PDV d'Alizée 22

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Rendez-vous à huit heures. Okay. Je regarde la porte de la maison; je n'ai aucune envie de la franchir, encore moins au mode mission commando dans l'idée de ne pas réveiller mon père. En m'adossant à celle-ci, je dresse mentalement la liste de tous les objets dont j'aurai besoin pour un séjour à la ferme de... mardi, mercredi, jeudi, vendredi, samedi, dimanche...six jours, je compte sur mes doigts. Mes clés sont posées sur le meuble dans l'entrée, mes affaires de toilettes dans le meuble de la salle de bains, là où les choses se compliquent, c'est en ce qui concerne tout ce qui se trouve dans ma chambre. Il me faudra monter sans faire de bruits, au moins aller chercher des cookies la nuit de temps en temps aura été utile à autre chose qu'à me pourrir le taux de glycémie. Je devrai être très efficace, enfin, tout ça si par chance, mon père a oublié de fermer cette foutue porte hier soir. C'est ainsi que je me surprends à espérer que mon papa ne soit pas excédé mais carrément ulcéré: il y aurait une chance que cet obstacle de bois soit franchissable. Dans le cas contraire, je pourrais dire au revoir à Morice et bonjour à la merde. En l'espace de deux jours, je suis tombée amoureuse d'un fille qui soit dit en passant ne parle pas ma langue et je me suis faire agressée à moins de deux mètres de mon père donc cette porte peut bien être ouverte... J'inspire un bon coup et je pose ma main sur la battant.

Celui-ci ne rencontre pas de résistance et la poignée se laisse descendre. Je retiens un soupir de soulagement. Après avoir refermé avec le moins de bruit possible la porte derrière, je me lance: j'attrape mes clés et les fourre dans une de mes poches, je me glisse doucement dans la salle de bains puis attrape ma trousse de toilettes, j'ai dedans tout mon matériel de première nécessité et puis ça n'ai pas le moment de faire la fine bouche, j'arrive au bas des escaliers.

C'est là que le moment critique de l'opération va se jouer. 

Je dépose lentement mon pied sur la première marche et je dépose mon poids tranquillement sur celui-ci. Marche après marche, je gravis l'obstacle avec le moins de bruit possible. Heureusement que cette baraque est pas trop vielle et que je me retrouve pas sur des escaliers en bois qui craquent comme chez grand-mère. Lorsque j'arrive au milieux de mon ascension, mon père n'est pas encore sorti de la chambre en hurlant que je foute le camps ou quoi que ce soit d'autre. Pas à pas, j'arrive enfin en haut et soulagée, ne trouve pas le halot de lumière vers la chambre de mon père: la porte est fermée. J'ai vraiment un ange gardien, c'est pas possible. Si je n'avais pas composé le numéro de Morice par erreur , que celui-ci ne m'avait invitée à le rejoindre, que la porte avait été verrouillée ou que mon père avait laissé la sienne ouverte, je me demande ce qu'il se serait passé même si au fond, je ne préfère pas savoir. 

Arrivée dans la chambre, je rassemble les vêtements qui me semblent adéquats: pas cette chemise à motif ni celle d'à côté, elles sont beaucoup trop dommages par contre ces deux vieux tee-shirt et ce vieux sweat me semblent adaptés. J'attrape ma paire de botte de pluie au fond de l'armoire. J'ignore si c'est un cliché ou si les fermiers utilisent réellement des bottes pour travailler mais dans le doute...Je rassemble toutes les affaires y compris ma trousse de toilettes dans mon plus grand sac de sport, je fourre mon porte-monnaie dans mon autre poche et ressors de la chambre. 

À nouveau l'épreuve de l'escaliers...

Allez, courage ! J'y suis presque. À nouveau, je pose très lentement mes pieds sur chaque marche, l'une après l'autre. Je finis par arriver saine et sauve en bas. Je marche jusqu'à la porte d'entrée et franchit celle-ci. 

Dehors, je pousse un énorme soupir. J'ai réussi.

Il est 5 heures quinze quand j'arrive à la gare de Vallorbe. J'ai à attendre seize minutes sur le banc froid et écaillé mon car postal (qui est au passage, le pire moyen de transport jamais inventé) pour Yverdon. Là-bas, je m'achèterai un petit encas, je sais qu'il y a un petit magasin qui ouvre très tôt le matin et j'irai me changer dans les toilettes. 

Quand même une jeune fille perdue et débraillée qui sent le vomi et attend un car postal à 5 heures du matin ça doit être assez drôle. Pourtant je ne suis pas en train de rire, j'arrive à peine à contenir toutes mes angoisses qui me tordent l'estomac. Qui fera mon père quand il verra que j'ai quitté la maison ? Et Tina... J'ai l'imperssion que ça fait une éternité que je n'ai pas pensé à elle et à son odeur. Et si elle n'était pas d'accord avec ma propsition ? Et si j'avais dit quelque chose qu'il ne fallait ? Et si elle ne m'aimait pas ?


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⏰ Dernière mise à jour : May 02, 2020 ⏰

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