Chapitre 11 Révélations

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Plusieurs chansons rythmées s'étaient succédé avant que la main de Thys n'écrase le bouton du radioréveil pour le faire taire. Bon sang, quel jour était-il ?

Comateux, la bouche pâteuse et un œil légèrement collé, Thys essayait de refaire surface. Jeudi, oui, on était jeudi ! Il avait manqué deux jours d'école à cause de l'Oritis et s'était reposé le mercredi. Reposé si l'on veut, ce n'est pas en affrontant des Péragores et vivant une soirée déjantée jusqu'à trois heures du matin que l'on se détend !

Bref, il devait se dépêcher, s'il ne voulait pas louper son bus pour aller au collège. Très vite habillé, il descendit à la cuisine. En passant devant la chambre de sa sœur, il espéra l'entendre appeler pour échanger sur les événements de la veille. Ils n'avaient pas eu l'occasion de reparler depuis l'attaque des Indésiratas.

Mais dès le palier de la porte, il perçut un ronflement régulier qui interdisait à quiconque de venir troubler le repos de la guerrière. En bas, son père lui avait préparé la table du petit déjeuner. Un paquet de céréales nature renversé répandait son contenu à côté de deux bols fumants. Des tartines se faisaient dorer dans le grille-pain et réussirent à le faire sursauter en jaillissant sans prévenir, grillées à souhait. Anthony Ano était penché sur l'évier et rinçait une petite cuillère.

— Bonjour, papa !

— Ah ! Tu es là, j'allais venir te secouer, ma marmotte. Bonjour, mon grand !

Anthony était encore en pyjama, les cheveux ébouriffés et la barbe naissante. Le regard qu'il portait sur son fils avait changé. On y lisait de la fierté, de la tendresse, mais aussi peut-être une certaine gêne ou inquiétude.

Anthony jeta un coup d'œil par la fenêtre. Il faisait nuit. On apercevait à peine la silhouette du marronnier majestueux et de la table de jardin en teck où Thys et Mélia prenaient leurs goûters seulement quinze jours plus tôt.

— Je vais t'emmener à l'arrêt de bus aujourd'hui. Depuis le passage à l'heure d'hiver, il fait trop sombre pour que tu te balades le matin en vélo, le long de l'Aval-Pierres.

Thys acquiesça. C'était un accord qui remontait à l'année dernière. Ses parents avaient accepté de le laisser circuler seul en vélo, excepté à la tombée de la nuit ou durant les matinées brumeuses d'automne et d'hiver. Cela tombait bien aujourd'hui, car le héros de la veille était fatigué et surtout, il osait à peine se l'avouer, il avait peur. Rouler sur le chemin de l'Aval-Pierres en traversant des bois et des champs déserts l'avait toujours séduit, même s'il y percevait parfois d'étranges sensations. Par contre, après les derniers événements, il avait l'angoisse de se retrouver seul, piégé par une bande d'Indésiratas.

Il venait à peine de poser son postérieur sur le coussin avachi d'une chaise en bois quand l'on sonna. Anthony fronça les sourcils et se dirigea prestement vers l'entrée. Qui pouvait bien leur rendre une visite aussi matinale ? Thys, tout en croquant dans une biscotte beurrée et nappée de confiture, prêta une oreille curieuse aux voix qui provenaient du hall et il reconnut sans mal le timbre ferme et décidé du Maître Arcan. Le petit homme entrait déjà dans la cuisine, Anthony sur ses talons. Il salua le garçon et s'assit en face de lui. Il avait troqué son élégant costume contre un pantalon ample en lin et un pull de laine claire, le tout enveloppé dans un long manteau marron.

Thys croqua une nouvelle bouchée sans avoir avalé la précédente. Sa gorge se nouait. Que lui voulait encore son modulateur de l'Oritis ? Il croyait ne plus le revoir avant un moment.

— Aujourd'hui, Thys, c'est moi qui t'emmène au collège et je viendrai aussi te chercher. Cela me laissera le temps de t'expliquer deux ou trois choses sur les Ethers et je pourrai ainsi assurer ta protection, déclara Téodor.

Thys, l'éveil des Ostendes  (Tome I) [ Terminé ]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant