaules avant de les laisser tomber nonchalamment. En ne répondant pas, peut-être qu'elle en viendra au fait. SI elle veut que je parle, elle attendra que mes parents soient partis.
- Tu te souviens qu'on avait dit qu'après la rentrée, on fixerait des rendez-vous une fois par semaine. Tu es toujours d'accord ?
Je hoche la tête, ma première réponse un peu précise depuis le début de rendez-vous.
- Parfait. Bon ... Je vais avoir besoin de m'entretenir seule avec Siam puis on fera l'inverse, je discuterai seule avec vous. S'il vous plait.
Elle leur fait un simple signe de main vers la porte et ils se lèvent. Cette femme a une autorité douce qui défie toute la fierté de mes parents. Elle m'impressionne honnêtement quand je vois l'imposant corps de mon père se lever de sa chaise sans une once d'amertume. Une fois la porte fermée derrière mes géniteurs, elle se cale confortablement dans son siège à roulettes et me lance un regard équivoque, m'invitant à raconter ma rentrée
- Tout s'est ... Bien passé. Je crois ... Je me suis fait un ami, Titouan, mais je pense que c'est fini parce que j'ai brisé son rêve d'être délégué à cause de mes parents. Mais au moins grâce à lui, j'ai beaucoup d'amis par procuration. Ou au moins des gens qui connaissent mon nom. Le problème c'est que je ne suis pas sûre que ce soit une bonne chose, ce qui est en soi une mauvaise chose. Et puis il y a cet hôpital devant lequel je passe tous les soirs et c'est ... Je sais pas. Dernière chose dont le dois parler, il y a quelques jours j'ai fait une crise de panique et c'était ... Horrible. Une de celles qui paralysent.
Elle hoche la tête et passe encore quelques secondes à peaufiner les notes qu'elle a prises pendant que je parlais.
- Qu'est-ce qui te faisait angoisser ? La rentrée ? les problèmes avec Titouan ? ou encore autre chose ?
- Un peu de tout je suppose. C'est juste que c'est compliqué de vivre comme si ... Comme si de rien n'était. De réduire les dernières années à un sombre souvenir.
- Tu te sens mal parce que les gens n'ont pas pitié de ton passé ou de ta situation. Les gens autour se comportent comme si rien ne s'était passé mais toi, tu as encore l'impression d'y être.
- Je ne veux pas que les gens aient pitié de moi, c'est juste que ...
- Peut-être pas à ce point-là. Mais ça te plairait que les gens se sentent obligés de prendre des pincettes avec toi.
- Un peu ...
Là ce n'est même plus lire dans les pensées, c'est analyser un processus inconscient. J'ai même presque peur. En tous cas, elle fait bien son métier.
- Ce que je retiens, c'est que cette rentrée est plutôt positive, non ? Tu t'es fait des amis, à en croire le compte-rendu de tes parents tes résultats sont excellents pour un début de première puisqu'ils les ont jugés ''tout juste satisfaisants''.
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Nos cœurs capricieux
RandomEvan est un adolescent normal. Il a des rêves plein la tête, des tonnes d'amis, et le mental d'acier qu'il garde sur le terrain de basket lui promet un brillant avenir. Jusqu'à ce qu'il n'en ait plus. Après deux jours à l'hôpital, Evan s'ennuie plus...