Ombrage

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Février 2019

J'ai essayé de la revoir plusieurs fois, mais ça a toujours été pareil, elle fait semblant de pas me voir ou alors elle me demande de la laisser tranquille, la tête baissée. Si je n'aurais pas lu la lettre qu'elle a laissé chez moi le jour où tout a basculé je forcerai certainement pas comme ça. Mais là, je le sais, qu'elle n'agit pas comme ça car elle en a envie mais car elle est forcée. Et ça m'emmerde vraiment.

J'aurais aimé pouvoir m'incruster chez elle et pour de bon parler, j'y suis déjà allé, malgré que ce soit souvent en coup de vent alors je serai bien capable d'y retourner. Mais jamais je me permettrais d'à cause de ma frustration la mettre en danger. Il est vrai, je suis frustrée, j'ai besoin de lui parler, d'avoir des réponses, c'est une chose. Mais je ne sais pas si son mari est chez elle, et donc chez eux ou en Italie. Et comme j'ai compris qu'il peut être violent, je préfère pas. Je m'en voudrais à vie si seulement pour ma petite personne j'aurais mis la vie de quelqu'un qui n'a pas demandé mon amour d'être en danger à cause de ça.

Alors en ce moment j'essaye de me centrer sur moi-même, bien évidemment en évitant de retourner entre les cuisses de Lola, mais en bossant pas mal. C'est pourquoi à 3h du mat' je suis dans les studios Don Dada dans lesquels j'étais avec Diabi pour fignoler un son sur lequel j'avais un immense trou noir et que j'avais mis de côté, me disant qu'il ne sortirait juste jamais alors. J'avais d'ailleurs eu du mal à accepter le sort de ce morceau, l'aimant tout particulièrement. Mais finalement en réécoutant les maquettes qu'on a faite pour ce projet la nuit dernière, j'ai été obnubilé de nouveau par ce titre. Alors j'ai sorti un carnet dans lequel j'ai raturé assez naturellement la fin du titre, retravaillant au passage la partie déjà enregistrée. Et lors de cette soirée on l'a fini, finalement il se retrouvera même dans l'album. D'un sens je suis content car j'aime vraiment ce titre, mais d'un autre, ça m'aide pas trop. Je vais devoir retravailler toutes les interludes et le sens de l'album. À croire que le casse-tête pour cette oeuvre ne se finira jamais.

Diabi s'est déjà cassé du stud depuis une vingtaine de minutes mais je suis obnubilé par ce son enfin fini d'enregistrer alors je l'écoute en boucle. Me demandant si la sonorité de ma voix est la bonne, si mes phrases sont tournées à la perfection ou bien si mon élocution est assez au niveau de la personne dont je parle dans ce son.

Je cessa alors rageusement le son sur la table de mixage en claquant un long soupir. De toutes manières je ne serai jamais satisfait, quand il est question d'elle j'ai tendance à rien n'estimer d'assez égalable. Je me lève alors pour chercher un pochon de shit et de quoi rouler, il doit forcément avoir ça planqué dans un coin. Une fois trouvé, je me réinstalle à la même place, roulant mon joint, l'allumant puis profitant de la première taffe.

Une fois un peu éloigné de la réalité, je lance de nouveau le son. L'âme éloignée par un vice, cela me permettra peut-être d'être un minimum neutre avec ce titre auquel je tiens tant.

Les yeux fermés, avachis dans ce siège de bureau qui me donne l'impression de planer dans l'air, mon joint au bord des lèvres je me laisse ressentir mes propres paroles avec les effets de voix ajoutés ainsi que l'instru entêtante.

«Il me semble que je sombre depuis quelques mois
Tellement sombre que mon ombre est plus claire que moi
Quand le jour s'est levé
Tu m'as demandé des news
Et quand la lune s'est levée
J'ai downloadé tes nudes

Une bouteille à la mer, un énième couplet sur SoundCloud
Et moi qui te voulais mienne, chaleur humaine replay sur Saint-Claude
Un jour les doutes s'enclenchent, tu sens que l'autre est sanglante
Des airs de bohémienne une danse qui fait couler tes sanglots

Toute cette émotion fait que je sombre depuis quelques mois
Tellement sombre que mon ombre est plus claire que moi
Quand le jour s'est levé
Tu m'as demandé des news
Et quand la lune s'est levée
J'ai downloadé tes nudes

Je me souviens de l'été, la liberté des mois d'août
Nos dégaines de bébé quand on s'envoyait des mots doux
Maintenant c'est démodé
Je suis prisonnier de mes doutes
Ah ouais tu veux m'aider?
Tu veux combien dis-moi tout?
Non j'suis pas à vendre
C'est moi qui vends
J'en ai niqué plein d'autres
Mais c'est moins kiffant
La Belle et le Clochard, l'amour autour d'un plat de noodles
Peu de confiance en moi, j'doutais de tout mais pas de nous deux
T'as un nouvel homme innocent, il me semble qu'on est mieux ensemble
Sur le phone propos menaçants minuit sonne je l'emmène en sang sur le sol
Si je suis allé trop loin, c'est pour ne plus revenir
C'est pas de sa faute à lui
J'suis sûr que ça te fait un peu plaisir quand t'y penses au fond de ton lit

Car il me semble que tu sombres mais ne t'inquiètes pas
Tu m'envoies des ondes, je les sonde depuis quelques mois
Quand le jour s'est levé
Tu m'as demandé des news
Et quand la lune s'est levée
J'ai downloadé tes nudes

J'ai besoin de tes mensonges, tous mes songes se rappellent de toi
Dans la même dimension dans mes sons depuis quelques mois
Prêt à perdre la raison si je sombre c'est en quête de toi
Tellement sombre que mon ombre est plus claire que moi

On veut se confier mais où est-ce qu'on va?
Y a de l'amour partout pour qui sait voir
Y a de la haine aussi, on voit c'qu'on veut
On veut c'qu'on voit, c'est une question de choix
Tu penses au désastre tu tentes ta chance
Est-ce-que ça vaut quelques instants de joie
Quand t'encaisses tant de choses?
C'est peut-être le bonheur qu'on fuyait
C'est étrange comme le conflit tente
J'ai vraiment b'soin de me confier
Mais c'est toi ma seule confidente
Alors je sombre

Il me semble que je sombre depuis quelques mois
Tellement sombre que mon ombre est plus claire que moi
Quand le doute s'est levé
J'me suis privé d'tes news
Et quand le jour s'est levé
J'ai supprimé tes nudes
Qui a besoin de toi? (Toi)
(Toi)»
Energie sombre - Nekfeu

Ma dernière taffe soufflée, rejoignant le nuage que j'ai créée avec les précédentes déjà soupirer. J'ai réécouter trois fois au total le son, et je crois que comme ça il est vraiment cool. Je verrais avec les gars en leur envoyant, mais pour le moment, faut que je rentre me pioter dans mon lit car ce joint m'a très clairement foutu à terre. Je sais même ap comment je vais faire pour conduire jusqu'à chez moi sans me foutre en l'air mais bon, on y va aller au talent, ça fera l'affaire.

Mes affaires une fois rangé et après vérification qu'aucune lumière n'est allumée, je sors enfin du stud, refermant derrière moi en me faisant la promesse de pas me lever trop tard le lendemain pour aller les rendre aux gars.

Pourtant, si j'aurais su, mes prochains jours allaient bien être chamboulé, quand, à peine je commença à marcher pour retrouver ma bagnole garée à quelques rues de là; une voix m'arrêta.

-Eh !

Reconnaissant un accent qui me donne absolument pas envie de me retourner pour taper la discussion et n'étant pas mis en confiance par ce grain de voix, je passe ma capuche par d'ssus ma casquette, marchant un peu plus vite, les mains dans les poches.

J'ai pas le temps de tout comprendre, mes seuls souvenirs sont un touché sur mon épaule droite assez appuyer pour me faire arrêter ma marche et me faire retourner sèchement vers un grand mec cagoulé. J'ai a peine le temps de réfléchir à ce que je pourrais dire pour essayer de savoir ce que ce gars m'veut que je me prends une droite dans la tronche. Les substances de shit dans mon organisme n'aident pas alors quand je me prends une énième droite dans la gueule, j'ai a peine le temps d'en mettre deux ou trois avant que plusieurs gars sortent de, j'en ai l'impression, nul part. Venant s'acharner sur moi aux côtés du premier gars. Je finis alors bien rapidement à terre. À ne même plus sentir la douleur des coups qu'on m'inflige. Je me sens seulement partir après que ma tête ait comme rebondit sur le sol une fois que j'y sois tombé.

Après, trou noir.

Fin presque.

Je retiens qu'une phrase qui me hante à force de tourner en boucle dans mon crâne.