Putain ils sont bavards aujourd'hui - Partie 1

74 5 320
                                    

Orvud, district Nord du Mur Sina, 14 juillet 852

« Pour madame Griffonds, n'oubliez ni l'aripiprazol, ni les lorazépam de secours, ni le cachet de miansérine du soir », rabâchait machinalement cette vieille peau d'Isabel. « Quant à Ymir, elle n'est pas sous votre tutelle, je me trompe ? Ça ne vous regarde pas, n'est-ce pas ? Oui, parfait. Prenez ça », lâcha-t-elle en lui fourrant une caisse de médicaments dans les mains, « et filez ce papier à votre médecin militaire de haut niveau. Suivante ! »

Livaï retint avec difficulté insultes et mandales dans la tronche. Depuis l'interception de Stephan, cette infirmière était devenue quasiment imbuvable – du moins avec lui. Ses patients, elle ne leur refilait aucune de sa bile. Mais je ne suis pas un sac de frappe, grosse truie.

La suivante, c'était Ymir. Son teint hâlé avait retrouvé un peu de son hâlé, et ses taches de rousseur étaient désormais aussi visibles que celles de Marion. Il rejoignit d'ailleurs cette dernière dans le coin du hall carré, simplissime et blanc dans lequel ils étaient quatre à attendre, face au bureau des infirmiers.

La blessure barrant sa joue droite ne se résumait plus qu'en un entaille encore un peu rougeâtre, certes très voyante, aux bordures rosissant déjà. En somme, elle était sur la belle voie de la cicatrisation, tant et si bien qu'on lui avait retirée ses points de suture. Il en restait certes des traces, mais la chercheuse avait l'air de mieux vivre sa défiguration ainsi.

Elle posa d'ailleurs une prunelle au vert plus vif sur lui. « Ça en fait, des cachets », murmura-t-elle dans un faible sourire. Il étudia rapidement le cerne flanqué sous son œil intact. Elle était fatiguée, si ce n'était épuisée, mais son humeur paraissait plus stable – d'autant plus depuis qu'elle avait lapidé ce rouquin d'américain. Et Danilin pensait de même.

L'officier, après avoir jeté un œil au Eren qui remettait son chignon en place, s'adossa contre les pierres claires, à côté de la scientifique, et croisa les bras.

« Comment ça va ?

— Ah... Fatiguée, murmura-t-elle. »

Il ne le manqua pas, son regard peiné. Elle devait certainement encore penser à Antoine, ou Annie, ou le fait qu'elle avait construit la machine numéro sept avec entrain et bonne humeur. D'autres choses flottaient, derrière sa pupille subtilement tourmentée ; mais il ne pouvait pas les deviner. Il ne voulait certainement pas non plus les savoir. Si cela devait arriver... Elle me le dira d'elle-même.

« Tu pourras dormir pendant le trajet », dit-il donc simplement. Acquiescement, silence, soupir. « Je me demande comment va Carla... » Mutisme, elle se tripota les doigts, il remarqua le sang bordant ses ongles rongés.

« Tu devrais les laisser tranquilles.

— Hein ? »

Il désigna ses plaies du bout de l'index ; elle écarquilla légèrement les paupières.

« Oh. Je ne fais plus attention, pardon... On rejoint l'escouade du Bataillon, c'est ça ?

— Ouais, bailla tout bas Ymir. »

Elle en avait enfin fini avec Isabel, et se rameutait tout juste, papiers et piluliers en main. « On va même porter des uniformes de ces alcooliques de la Garnison. Génial, nan ? Bref... » Elle s'arrêta net dans ses paroles, bloqua un moment, puis reprit ses esprits avec tout autant de brutalité. « En cas d'attaque... Je me transformerai, Eren aussi... Tu dois bien garder ta capuche », débita-t-elle subitement. « N'est-ce pas ?! »

Marion retint un mouvement de recul ; Livaï, un pas en avant. « Oui. Tout le monde devra prendre une capuche, de toute manière », précisa-t-elle-même. « Et j'ai bien envie d'y aller, ne serait-ce que pour savoir ce qu'ils ont fichu de Stephan. Livaï... ? »

ꜱᴀɴɢᴜɪɴᴏʟᴇɴᴛꜱ - ᴀᴛᴛᴀᴄᴋ_ᴏɴ_ᴛɪᴛᴀɴ&0.7[1] ⌜ᵗᵒᵐᵉ ⁵⌟Où les histoires vivent. Découvrez maintenant