Un hurlement strident résonne dans mes oreilles et m'arrache d'un sommeil difficilement trouvé, je me redresse sur mon matelas et sers ma couverture contre moi. Mon regard s'affole dans la pièce plongé dans le noir jusqu'à ce que mon cerveau reconnaisse la sonnerie de mon téléphone.
La musique infernale s'arrête quand j'attrape l'appareil d'une main moite. Je laisse mon cœur reprendre un rythme normal avant de le déverrouiller et d'aller voir qui m'appelle à trois heures du matin.
Mon cœur ralenti dangereusement lorsque je vois qu'il s'agit d'un numéro inconnu. Il n'existe pas dix mille personnes susceptible de m'appeler à cette heure-ci et étrangement, c'est le genre de personne avec lesquelles je ne veux rien avoir à faire.
Alors que j'essaye de relativiser, qu'un simple numéro de téléphone ne conduisait pas jusqu'à ma porte d'entrée, l'engin de malheur se remet en marche, remplissant tout le silence d'un bruit sourd.
J'ai mal aux oreilles, il faut que ça cesse.
En temps ordinaire, j'aurais simplement balancé mon téléphone à travers la pièce, et puis je me suis souvenue.
Je ne suis plus seule maintenant, j'ai des amis.
Et s'il était arrivé quelque chose ?
Alors que l'écran de mon téléphone s'éteint pour la deuxième fois, je m'empresse d'appuyer sur le bouton rappelé, me rongeant les ongles dans la crainte d'entendre une voix connue.
- Allo ? Naesil ? Dieu merci, tu réponds enfin !
Mon cœur s'arrête définitivement lorsque je reconnais la voix cassé de Chan. Il ne va pas bien.
Il est arrivé quelque chose.
- Il y a eu un accident... Hôpital... Voiture... Jisung... Viens.
Alors qu'une vague de mot continue de couler à flots depuis l'autre fil, je raccroche et tout devient automatique, comme bien souvent. Je me lève, sors de mon lit et enfile un pull au-dessus de mon pyjama. Un pied, puis l'autre et je suis chaussé. D'une main blanche, j'attrape mes clefs et quitte l'appartement.
Dehors, il fait tiède, la nuit n'est pas ce qu'elle est ordinairement. Elle est lourde ce soir, elle pèse sur mes épaules et sur mes doigts qui tentent tant bien que mal à détacher l'anti-vol de mon vélo.
J'aurais voulu qu'il pleuve pour que mes joues goûtent à l'humidité qu'elles méritent. Parce qu'en me mettant en route pour l'hôpital de la capitale, je n'avais qu'une envie, c'est de pleurer. J'ai été faible, j'ai laissé quelqu'un entrer dans ma vie et c'est cette même personne qui en paye les frais, jamais moi et pourtant, c'est bien moi qui suis incapable de verser une larme.
Mon vélo semble connaître la route jusqu'aux urgences bien mieux que moi, car rapidement, la lumière bleue des gyrophares vient brûler mes yeux encore gorgés de sommeil. J'abandonne ma bicyclette contre un lampadaire et suis mes pieds jusqu'à l'intérieur.
Les néons éblouissement douloureusement alors qu'une bouffée d'air frais vient me frapper les joues. Je dois me retenir une seconde pour ne pas sombrer alors qu'une fatigue sans pareille se fracasse contre mon front.
Et d'un coup, la fatigue est remplacé par des haut-le-coeur, la lumière ne devient plus du tout une gêne et mon sang se met à battre dans mes tempes alors qu'un souvenir, fugace, s'empare de moi.
"Alors reste loin de moi si tu ne veux pas finir sous les roues d'un poids lourd."Je porte une main tremblante contre ma bouche et l'autre sur mon ventre, espérant pouvoir garder mon estomac à sa place. Je titube, à la recherche d'un appui quand quelque chose m'attrape, me retiens pour ne pas que je tombe. Deux mains puissantes, tentant de me garder à la surface et alors, la même voix résonne dans mes oreilles, cette même voix cassée, mais étrangement beaucoup moins plaintive que dans mes souvenirs. Ai-je rêvé de l'urgence de la situation ?
- C'est de ma faute, je le savais, ça devait arriver. Dis-je avant qu'il n'ait le temps d'admettre quoi que ce soit, je préfère que ces accusations viennent de moi plutôt que de lui.
- Ils vont bien, tu n'y es pour rien d'accord. Répond Chan d'une voix douce. Mes épaules se mettent à trembler à leur tour et sa prise se fait plus forte, comme s'il voulait que je reste droite, en un seul morceau.
- Non, ça arrive tout le temps, c'est moi, ils sont en danger à cause de moi, j'avais prévenu Jisung, il savait que s'il restait près de moi ça allait finir comme ça...
Ma voix se perd dans un tourbillon dans lequel je me noie et Chan doit me secouer un bon coup pour récupérer mon attention. Il plante ses iris sombres dans les miennes et me demande de calquer ma respiration sur la sienne avant de reprendre d'une voix claire :
- Le mec qui les a percutés travaille pour une grande agence de musique, d'accord ? Et si on accepte de ne pas porter plainte, il s'engage à nous laisser sa chance après avoir entendu l'une de nos mixtape, cet accident, c'est notre chance Naesil.
Je ne tremble plus et pourtant, je sais que si Chan retire ses mains de mes épaules-là, maintenant, je m'écroulerai sur le sol aseptisé des urgences. Chan me répète sa dernière phrase au moins cinq fois, avant que l'information ne soit acceptée par mon esprit malade.
Ils vont bien. C'est leur chance.
Quand je m'en sens capable, je fais signe au brun de me lâcher ce qu'il fait sans discuter. Sans que je ne lui demande, il me désigne le chemin vers le lit de Jisung et, en pilotage automatique, je me mets en route.
Mes yeux rencontrent les deux autres blessés sur ma route. Félix est assis sur le lit de Seugmin, abordant une attelle au poignet gauche, mais surtout un immense sourire pour son ami qui lui, montre fièrement ses trois points de suture à son arcade droite. Ils rient, j'entends leurs rires dans mes oreilles, il n'y a qu'eux et étonnement, ils soulagent mon cœur d'un certain poids.
Je continue ma route jusqu'au prochain lit, séparé du reste des urgences par un fin rideau blanc et là, mes jambes s'arrêtent, me rendant la totale liberté de mes gestes.
Je reste figé, mes doigts à quelques millimètres du rideau, seulement à un cheveu du lit comportant le dernier blessé.
Et s'il était plus grièvement blessé ? Et si Chan avait tort ?
Mon poing se referme et je m'apprête à faire demi-tour quand une silhouette traverse la barrière blanche.
- Oh, Naesil !
Je lève les yeux et découvre le visage souriant de Minho. Il pose une main amicale sur mon épaule avant de se volatiliser, me laissant seule une fois de plus.
- Je te laisse la place, je crois qu'il veut te voir. Souffle encore sa voix alors que ma main s'est refermée sur le rideau.
Je me concentre et cherche les dernières forces, je puise au plus profond de mon être et entre, la tête tournée vers mes pieds comme effrayées par une réalité qui, je le sais, va être douloureuse.
Méthodiquement, je prends le temps de refermer le rideau, restant bien dos au lit avant de me retourner vers l'endroit où je le sais, doit me fixer un certain blond. Je croise les doigts pour que ses yeux pétillent toujours autant et que la même malice habite toujours son visage même si je suis trop lâche pour le vérifier moi-même.
- Lève la tête Naesil.
Je secoue la tête et me contente d'essuyer mes mains moites sur mes cuisses, étrangement, j'ai l'impression que tout l'air du dehors est rentré avec moi et à eue raison de la climatisation.
D'une oreille distraite, j'entends le bruit familier du froissement des draps quand on s'en extirpe. Des pas timides s'approchent de moi juste avant qu'une main froide se saisisse de la mienne.
Je ne respire plus.
De son autre main, Jisung me force à lever les yeux en déposant sa fraîcheur sur ma joue. Instinctivement, mon regard rencontre le sien et un soupire de soulagement franchit mes lèvres lorsque je salue les quelques pépites d'or que je lui connais.
Doucement, mes yeux glissent sur son visage pour faire l'inventaire des dégâts. Un bleu parcours sa mâchoire et je dois retenir ma main libre pour ne pas la laisser se poser sur sa peau meurtrie alors que je dérive, avec soulagement, sur la dernière blessure du blond, une petite plaie sur son front déjà camouflé par un épais pansement rosé. Il n'a rien.
- Je suis désolé. Sifflé-je doucement en retrouvant ses yeux et leurs brillances presque mystiques.
- Tu n'as pas à l'être, personne n'a été grièvement blessé et je pense que Chan a dû te mettre au courant pour le producteur.
Je ne réponds rien et me contente de serrer un peu plus sa main dans la mienne tout en baissant peu à peu mon regard, finissant par rejoindre mes pieds, comme bien souvent.
- Si j'ai eu cet accident parce que tu es dans ma vie, je t'en remercie Naesil, parce que grâce à toi, on va pouvoir faire découvrir notre musique par quelqu'un d'important et peut-être, démarré notre carrière.
Il lâche alors ma main à mon grand regret, mais ce sentiment se dissipe lorsque ses bras viennent m'encercler. Il dépose ma tête contre son épaule et se met à caresser le sommet de mon crâne d'un geste tendre, répétant inlassablement qu'il va bien, que rien de grave n'est arrivé et n'arrivera jamais.
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Fate (Stray Kids FF)
Fiksi PenggemarÉtymologie : Naesil signifie l'arrivée de la vérité, de la réalité et de la sincérité. Passé : Tragique. Entourage : Inexistant. Présent : Compliqué. État d'esprit : Chaotique. Futur : déstabilisé par l'implication d'un certain groupe de garçon...