Protège-moi - T.1 Pleine lune [Terminé]

Chapitre 17.1

Je descendais les marches quatre à quatre. Le petit déjeuner avalé en quatrième vitesse, les cheveux coiffés à la va-vite en queue de cheval, je ne me souvenais pas avoir été autant enthousiaste depuis que mes parents m'avaient emmené au Parc national d'Acadie. Notre vie américaine. Une autre vie. Mais rien n'allait tempérer ma bonne humeur aujourd'hui, je me le promis.

Je stoppais net en découvrant Arenht adossé contre sa voiture, juste devant mon immeuble.

— Désolé de te décevoir. Mon frangin a eu un appel urgent du boulot. Je suis officiellement ton chauffeur pour la journée.

Il m'ouvrit la portière et m'invita à m'installer d'un signe de la main.

— Non, ce n'est pas... Ne t'excuse pas. J'ai juste été surprise, m'empressais-je de préciser, gênée. Ne te sens pas obligé. Je peux rester à l'appart, j'ai des tas de bouquins à lire, ou même faire un tour en ville. Ne change pas tes plans pour moi.

Il se mit à rire devant ma tirade. Je ne savais plus où me mettre. J'avais vraiment le chic pour me ridiculiser devant lui.

— Allez, entre. Ça ne me dérange pas, au contraire. C'est l'occasion de me changer les idées.

Je montais pour cacher mon embarras. Me retrouver seule avec lui toute la journée, j'en rêvais tout en le redoutant. Je me rappelais ma promesse : profiter de cette journée à fond.

Direction Woodview, au nord-est de Peterborough, une petite heure de voiture. Un trajet que je n'appréhendais pas aux côtés d'Antonh ou Doc, mais avec lui, c'était une autre histoire. Comme pour le boulot, comporte-toi comme au Complexe ou en mission, tentais-je de me persuader. Plus facile à dire qu'à faire. Aujourd'hui on était clairement en repos. Heureusement il mena la conversation, réussissant à me distraire et à me détendre, ce qui n'était pas gagné d'avance.

— Ça te fascine vraiment tout ça, dit-il soudain. L'histoire des premières civilisations, les traces du passé.

J'acquiesçais, surprise qu'il s'attarde sur mes intérêts.

— Tu me semblais passionnée par ta lecture ce jour-là, à la bibliothèque universitaire.

Je captais son petit sourire à cette évocation. Je détournais la tête vers la vitre pour cacher mon émotion. Ainsi il m'avait observé ce jour-là, pas simplement suivi.

— Ça te manque ? Les cours, ta vie d'étudiante ?

— Un peu, commençais-je. Mais cette nouvelle vie, elle est... Je suis vraiment moi-même. Je n'ai plus à faire semblant.

— Je comprends parfaitement.

Un silence s'étira, loin d'être inconfortable. Nous étions juste chacun plongés dans nos pensées. Peu de temps après, nous arrivions sur le site. Le musée me parut un bon point de départ pour la journée.

Nous déambulions dans les salles et je ne pouvais m'empêcher de lui jeter de fréquents coups d'œil. Son visage reflétait un intérêt réel pour ce qui nous entourait. Rassurer sur le fait qu'il ne s'ennuyait pas, je me plongeais à mon tour dans la découverte des installations, avide d'en savoir plus sur ces traces gravées sur la roche. Tout entière concentrée sur les panneaux, je sursautais lorsqu'Arenht se matérialisa à côté de moi.

— Je m'absente quelques minutes pour prendre un appel, m'informa-t-il.

— OK, je ne bouge pas du bâtiment.

Il opina, jeta un regard circulaire autour de nous, puis rassuré, il rejoignit l'entrée. Je ne pus m'empêcher de le regarder partir.

Je pris mon temps, absorbant les détails visuels, les explications avant de passer à l'autre salle.

— Aylyn.

Je me tournais, surprise par cette interpellation. Personne ne me connaissait ici, enfin, je le pensais. Mon cœur s'affola, faisant de suite la connexion avec le Groupe L. Ils n'oseraient pas, en plein musée ? Sauf que la partie dans laquelle je venais de m'engager se trouvait un peu en retrait et vide de visiteurs.

J'eus à peine le temps de regarder derrière moi qu'un bras me plaqua dans le renfoncement d'un mur. Mon dos heurta le bois avec rudesse. Le froid contact de l'acier contre ma gorge me fit frémir. Je lâchais une plainte lorsqu'il m'entailla légèrement. De l'argent. Je me rétractais pour y échapper.

— C'est bien ce que je pensais. Tu en es une.